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CHAPITRE III.

Arrivée de l'archiduchesse en France.

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Madame de Noailles,

sa dame d'honneur. Comment elle s'attira le surnom de madame l'Étiquette. Brillante réception de la dauphine à Versailles. Sa beauté, sa franchise; grâce et noblesse de son maintien. Elle charme Louis XV, Jalousie de madame Du Barry. Événement malheureux de la place Louis XV.-Trait de sensibilité de la dauphine.

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rituel. Anecdotes.

Mot spi

- Elle fait son entrée à Paris. - Enthousiasme des habitans. - Froideur du dauphin Intri

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gues de cour.— Société intime du dauphin, des princes ses frères et de leurs épouses. Les trois princesses et les deux frères du dauphin jouent la comédie en cachette.

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Singu

lière circonstance qui interrompt ce genre d'amusement. Les courtisans se rapprochent de Marie-Antoinette et du dauphin.

On avait préparé, sur les frontières, auprès de Kehl, un superbe pavillon composé d'un très-vaste salon qui communiquait à deux appartemens : l'un où devaient se tenir les dames et les seigneurs de la cour de Vienne, l'autre destiné à la suite de la dauphine, composée de madame la comtesse de Noailles, sa dame d'honneur; madame la duchesse de Cossé, sa dame d'atours; quatre dames du palais ; M. le comte de Saulx-Tavannes, chevalier d'honneur; M. le comte de Tessé, premier écuyer; M. l'évêque de Chartres, premier aumônier; les officiers des gardes-du-corps et les écuyers.

Lorsqu'on eut entièrement déshabillé madame la dauphine, pour qu'elle ne conservât rien d'une cour étrangère, pas même sa chemise et ses bas (étiquette toujours observée dans cette circonstance), les portes s'ouvrirent; la jeune princesse s'avança cherchant des yeux la comtesse de Noailles, puis s'élança dans ses bras, en lui demandant, les larmes aux yeux, et avec une franchise qui partait de son cœur, de la diriger, de la conseiller, d'être en tout son guide et son appui. On ne put qu'admirer cette marche aérienne : on était séduit par un seul sourire; et dans cet être tout enchanteur, où brillait l'éclat de la gaieté française, je ne sais quelle sérénité auguste, peut-être aussi l'attitude un peu fière de sa tête et des épaules, faisait retrouver la fille des Césars.

En rendant justice aux vertus de la comtesse de Noailles, les gens sincèrement attachés à la reine ont toujours regardé comme un de ses premiers malheurs, peut-être même comme le plus grand qu'elle pût éprouver à son entrée dans le monde, de n'avoir pas rencontré, dans la personne naturellement placée pour être son conseil, une femme indulgente, éclairée, et unissant à des avis sages cette gràce qui décide la jeunesse à les suivre. Madame la comtesse de Noailles n'avait rien d'agréable dans son extérieur; son maintien était raide, son air sévère. Elle connaissait parfaitement l'étiquette; mais elle en fatiguait la jeune princesse sans lui en démontrer l'importance. Toutes ces formes étaient gênantes à la vérité; mais elles avaient été calculées sur la néces

sité de présenter aux Français tout ce qui peut leur commander le respect, et surtout de garantir une jeune princesse, par un entourage imposant, des traits mortels de la calomnie. Il aurait fallu faire sentir à la dauphine qu'en France sa dignité tenait beaucoup à des usages qui n'étaient nullement nécessaires à Vienne pour faire respecter et chérir la famille impériale par les bons et soumis Autrichiens. La dauphine était donc perpétuellement importunée par les représentations de la comtesse de Noailles, et en même temps excitée par l'abbé de Vermond à tourner en dérision et les préceptes sur l'étiquette et celle qui les donnait. Elle écouta plutôt la raillerie que la raison, et surnomma madame la comtesse de Noailles madame l'Étiquette. Cette plaisanterie fit présumer qu'aussitôt que la jeune princesse agirait selon ses volontés, elle se soustrairait aux usages imposans1.

'Madame la comtesse de Noailles, dame d'honneur de la reine, était remplie de vertus; la piété, la charité, des mœurs irréprochables, faisaient d'elle une personne vénérable; mais tout ce qu'un esprit exactement borné peut ajouter d'importun, même aux plus nobles qualités, la dame d'honneur en était abondamment pourvue. Il eût fallu à la reine une dame d'honneur qui lui fît bien connaître l'origine de ces étiquettes, à la vérité très-gênantes, mais érigées comme une barrière imposante contre la malveillance. L'usage d'avoir des dames et des chevaliers d'honneur, celui de porter des vertugadins de trois aunes de tour, a sans doute été inventé pour donner à nos jeunes princesses un entourage si respectable que la ma

Les fêtes qui eurent lieu à Versailles pour le mariage du dauphin furent très-brillantes. La dauphine y arriva pour l'heure de sa toilette, après avoir couché à la Muette où Louis XV avait été la recevoir, et où ce prince, aveuglé par un sentiment indigne d'un souverain et d'un père de famille, avait fait souper la jeune princesse, la famille royale et les dames de la cour avec madame Du Barry.

La dauphine en fut blessée; elle en parlait assez ouvertement dans son intérieur; mais elle sut dissimuler son mécontentement en public, et son maintien fut parfait 1.

licieuse gaieté des Français, leur penchant au dénigrement et trop souvent à la calomnie, ne pussent trouver l'occasion de les attaquer.

La comtesse de Noailles tourmentait sans cesse la reine par mille représentations sur ce qu'elle aurait dû saluer celui-ci de telle façon, celui-là de telle autre. Paris sut que la reine l'avait nommée madame l'Étiquette; selon la disposition des esprits, les uns approuvèrent ce sobriquet, les autres le blâmèrent; mais tous jugèrent les dispositions de la jeune reine à s'affranchir d'entraves fatigantes. (Note de madame Campan.)

I

Voyez les Mémoires de Weber, tom. Ier*. En général, les Mémoires de cet écrivain, qui était frère de lait de MarieAntoinette, complètent ce que madame Campan a dit de cette princesse les deux ouvrages sont presque inséparables.

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(Note de l'édit )

2 vol. in-8°., qui font partie de la Collection, mais qui se vendent aussi séparément.

On la reçut à Versailles dans un appartement du rez-de-chaussée, au - dessous de celui de la feue reine, qui ne fut prêt que six mois après le jour de son mariage.

Madame la dauphine, alors âgée de quinze ans, éclatante de fraîcheur, parut mieux que belle à tous

les yeux. Sa démarche tenait à la fois du maintien imposant des princesses de sa maison, et des grâces françaises; ses yeux étaient doux, son sourire aimable. Lorsqu'elle se rendait à la chapelle, dès les premiers pas qu'elle avait faits dans la longue galerie, elle avait découvert, jusqu'à l'extrémité de cette pièce, les personnes qu'elle devait saluer avec les égards dus au rang, celles à qui elle accorderait une inclination de tête, celles enfin qui devaient se contenter d'un sourire, en lisant dans ses yeux un sentiment de bienveillance fait pour consoler de n'avoir pas de droits aux honneurs.

Louis XV fut enchanté de la jeune dauphine; il n'était question que de ses grâces, de sa vivacité et de la justesse de ses reparties. Elle obtint encore plus de succès auprès de la famille royale, lorsqu'on la vit dépouillée de tout l'éclat des diamans dont elle avait été ornée pendant les premiers jours de son mariage. Vêtue d'une légère robe de gaze ou de taffetas, on la comparait à la Vénus de Médicis, à l'Atalante des jardins de Marly. Les poëtes célébrèrent ses charmes, les peintres voulurent rendre ses traits. Il y en eut un dont l'idée ingénieuse fut récompensée par Louis XV. Il avait imaginé de placer

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