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pu croire?) Athènes seule ne s'acquitta pas de ce juste devoir. La guerre étoit à ses portes; une multitude de barbares, ayant passé les mers, étoit venue ravager l'Attique, Térée, roi de Thrace, les chassa par la force de ses armes. Pandion, pour témoigner sa reconnoissance à ce prince sorti du sang du dieu Mars, lui donna sa fille Procné. Junon ni l'Hymen n'assistèrent point à ce mariage; les Graces ne présidèrent pas au lit nuptial : les Furies l'éclairèrent avec leurs torches funèbres; elles seules eurent le soin de le préparer. L'oiseau de la nuit vint se percher sur la chambre où les deux époux deyoient coucher; ses cris funestes célébrèrent, soit leur union, soit la naissance de leur premier enfant. Ce pendant la Thrace félicita son roi; le jour qui l'unit avec la fille de Pandion, et celui qui vit naître Itys de cette union, furent consa crés à jamais par des fêtes: tant l'homme connoft peu ses vrais intérêts!

Déja cinq ans s'étoient écoulés depuis que Procné avoit quitté la Grèce. Elle dit à son époux, en l'embrassant: Envoyez - moi à Athènes pour voir ma sœur, ou faites en sorte qu'elle vienne en ces lieux: vous m'accorde

rez une précieuse faveur si par vous je puis jouir une fois de sa vue.

Térée monte sur un vaisseau, arrive au port Pirée, et entre dans la ville de son beaupère. Déja il étoit dans le palais; Pandion et lui s'étoient donné les mains en signe d'amitié, et il avoit commencé à parler du sujet de son voyage et de l'envie que Procné avoit de voir sa sœur il promettoit au vieillard : que Philomèle ne tarderoit pas à revenir à Athènes.

Pendant cet entretien, Philomèle entra dans la salle. Elle portoit des vêtemens de la plus grande richesse; mais sa beauté surpassoit encore l'éclat de sa parure. A sa démarche, à son air majestueux, on l'auroit prise pour une naïade ou pour une dryade: mais quand ces divinités champêtres auroient des habillemens aussi magnifiques, elles n'égaleroient pas encore sa beauté.

Comme on voit les moissons dans leur maturité, ou l'herbe desséchée par la chaleur de l'été, s'embraser à l'approche de la flamme, de même, à la vue de Philomèle, Térée se sent consumer par le plus violent amour. Elle étoit belle sans doute; mais le barbare étoit de lui-même porté aux plaisirs de Vénus,

comme le sont tous les Thraces. Il conçoit d'abord mille desseins: tantôt il songe à corrompre la nourrice de la princesse à prix d'or, ou d'accabler la princesse elle-même de présens, et de l'acheter même au prix de tout son royaume; tantôt il forme le projet de l'enlever et de la conserver les armes à la main: il n'est rien que son amour effréné ne lui suggère, et son cœur ne peut suffire au feu qui l'embrase. Dans son impatience, il ne peut supporter aucun délai; il répète l'ordre qu'il a reçu de Procné,. et se presse, sous son nom, d'assurer adroitement le succès de ses vœux. L'amour le rendoit éloquent; et toutes les fois qu'il demandoit trop, il s'appuyoit de la volonté expresse de Procné; il versa même des larmes, comme si elle lui eût ordonné d'en répandre. Grands dieux ! que les cœurs des hommes sont impénétrables! Les efforts que fait Térée pour parvenir à son but criminel, sont regardés comme un effet de son amitié pour Procné, et son forfait lui attire des louanges.

Philomèle seconde elle-même son empressement; elle jette tendrement ses bras au cou de son père, et le prie de lui accorder la

grace (grace funeste!) d'aller voir sa sœur, Térée l'observe dans cette attitude, et tout ce qu'il voit sert d'aliment à sa passion furieuse; et lorsqu'elle donne à son père de tendres baisers, il voudroit être son père; et peut-être n'en seroit-il pas moins livré à son ardeur impie.

Pandion enfin se laisse vaincre à leurs vives instances; Philomèle lui rend graces, et regarde comme un bonheur ce qui devoit être Ja source de son infortune.

Le Soleil touchoit à la fin de sa carrière, et ses chevaux parcouroient cet espace du ciel qui penche vers l'Occident. On sert un magnifiqué repas, et les présens de Bacchus coulent dans des coupes d'or. On s'abandonne au sommeil; mais Térée n'en goûte pas les douceurs occupé tout entier de Philomèle, il se rappelle sa beauté, sa démarche, ses graces; il la voit, et ne voit qu'elle.

Au retour du Soleil, Pandio, embrassant son gendre, lui dit, les yeux baignés de larmes Puisque mes deux filles ont tant desiré ce voyage, et que vous paroissez vous-même le souhaiter aussi ardemment, Térée, je dois le permettre à l'innocente amitié de deux

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