<< Dans le principe était le Verbe, et le Verbe était avec Dieu, et e Verbe était Dieu. » Lui était dans le principe avec Dieu. >> Toutes choses ont été faites par lui, et sans lui il n'a été fait rien de ce qui a été fait. » En lui était la vie, et la vie était la lumière des hommes ; et la lumière luit dans les ténèbres, et les ténèbres ne l'ont point comprise. >> Il y eut un homme envoyé de Dieu : son nom était Jean. Cet homme vint pour servir de témoin, pour rendre témoignage à la lumière, afin que tous crussent par lui. Il n'était pas lui-même la lumière, mais il était pour rendre témoignage à la lumière. » Il y avait la lumière véritable, qui éclaire tout homme venant dans ce monde. Il était dans le monde, et le monde a été fait par lui, et le monde ne l'a point connu. Il est venu dans son propre héritage, et les siens ne l'ont point reçu. Tous ceux cependant qui le reçurent, il leur a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu; à ceux qui croient en son nom, qui ne sont point nés du sang, ni de la volonté de la chair, ni de la volonté de l'homme, mais de Dieu. » Et le Verbe a été fait chair, et il a habité parmi nous, et nous avons vu sa gloire, comme la gloire du Fils unique du Père plein de grâce et de vérité 1. >> 'Joan., 1, 1-14. TOME IV. 831 C'est ainsi que commence son évangile ou son récit de la bonne nouvelle, le disciple bien-aimé du Sauveur, l'apôtre saint Jean. Il avait reposé sur le cœur de son maître, lorsqu'au dernier souper il institua le mystère de son amour; pendant son exil dans l'ile de Patmos, les cieux s'étaient ouverts à son regard prophétique; mais lorsqu'il écrit son évangile, la divinité elle-même semble se dévoiler à lui. On compare les quatre évangélistes aux quatre êtres symboliques qui, dans Ezéchiel, forment le char mystérieux de l'Eternel: l'homme paraît l'emblême de saint Mathieu, qui commence par la généalogie humaine du Christ; le lion, l'emblême de saint Marc, qui commence par la voix de celui qui crie dans le désert; le bœuf, animal du sacrifice, l'emblême de saint Luc, qui commence par le sacrifice de Zacharie; l'aigle, l'emblême de saint Jean, qui, par son vol hardi, s'élève au-dessus de toutes les créatures, jusque dans le sein de la divinité, qu'il semble contempler à l'œil nu. Un philosophe platonicien, ayant lu les premières paroles de cet aigle divin, s'écria qu'elles méritaient d'être écrites en lettres d'or, et exposées aux lieux les plus apparents dans toutes les églises 1. Combien plus précieusement ne devons-nous pas les écrire et les méditer dans nos âmes! : Premières paroles de Moïse, racontant la création du monde: Dans le principe Dieu créa le ciel et la terre; premières paroles de saint Jean, racontant la génération du Verbe éternel Dans le principe était le Verbe. Ces trois paroles: Dans le principe créa Dieu, et ces trois autres : Dans le principe était le Verbe, se correspondent visiblement. La première, dans le principe, est la même dans Moïse et dans saint Jean. Nous avons vu, avec les saints Pères, que la première parole de Moïse, dans le principe, a trois sens également vrais dans le principe ou le commencement des temps; dans le principe ou le commencement des choses; dans le principe ou le Verbe éternel, Dieu créa le ciel et la terre. Nous voyons, avec les saints Pères encore, que la première parole de saint Jean, dans le principe, a les trois sens également vrais dans le principe ou le commencement des temps; dans le principe ou le commencement des choses; dans le principe ou dans le Père était le Verbe 2. Le Père est le principe du Fils, parce que le Fils procède du August. De civ. Dei, I. 10, c. 29. 2 Clem. Alex. Ad gent., p. 5. Orig. Tract., 4, in Joan. Cyrill., 1. 1, in Joan., c. 1. Greg. Nyss. Orat. ad simplicium. Aug., 1. 6. De Trin., c. 3. Beda, etc. Père; le Père et le Fils sont le principe du Saint-Esprit, parce que le Saint-Esprit procède du Père et du Fils. Notre âme, étant faite à l'image de Dieu, nous offre une certaine ressemblance de cette Trinité adorable. Elle est, elle se connaît, elle s'aime; elle se connaît, parce qu'elle est; sa connaissance, son idée, sa parole intérieure, son verbe, procède de son être; elle s'aime, parce qu'elle est et qu'elle se connaît; son amour procède de son être et de sa connaissance. Et son être, et sa pensée, et son amour, quoique réellement distincts, sont substantiellement la même chose, la même âme. Et cette pensée qui procède de l'être y demeure cependant; et cet amour qui procède de l'être et de la pensée demeure dans l'un et dans l'autre. Et nous ne comprenons pas ce mystère; mais il nous fait comprendre que, si nous ne pouvons nous comprendre nous-mêmes, nous ne devons pas nous étonner de ne pouvoir comprendre Dieu. Le Père est le principe générateur du Fils, qui lui est coéternel; le Fils est le principe créateur du monde, qui est produit dans le temps. La puissance de notre âme est le principe de notre pensée, qui en est distincte et inséparable; notre pensée est le principe des œuvres que nous réalisons au dehors, sur le modèle qui est notre pensée même. Ainsi, le même apôtre appelle-t-il le Verbe divin le principe de la création que Dieu1 a réalisée au dehors. C'est dans ce principe, suivant les saints docteurs, que Dieu a créé le ciel et la terre. Outre ce sens plus élevé que les Pères de l'Eglise reconnaissent en la première parole de Moïse et de saint Jean, il en est encore un ou deux autres également dignes d'attention. Moïse a dit : Dans le principe, c'est-à-dire dans le commencement des temps et des choses, Dieu créa le ciel et la terre. Saint Jean dit, au contraire: Dans le principe, dans le commencement des temps ou des choses, le Verbe était. Il n'y a jamais eu de temps où le Verbe ne fût pas; car au commencement des temps, lorsque le ciel et la terre furent créés, le Verbe était; il ne commençait pas, il était ; on ne le créait pas, on ne le faisait pas, il était. Et qu'étaitil? Le Verbe, la parole intérieure, la pensée, la raison, l'intelligence, la sagesse; le Verbe, la parole, la pensée éternelle et substantielle de Dieu. Et le Verbe était en Dieu, avec Dieu, chez Dieu; comme étant en Dieu une personne, et une autre personne que ce Dieu en qui il est. Et cette personne était une personne divine; car l'Evangile 'Apoc., 3, 14. ajoute: Et le Verbe était Dieu; Dieu en Dieu, Dieu de Dieu, engendré de Dieu, subsistant en Dieu; Dieu comme lui, au-dessus de tout, béni aux siècles des siècles. Amen. Il est ainsi, dit saint Paul 1. L'Evangile insiste: Lui, le Verbe, était dans le principe avec Dieu. Remontez au commencement de toutes choses; poussez vos pensées le plus loin que vous pouvez; allez au commencement du genre humain, il était. Allez au premier jour, lorsque Dieu dit: Que la lumière soit, il était. Remontez. Elevez-vous avant tous les jours au-dessus de ce premier jour; lorsque tout était confusion et ténèbres, il était. Lorsque les anges furent créés dans la vérité en laquelle Satan et ses sectateurs ne demeurèrent point, il était. Au commencement, avant tout ce qui a pris commencement, il était. Il était seul, en son Père, auprès de son Père, au sein de son Père: il était. Et qu'était-il? Qui le pourrait dire? qui nous racontera, qui nous expliquera sa génération? Il était, car, comme son Père, il est Celui qui est ; il est le parfait, il est l'existant; le subsistant, l'être même. Mais qu'était-il? Qui le sait? On ne sait rien autre chose, sinon qu'il était, c'est-à-dire qu'il était ; mais qu'il était engendré de Dieu, subsistant en Dieu, c'est-à-dire qu'il était Dieu et qu'il était Fils. Toutes choses ont été faites par lui, et sans lui rien n'a été fait de tout ce qui a été fait. Concevons, si nous pouvons, la différence de celui qui était, d'avec tout ce qui a été fait. Quelle immense distance de ces deux choses! Etre, c'est ce qui convient au Verbe; être fait, c'est ce qui convient à la créature. Il était donc comme celui par qui devait être fait tout ce qui a été fait, et sans qui rien n'a été fait de tout ce qui a été fait. En lui, dit saint Paul, ont été créées toutes choses, et celles qui sont dans les cieux et celles qui sont sur la terre, les visibles et les invisibles, soit les trônes, soit les dominations, soit les principautés, soit les puissances; toutes choses ont été créées par lui et pour lui; il est avant toutes choses, et toutes choses ont en lui leur ensemble 2. Sans lui rien n'a été fait. Sans lui : un autre faisait donc avec lui, et il faisait avec un autre. Cet autre est son Père; car toutes les choses que le Père fait, le Fils les fait semblablement 3. Il est la sagesse éternelle que le Père a engendrée en son sein, qui a été conçue et enfantée avant les collines, qui est avec lui, avec lui ordonne et arrange tout, se joue en sa présence, et se délecte par la facilité et variété de ses desseins et de ses ou |