Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

au premier événement de ce genre dont on pourrait donner la preuve; le coupable fut arrêté. Sa mère, dans le désordre de la plus grande douleur, courut se jeter aux pieds de la dauphine, du dauphin et des jeunes princes; ils obtinrent du roi, après une heure de prière, la grâce tant désirée. Le lendemain, en félicitant madame la dauphine, une grande dame, qui s'était sûrement laissé prévenir contre la mère du gendarme, eut la méchanceté d'ajouter que cette mère n'avait négligé, dans cette circonstance, aucun moyen de réussir; qu'elle avait sollicité non-seulement la famille royale, mais même madame Du Barry. La dauphine répondit que ce trait justifiait l'opinion favorable qu'elle avait conçue de cette brave femme; que, pour sauver la vie de son fils, rien ne devait coûter au cœur d'une mère; et qu'à sa place, si elle l'eût jugé nécessaire, elle aurait été se jeter aux pieds de Zamore 1.

Quelque temps après les fêtes du mariage, madame la dauphine fit son entrée à Paris; elle y fut reçue avec des transports de joie. Après avoir dîné dans l'appartement du roi, aux Tuileries, elle fut forcée, par les cris multipliés de la foule qui remplissait le jardin, de se présenter sur le balcon, en

'Petit Indien qui portait la queue de la robe de la comtesse Du Barry. Louis XV s'amusait assez souvent de ce petit sapajou; ayant fait la plaisanterie de le nommer gouverneur de Luciennes, on lui donnait trois mille francs de gratification annuelle. (Note de madame Campan.)

[ocr errors]

face de la grande allée. Elle s'écria, en voyant toutes ces têtes pressées, les yeux levés vers elle : « Grand » Dieu, que de monde! — Madame, lui dit le vieux » duc de Brissac, gouverneur de Paris, sans que Monseigneur le dauphin puisse s'en offenser, ce >> sont autant d'amoureux 1. » M. le dauphin ne s'offensait ni des acclamations, ni des hommages dont madame la dauphine était l'objet. Une indifférence affligeante, une froideur qui dégénérait souvent en brusquerie, étaient les seuls sentimens que lui montrait alors le jeune prince. Tant de charmes n'avaient même rien obtenu sur ses sens; il venait, par devoir, se placer dans le lit de la dauphine, et s'endormait souvent sans lui avoir adressé la parole. Cet éloignement, qui dura fort long-temps, était, dit-on, l'ouvrage de M. le duc de La Vauguyon. La dauphine n'avait véritablement de sincères amis à la cour que le duc de Choiseul et son parti. Croirat-on que les projets formés contre Marie-Antoinette allaient jusqu'à voir la possibilité d'un divorce? Quelques gens, possédant à la cour des places émi

'Jean-Paul Timoléon de Cossé, duc de Brissac, et maréchal de France, celui-là même dont nous avons cité en note, pag. 31 de ce volume, une réponse pleine de noblesse. Il offrait à la cour de Louis XV et de Louis XVI un modèle des mœurs, de la galanterie et du courage des anciens chevaliers. Le comte de Charolais le trouvant un jour chez sa maîtresse, lui dit brusquement: Sortez, monsieur. Monseigneur, répondit vivement le duc de Brissac, vos ancêtres auraient dit : Sortons. (Note de l'édit.)

nentes, me l'ont assuré, et beaucoup de choses pouvaient confirmer cette opinion. Au voyage de Fontainebleau, l'année du mariage, on gagna les inspecteurs des bâtimens, pour que l'appartement de monseigneur le dauphin, attenant à celui de la dauphine, ne se trouvât pas achevé, et on lui en fit donner un provisoirement à l'extrémité du château. La dauphine, sachant que c'était le résultat d'une intrigue, eut le courage de s'en plaindre à Louis XV qui, après de sévères réprimandes, donna des ordres si positifs, que dans la semaine l'appartement se trouva prêt. Tout était employé pour entretenir et augmenter la froideur que le dauphin témoigna longtemps à sa jeune épouse. Elle en fut profondément affligée, mais ne se permit jamais d'articuler la moindre plainte à cet égard. L'oubli, le dédain même pour des charmes qu'elle entendait louer de toutes parts, rien ne lui faisait rompre le silence; et quelques larmes, qui s'échappaient involontairement de ses yeux, étaient les seules traces que son service ait pu voir de ses peines secrètes.

Un seul jour, fatiguée des représentations déplacées d'une vieille demoiselle qui lui était attachée, et qui voulait s'opposer à ce qu'elle montât à cheval, dans la crainte que cela ne l'empêchât de donner des héritiers à la couronne : << Mademoiselle, lui dit>> elle, au nom de Dieu, laissez-moi en paix, et sa>> chez que je ne compromets aucun héritier. »>

J'ai dû peindre, au commencement de ces Mémoires, l'homme obscurément ambitieux qui dirigea

Marie-Antoinette depuis son enfance jusqu'à l'époque fatale de la révolution.

J'ai fait connaître le caractère de la dame d'honneur de la dauphine; j'ai donné quelques détails sur les préventions de madame Adélaïde, fille aînée de Louis XV, contre la maison d'Autriche; j'ai parlé de la bonté extrême de la seconde princesse, madame Victoire, de l'attrait qu'elle avait eu pour Marie-Antoinette; enfin j'ai donné une idée du caractère de madame Sophie, troisième fille de Louis XV, et qui offrait à sa nièce, encore bien moins. que Mesdames ses sœurs, les utiles ressources de la société.

Madame la dauphine avait trouvé à la cour de Louis XV, avec les trois princesses, filles du roi, les princes frères du dauphin en éducation; mesdames Clotilde et Élisabeth encore entre les mains de madame de Marsan, gouvernante des enfans de France. L'aînée de ces deux princesses épousa, en 1777, le prince de Piémont, devenu roi de Sardaigne. Cette princesse était, dans son enfance, d'une si énorme grosseur, que le peuple lui avait donné le sobriquet de gros Madame . La seconde princesse était la

1.

'Madame Clotilde de France, sœur du roi, était, en effet, d'un embonpoint extraordinaire pour sa taille et pour son âge. Une des dames de son jeu ayant eu l'indiscrétion de se servir, en sa présence même, du sobriquet qu'on lui donnait, reçut sur-le-champ une réprimande sévère de la comtesse de Marsan qui lui fit entendre qu'elle ferait bien de ne pas reparaître aux yeux de la princesse. Madame Clotilde l'envoya chercher le lendemain. Ma gouvernante a fait son devoir, lui dit-elle, et je

pieuse Elisabeth, victime de son respect et de son tendre attachement pour le roi son frère, et dont les hautes vertus méritent la couronne céleste'. Elle était encore presque à la lisière à l'époque du mariage du dauphin. La dauphine lui donnait une préférence marquée. La gouvernante, qui cherchait à faire valoir celle des deux princesses que la nature avait traitée moins favorablement, sut mauvais gré à madame la dauphine de son affection particulière pour madame Elisabeth, et, par des plaintes indiscrètes, elle refroidit l'amitié qui existait cependant entre madame Clotilde et Marie-Antoinette. Il s'éleva même quelque rivalité sur l'article de l'éducation,

vais faire le mien; revenez nous faire votre cour, et ne vous rappelez plus une étourderie que j'ai moi-même oubliée.

Cette princesse, si épaisse de corps, avait un esprit agréable et fin. Son affabilité, ses grâces prévenantes, la rendaient chère à tous ceux qui l'approchaient. Un poëte, uniquement occupé du prodigieux embonpoint de madame Clotilde, composa le quatrain suivant, lorsqu'il fut décidé qu'elle épouse rait le prince de Piémont

Pour en saisir l'esprit, ou pour mieux dire le sens, il ne faut point oublier que deux princesses de Savoie venaient d'épouser deux princes français.

[blocks in formation]
[ocr errors]

(Note de l'édit.)

Élisabeth-Philippine-Marie-Hélène de France était née à

« ZurückWeiter »