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où Madame fut en åge de venir chez son auguste mère qui s'était particulièrement chargée du soin de son éducation.

Le roi commençait à se plaire dans la société de la 'reine, quoiqu'il n'eût point encore usé des droits d'époux. La reine ne cessait de parler des vertus qu'elle admirait en Louis XVI, et s'attribuait, avec satisfaction, les moindres changemens favorables dans ses manières extérieures; peut-être laissait-elle voir, avec trop d'abandon, la joie qu'elle en ressentait et la part qu'elle croyait y avoir.

Un jour, Louis XVI avait salué ses dames avec plus de bienveillance et de grâces que de coutume; la reine s'écria : « Convenez, mesdames, que, pour » un enfant mal élevé, le roi vient de vous saluer » avec de très-bonnes manières. >>

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La reine haïssait M. de La Vauguyon ; c'était lui seul qu'elle accusait des choses qui l'affligeaient dans les habitudes et même dans les sentimens du roi,

Une ancienne première femme de la reine Marie Leckzinska avait continué les fonctions de sa charge auprès de la jeune reine. C'était une de ces vieilles personnes qui ont le bonheur de dérouler le fil entier de leur vie au service des rois sans savoir rien de ce qui se passe dans les cours. Elle était très-dévote : l'abbé Grisel, ex-jésuite, la dirigeait. Riche par ses économies et par un revenu de cinquante mille livres long-temps possédé, elle avait une très-bonne table, et son appartement, au Grand-Commun, réunissait souvent les personnages les plus distingués

qui tenaient encore à l'ordre des jésuites. Le duc de La Vauguyon avait des relations avec elle; leurs chaises, à l'église des Récollets, étaient placées près l'une de l'autre ; ils chantaient ensemble à la grand'messe et à vêpres le Gloria in excelsis et le Magnificat; et la pieuse fille, ne voyant en lui que l'élu de Dieu, était fort loin de croire le duc ennemi déclaré d'une princesse qu'elle servait et révérait. Le jour de sa mort, elle accourut toute en larmes raconter à la reine les actes de piété, les actes d'humanité et de repentir des derniers instans du duc de La Vauguyon. Il avait, disait-elle, fait venir ses gens pour leur demander pardon.... « De quoi? reprit la reine avec vivacité : il a placé et enrichi tous ses valets; c'était au roi et à ses frères que le saint homme que vous pleurez devait demander pardon, pour avoir si peu soigné l'éducation des princes dont dépendent les destinées et le bonheur de vingt-cinq millions d'hommes. Heureusement, ajouta-t-elle, que, jeunes encore, le roi et ses frères n'ont point cessé de travailler à réparer les torts de leur gouverneur1.

'On lit dans Grimm le passage suivant, t. II, p. 199:

<< M. le duc de La Vauguyon étant allé, ces jours passés, rendre compte au tribunal de la justice éternelle de la manière dont il s'est acquitté du devoir effrayant et terrible d'élever un dauphin de France, et recevoir le châtiment de la plus criminelle des entreprises, si elle ne s'est pas accomplie au vœu et aux acclamations de toute la nation : on a vu, à cette occasion, un mouvement de vanité bien étrange, et qui a occupé la cour et la ville; c'est le billet d'enterrement qu'on a envoyé à

Les années et la confiance qu'une position nouvelle donnait au roi et aux princes ses frères, depuis la mort de Louis XV, avaient amené le développement de leurs caractères. Je vais essayer de tracer leurs portraits.

Louis XVI avait des traits assez nobles, empreints d'une teinte mélancolique; sa démarche était lourde

toutes les portes, suivant l'usage. Ce billet est devenu, par sa singularité, un effet de bibliothèque. Chacun a voulu le conserver; et, à force d'être recherché, il est devenu rare, malgré la profusion avec laquelle il avait été distribué. Je vais le transcrire ici en son entier, dans l'espérance qu'il pourra entraîner ces feuilles avec lui vers la postérité.

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« Vous êtes prié d'assister aux convoi, service et enterre» ment de monseigneur Antoine-Paul-Jacques de Quélen, chef » des noms et armes des anciens seigneurs de la châtellenie de Quélen, en Haute-Bretagne, juveigneur des comtes de Por>> hoët, substitué aux noms et armes de Stuer de Caulsade, duc » de La Vauguyon, pair de France, prince de Carency, comte » de Quélen et du Boulay, marquis de Saint-Mégrin, de Cal>> longes et d'Archiac, vicomte de Calvignac, baron des an» ciennes et hautes baronies de Tonneins, Gratteloup, Ville» ton, La Gruère et Picornet, seigneur de Larnagol et >> Talcoimur, vidame, chevalier et avoué de Sarlac, haut baron >> de Guienne, second baron du Quercy, lieutenant général » des armées du roi, chevalier de ses ordres, menin de feu » monseigneur le dauphin, premier gentilhomme de la cham>> bre de monseigneur le dauphin, grand-maître de sa garde» robe, ci-devant gouverneur de sa personne et de celle de monseigneur le comte de Provence, gouverneur de la per>> sonne de monseigneur le comte d'Artois, premier gentil>> homme de sa chambre, grand-maître de sa garde-robe, et

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et sans noblesse; sa personne plus que négligée; ses cheveux, quel que fût le talent de son coiffeur, étaient promptement en désordre, par le peu de soin qu'il mettait à sa tenue. Son organe, sans être dur, n'avait rien d'agréable; s'il s'animait en parlant, il lui arrivait souvent de passer du médium de sa: voix à des sons aigus. Son précepteur, l'abbé de Ra

» surintendant de sa maison; qui se feront jeudi 6 février » 1772, à dix heures du matin, en l'église royale et paroissiale » de Notre-Dame de Versailles où son corps sera inhumé. » De Profundis. »

» On voit que ce billet est l'ouvrage d'une composition réfléchie, combinée, profonde et laborieuse. Celui qui en est l'auteur, ajoute la Correspondance de Grimm, mérite bien que l'académie des inscriptions et belles-lettres lui confère, par acclamation, la première place vacante, et l'enregistre parmi ses membres comme duc, pair, prince, marquis, comte, vicomte, juveigneur, vidame, chevalier, avoué, haut baron, second baron et troisième baron. Il serait à propos aussi de fonder et d'ériger une chaire dont le professeur ne ferait autre chose toute l'année que d'expliquer à la jeunesse le billet d'enterrement de M. le duc de La Vauguyon; sans quoi il est à craindre que l'érudition nécessaire pour le bien entendre ne se perde insensiblement, et que ce billet ne devienne avec le temps le désespoir des critiques.

» Le terme de juveigneur, par exemple, est peu connu. On appelle ainsi un cadet apanagé; M. le duc d'Orléans est juveigneur de la maison de France. Ce mot est peut-être une corruption du mot junior, dont les Césars du Bas-Empire appelaient ceux qu'ils associaient à l'empire. Sans le billet d'enterrement de M. de La Vauguyon, le terme de juveigneur allait se perdre dans l'obscurité des temps. >> (Note de l'édit.)

donvilliers', savant, aimable et doux, lui avait donné, ainsi qu'à Monsieur, le goût de l'étude. Le roi avait continué à s'instruire; il savait parfaitement la langue anglaise. Plusieurs fois je l'ai entendu traduire les passages les plus difficiles du poëme de Milton : il était géographe habile, et se plaisait à tracer et à laver des cartes; il savait parfaitement l'histoire, mais peut-être n'en avait-il pas assez étudié l'esprit. Il appréciait les beautés dramatiques et en portait de fort bons jugemens. Un jour, à Choisy, plusieurs dames se récrièrent sur ce que les comédiens français devaient y représenter une pièce de Molière; le roi leur demanda pourquoi elles désapprouvaient ce choix. Une d'elles répondit qu'il fallait convenir que Molière était d'un très-mauvais goût; le roi répondit que l'on pouvait trouver dans Molière beaucoup de choses de mauvais ton, mais qu'il lui paraissait difficile d'en rencontrer qui fussent de mauvais goût.

Ce prince unissait à tant d'instruction toutes les qualités du meilleur époux, du plus tendre père, du maître le plus indulgent, et, quand on songe à tant de vertus, les années qui se sont écoulées depuis la barbarie des factieux et le malheur des Français, sont insuffisantes pour se persuader que le crime soit venu à l'accomplissement du forfait le plus inouï. Le roi montrait malheureusement un goût trop les arts mécaniques. La maçonnerie, la ser

vif

pour

L'un des quarante de l'Académie française.

par

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