Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

PRÉFACE.

Ce poème a été commencé dans l'année 1785, et fini en 1794. L'intervalle de ces deux dates a été marqué par de grands évènemens, dont on y retrouvera quelques traces. Cette observation m'a paru nécessaire, car il est juste que chaque époque soit chargée de sa propre responsabilité.

Deux inconvéniens sont attachés aux ouvrages longtemps annoncés: le public se venge de ces retards par un jugement trop rigoureux; les lectures qu'en a faites l'auteur, soit dans le monde, soit dans les sociétés littéraires, les fragmens qui en sont connus, lui donnent, au moment de sa publication, un air de vieillesse qui le décolore.

De plus, cette longue attente donne à la malveillance le temps de s'armer contre le succès, et déjà, au défaut de l'ouvrage qu'on ne connaissait pas, on en a attaqué le titre; on a prétendu que l'Imagination était un sujet trop vague et trop étendu; on a oublié que Lucrèce a fait un poème sur la Nature des choses, De rerum naturâ, c'està-dire sur le monde entier et sur tout ce qu'il renferme ; sujet assurément beaucoup plus vague, beaucoup plus étendu, et dont l'Imagination ne serait qu'une faible partie, ce qui n'empêche pas que ce poème ne soit un des plus magnifiques et un des plus précieux monumens de l'antiquité. La grande étendue d'un sujet est plutôt un avan

tage qu'un inconvénient; l'important est d'en diviser les masses en parties bien distinctes et bien circonscrites.

C'est ce que je me suis proposé de faire, comme on le verra dans le plan que je trace ici de l'ensemble du poème, et des différentes parties qui le composent.

CHANT PREMIER.

L'homme sous le rapport intellectuel.

Les sens sont frappés par les divers objets qui se présentent à eux; ces impressions se gravent dans la mémoire : phénomène inexplicable de cette faculté ; c'est dans son vaste dépôt que l'imagination les choisit, les colore, les modifie, les assortit à son gré; les songes, ouvrage de l'imagination encore agissante dans le repos de la nuit, l'action de l'imagination dans la création et l'emploi des figures, ses voyages du monde moral au monde physique, du monde physique au monde moral, et l'art avec lequel elle les embellit l'un par l'autre ; de là les comparaisons; les différentes idées éveillées les unes par les autres; ce qui, dans les divers caractères des objets, frappe le plus vivement l'imagination; les effets que produisent sur elle les contrastes, les oppositions et les rapports plus ou moins immédiats; comment elle arrive d'une idée à celle qui en paraît le plus éloignée; des idées innées, de leur influence sur le reste de la vie ; quel degré de bonheur peut procurer à l'homme la culture de son intelligence et de son imagination. Episode historique à ce sujet.

CHANT DEUXIÈME.

L'homme sensible.

le

sou

Influence de l'imagination sur le bonheur ; les plaisirs de l'illusion suppléant aux plaisirs réels; l'imagination, dédaignant le présent, se rejette vers le passé par venir, et vers l'avenir par la prévoyance. Le souvenir, source d'un grand nombre d'affections, de vices et de vertus, produit les regrets, les remords, l'amitié, la reconnaissance et la haine : épisode relatif à cette passion. L’avenir frappe encore plus vivement l'imagination; elle y est entraînée d'un côté par la crainte, de l'autre par l'espérance; son influence non seulement morale, mais physique; quelques effets heureux des illusions du mesmérisme; effets nuisibles ou salutaires de la crainte ; avidité avec laquelle elle cherche les pronostics de l'avenir; ce que l'imagination ajoute à l'avarice, à l'ambition et à l'amour : épisode relatif à cette passion.

CHANT TROISIÈME.

Impression des objets extérieurs.

Les couleurs, les formes, les mouvemens, la grâce qui résulte de leur élégance et de leur harmonie ; pouvoir et charme de la pudeur; pouvoir de la nouveauté, ses attraits et ses dangers; puissance de la mode; impression qu'on reçoit à la vue de ce qui commence et de ce qui finit; de l'enfance et de la vieillesse ; ce que le besoin d'être ému donne d'attraits même aux spectacles les plus terribles, les batailles, les volcans. Quels objets font naître

et entretiennent la mélancolie, la tristesse, l'épouvante et l'horreur; nuances qui séparent et distinguent ces diverses affections; les objets rians, leur définition; peinture de quelques objets de ce genre; effets de la grandeur sur l'imagination; la grandeur dans les ouvrages de la nature, les forêts, la mer et les montagnes; grandeur du spectacle du ciel; l'homme, chef-d'œuvre de la création, et affectant plus vivement l'imagination que tous les autres objets, par l'impression de ses sentimens; éloquence du discours, du geste et surtout du regard : un coup d'œil de Marius désarmant son assassin.

CHANT QUATRIÈME.

Impression des lieux.

Au premier aspect, le sujet de ce chant peut paraître tenir de trop près à celui qui le précède; mais en y réfléchissant, l'impression des lieux ne peut pas plus se confondre avec les objets dont nous sommes frappés que le site d'un volcan avec le volcan lui-même, le lieu de la scène avec l'action qu'on y représente, un champ de bataille avec le combat dont il est le théâtre.

Effets réciproques de l'imagination sur les lieux, et des lieux sur l'imagination; influence des lieux sauvages et rians, agissant sur nous avec une variété qui dépend des dispositions de notre âme. A la puissance physique des lieux se joint la puissance morale, qui prend sa source dans nos souvenirs agréables ou tristes : nous aimons les lieux où nous reçûmes la naissance ou l'éducation, où nous avons été heureux, où nous fumes amans ou aimés,

ceux même où nous fùmes malheureux, ceux où reposent les objets de nos affections et de nos regrets. Antiquité des lieux et souvenirs qui y sont attachés : ces lieux font une impression d'autant plus vive, qu'ils rappellent des évènemens plus célèbres; l'imagination se plaît à en parcourir les ruines, à les rebâtir; recompose Rome et Athènes. Episode sur le voyage en Grèce par M. de Choiseul; charmes qu'éprouvent les écrivains dans les lieux qui les ont inspirés. Impression des lieux ténébreux, des lieux solitaires, et de la solitude et des ténèbres réunies à un grand danger: exemple de ces impressions, tiré d'un fait arrivé dans les catacombes de Rome.

CHANT CINQUIÈME.

Les arts.

Hymne à la beauté, considérée comme le modèle des arts; le beau idéal dans la sculpture et la peinture; soin que les artistes grecs avaient de ne saisir dans la nature que ce qu'il y avait de plus parfait, et de composer un tout de plusieurs traits épars, choisis par le goût et reproduits par le génie; ces artistes se sont même souvent élancés au-delà de la nature pour y trouver une perfection dont elle ne leur offrait point de modèle; l'Apollon du Belvédère, la Transfiguration de Raphaël ; la musique, la danse, l'architecture; description de la rotonde de Saint-Pierre de Rome; la poésie, ses charmes et ses consolations; ses différens genres: la comédie, la tragédie, Molière et Racine; l'apologue, La Fontaine; l'épopée, Homère, Virgile, le Dante, Milton, l'Arioste, le Tasse,

« ZurückWeiter »