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leures places, & afpirent Vaguement à un mouvement qui leur préfente de nouvelles chances, Une pareille inquiétude n'eft qu'un fentiment perfonnel, & on ne l'anoblit qu'en apparence & paffagèrement, quand on le dirige vers les intérêts généraux dont la fociété paroit le plus occu pée. Mais le véritable efprit public, le feul qui puiffe fuppléer à l'imperfection de toutes les loix politiques, eft d'une toute autre nature; vafte dans fes vues, réfléchi dans fa marche, il tranfporte non pour un moment, mais pour toujours, nos intérêts perfonaels à quelque diftance de nous, afin de les réunir, afin de les foumettre à l'intérêt commun. Il faut de la force, il faut du temps pour s'élever à cet efprit public, & dans les commencemens un pareil effort eft pénible; il doit l'être fur-tout au milieu d'une Nation qui n'a jamais pris foin de fes propres affaires, & qui, accoutumée depuis des fiècles à s'abandonner uniquement aux prétentions individuelles, ou à celles qui dépendent d'une affociation circonfcrite, n'eft nulle, ment préparée à la grande fcène qui s'ouvre aujourd'hui devant elle. Je ne fais point ces réflexions, Meffieurs, pour affoiblir votre courage, mais pour vous engager à n'être point étonnés des contrariétés dont vous ferez l'épreuve tant que l'efprit national ne fera point encore en harmonie avec la grandeur des circonftances préfentes. Et pourquoi feriez vous abattus par des obftacles, tandis que le gouvernement, vers lequel fe font portées, comme à flot, toutes les paffions, toutes les intrigues & tou tes les calomnies, a maintenu néanmoins fon courage & fa perfévérance? Il eût connu, comme d'autres le prix du repos; il eût franchi bien ou mal les difficultés de finance; & en mettant tous fes foins à rendre à l'autorité fon

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ancienne influence il eût traverfe ces temps d'orages, comme on l'a fait tant de fois fans éclat, mais fans inquiétude. Au lieu de fuivre cette marche obfcure, il s'eft avancé au milieu des dangers; il s'eft expofé à tous les combats de Pintérêt perfonnel; il s'eft foumis à tous les faux foupçons, à toutes les interprétations injuftes; & au milieu d'une année défaftreuse, au milieu d'une année où le défaut des récoltes, les rigueurs de la faifon, les ravages des tempêtes & des fléaux de toute efpêce ont affailli la France, enfin, au milieu de la pénurie du tréfor royal & des embarras inextricables de la finance, il a mis en mouvement les habitans de tout un royaume ; &, gêné par des formes bizarres en elles-mêmes, & dont fouvent on avoit perdu la trace, il eft enfin parvenu, à force de foins & de peines, à raffambler ces Etats-généraux que la Nation a demandés avec tant d'inftance, ces Etats-généraux de la France, ces Etatsgénéraux du premier Empire du monde, ces Etats-généraux enfin qu'aucun de nous ne peut contempler, en ce moment, fans une refpectueufe émotion. C'eft à eux, c'eft à vous, Meffeurs, qu'il appartient d'achever le plus grand des ouvrages, & de répondre aux efpérances du meilleur des Rois; c'eft à vous à combler les vœux de tout un peuple. Qu'un jour, qu'un feul jour ne foit pas perdu, afin que vous arriviez plus tôt à votre terme, afin que vous alliez recueillir dans vos provinces les tributs de reconnoiffance qui vous feront dûs, afin que vous entendiez de toutes parts, dans votre route, les cris de Vive le-Roi, vive le bienfaiteur de fon peuple, & que vous mêliez à ces paroles l'ardente & touchante expreffion de votre admiration & de votre amour. O France! heureuse France! c'eft entre les mains de tes citoyens,

c'eft entre les mains de tes enfans, c'eft entre les mains de repréfentans, dont toi-même as fait le choix, que repofe aujourd'hui ta deftinée! Oui, Meffieurs, le Roi, en raffemblant les Etats-généraux, le Roi, en réunissant autour de lui les représentans de la Nation, le Roi, en appelant à fon aide un fi grand concours de lumières, a déja fatisfait à la gloire; mais il a befoin de vous pour obtenir les jouiffances les plus chères à fon cœur ; il a befoin de vous pour affurer le bonheur de fes peuples, pour accroitre & pour affermir la puiffance de l'Etat il a befoin de vous pour répandre pat tout dans fon royaume l'influence de fes volon tés bienfaifantes; il a befoin de vous enfin pour multiplier les tréfors de la France, par le contentement, la paix, la confiance & la liberté. Ah puiffe le ciel accorder à notre augußte Monarque une affez longue fuite de jours pour voir encore non-feulement l'aurore, mais le jour éblouiffant de tant de profpérités : puiffe-t-il recevoir ainfi une jufte récompenfe de fon bienfait; puiffe-t-il voir les premières moiffons de certe terre chérie; puiffe-t-il préfager enfin, avec une heureuse confiance, tout ce que lui devront les races futures! Et nous, par notre amour, acquittons à l'avance cette dette de la poftérité; foyons juftes, fayons reconnoiflans, &que le tribut de nos cœurs, que l'hommage de nos fentimens portés aux pieds de notre Souverain, foient la première de toutes les redevances que nous nous engageons pour toujours de lui payer.

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