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l'ennemi. C'est une confusion, un désordré dont chacun profite pour bach chaouch ont été tués. Le caïd Arbi a été grièvement blessé. Ces s'enrichir aux dépens de son voisin.

Nous marchons pendant cinq ou six heures, et nous allons établir nos pénates sur le bord du Chélif, près de Kont'ra. Le pays des Bni Zegzeg nous reste dans le sud, le Kont'ra à l'ouest.

Comme le khrodja a très peu de troupes avec lui, il fait placer notre tente près de la sienne, et le khrasnadar (comptable) établit ses magasins à deux pas de nous. Cet employé est aussi un Algérien émigré.

La monnaie française n'ayant point cours ici, il nous change des pièces de cinq francs contre des mouhhamadines; c'est le nom de la secca (monnaie) d'Abd-el-Kader. Sa valeur conventionnelle est au moins six fois plus élevée que réelle. Par extension, on appelle mouhhamadines les indigènes qui sont sous la domination d'Abd-el-Kader, et souardas (sous) ceux qui vivent sous la nôtre.

Le 4, voici trois jours que nous sommes arrivés et nous n'avons aucune nouvelle d'Abd-el-Kader : les uns le croient à Tekedempt, d'autres le disent à Aïn-Fadda. On parle de nous envoyer vers lui, ce dont nous serions enchantés, car l'inaction dans laquelle nous sommes est insupportable.

Le 5, nous apprenons qu'on s'était battu au col de Mouzaïa. Les Arabes ont éprouvé des pertes. On nous fait bonne mine. Abd-el-Kader ne nous fait rien dire. A trois heures, on exécute plusieurs criminels. On est expéditif ici: arrêtés ce matin, condamnés sans être entendus après la prière du dohor; ils ont cessé de vivre à celle de l'aassar.

Un soldat du bataillon d'Afrique arrive de Miliana. C'est un déserteur. On en compte deux ou trois cents chez les Arabes. On lui donne une gratification et on lui demande s'il veut se faire musulman ou rester chrétien. Notre homme embrasse la religion de Mahomet, et répète entre les mains d'un iman, la formule : : « Il n'y a pas de Dieu, si ce n'est Dieu, Mahomet est son prophète. » Comme il ne connaît aucun métier, il est incorporé dans la compagnie d'Heuldjy (Européens) du bataillon du khalifa. S'il avait exercé une profession industrielle, on l'aurait dirigé sur une des fabriques de l'intérieur.

Un grand marché doit se tenir demain auprès du camp. Déjà aujourd'hui plus de mille Arabes arrivent de tous côtés pour y assister. Ils ont presque tous des bestiaux. Ce voisinage nous donne de grandes inquiétudes. Nous craignons que pendant la nuit on ne se venge sur nous des malheurs de la guerre. Le khrodja partage, à ce qu'il paraît, nos appréhensions, car je vois à l'entrée de la nuit deux factionnaires prendre place, par son ordre, près de notre tente. Cette précaution ne nous paraissant pas suffisante, ces messieurs et moi prenons des mesures pour que l'un de nous ne reste point endormi.

Pendant mon quart, je vais voir nos factionnaires. Ils sont étendus à terre et ont posé leurs fusils sur leurs burnos afin que ce vêtement ne soit pas enlevé par le vent. Ils ronflent tous les deux. Heureusement la nuit se passe tranquillement.

Le 6, le marché a lieu. Il est très animé. Trois ou quatre cents Arabes environ y assistent. Nous pensions pouvoir nous y rendre avec quelques chaouches pour chasser l'ennui qui commence à nous atteindre; mais on nous défend de sortir de notre tente, sous le prétexte que notre présence pourrait occasionner du trouble. On a beaucoup moins d'égards pour nous. Notre interprète devient d'une insolence qui nous donne à penser.

Je recueille la mercuriale du marché. La voici :

Blé, 45 fr. le saâ (décalitre); orge, 37 fr. id.; bœuf, 12 fr.; mouton, 1 fr. 20 c.; chevaux, 200 fr.; chameaux, 120 fr.; tabac, 20 fr. le kilog.; café, 12 fr.; fusil de munition, 25 fr.; poudre, 5 fr. 40 c. le kilog.

Les objets manufacturés ont en général une valeur quinze ou vingt fois plus forte qu'à Alger. Les ventes se font au comptant, et souvent par voie d'échange. Les fusils et la poudre sont de fabrique anglaise. Les bestiaux, quoiqu'à un vil prix, n'ont pas d'écoulement.

Le 7 au matin, nous apprenons le combat de Aïn-Zébaudji-el-Azarer. Les Arabes ont fait de grandes pertes. L'aga du bey Barkani et son

événemens ne nous mettent pas en odeur de sainteté dans le camp, et nous désirons plus que jamais voir cesser le provisoire dans lequel on nous tient.

Vers le midi, un nuage qui s'élève dans l'ouest nous annonce le sullan, c'est le titre que prend l'émir. Il est accompagné de deux ou trois mille cavaliers, et vient camper à deux ou trois portées de fusil de

nous.

On nous fait savoir qu'il daignera nous admettre devant son auguste personne après la prière de l'aassar. Au moment indiqué pour l'entrevue, contre ordre. Ce n'est que demain, à neuf heures, que nous serons reçus; mais on nous fait demander les lettres dont nous sommes porteurs. A cinq heures, Miloud-ben-Arach, aga, entre dans notre tente et nous dit que son souverain a pris connaissance de nos dépêches, qu'il ne s'occupera pas de notre affaire, et qu'il donne plein pouvoir à son khalifa de la traiter. « Vous pourrez donc partir d'ici quand vous voudrez, ajoutet-il d'un ton impertinent et en termes peu parlementaires. » Ce personnage que son voyage en France aurait dû rendre moins grossier, se lève alors sans nous saluer et nous laisse seuls. Nous nous consolons de ses mauvais procédés en songeant que nous aurons affaire au khalifa qui a toujours été très poli avec nous.

Le 8, nous faisons seller nos chevaux de bon matin; mais c'est en vain que nous attendons le guide qui doit nous accompagner, on nous apprend que notre départ est remis à demain. Ce retard nous contrarie d'autant plus que, depuis huit jours, c'est au lendemain qu'on nous renvoie, et nous n'avons encore rien fait.

A quatre heures, Miloud-ben-Harach, l'ex-ambassadeur d'Abd-el-Kader près le roi des Français, nous fait dire qu'il est dans la tente du Khraznader, et nous invite à nous y rendre.

Nous nous dirigeons donc vers lui, et nous prenons place sur des caisses qui doivent nous servir de siéges. Ben-Harack qui s'est accroupi dans l'intérieur de la tente, quoique nous soyons à l'extérieur, nous parle des hasards de la guerre, etc., etc. C'est maladroit de sa part, car, sous cè rapport, les Arabes sont plus souvent malheureux que nous. Je le lui fais sentir.

Le ton de Ben-Harack est pourtant moins impertinent qu'hier. Ils sent peut-être que des paroles ne sauraient augmenter l'offense. Ils nous congédie en nous assurant que demain nous pourrons nous rendre près de Mohamed-ben Allah.

Le 9, à la pointe du jour, nous quittons le Kontra et prenons la direction de Médéah. Le khalifa doit être avec son corps d'armée dans les environs de cette ville. Nous sommes bien aise de partir, car nos hôtes, depuis plusieurs jours, ne montrent pas beaucoup de bonne volonté à notre égard, et notre ordinaire, si copieux, si choisi d'abord, s'est tellement modifié par suite de leur mauvaise humeur, que nous avons à peine de quoi manger ces jours-ci.

Nous traversons plusieurs petites tribus auxquelles la sortie de nos troupes a enlevé ses guerriers. Nous y voyons peu d'hommes; encore moins de chevaux; les champs sont presque sans culture.

A dix heures, nous apercevons devant nous, dans l'est, une grande quantité de cavaliers et, plus à gauche, un bataillon de fantassins. C'est l'avant-garde de la colonne du khalifa. Cette rencontre nous fait beaucoup de plaisir; car nous avons hâte d'accomplir la mission dont nous sommes chargés. Comme nous pressons le pas, et que, de leur côté, les Arabes marchent bon train, nous ne tardons pas à nous joindre. L'armée s'arrête alors et le khalifa nous fait dire qu'il va nous entretenir.

Tout à coup ses cavaliers qui restaient immobiles prennent le galop dans diverses directions. Ils animent leurs chevaux par de grands cris, reviennent sur leurs pas, repartent de nouveau comme l'éclair, font en l'air de nombreuses décharges de mousqueterie, et simulent des combats à l'arme blanche. Les cris de guerre qu'ils poussent, les houras des chefs, le cliquetiş des armes, les détonations d'armes à feu, les

hennissemens des chevaux se mêlent, se croisent, et font un bruit infernal.

On appelle en Afrique fantasia cette espèce de petite guerre, c'est un des plus grands plaisirs des Arabes. Le khalifa a ordonné celle-ci, qui est la plus belle que j'ai vue, pour nous faire honneur.

Quoique les Arabes viennent de combattre pendant trois ou quatre jours, je remarque avec surprise qu'ils ont des paquets entiers de cartouches.

Parmi les trois ou quatre mille cavaliers qui prennent part à la fantasia, il se trouve de mauvais tireurs. Plusieurs balles nous sifflent aux oreilles, et une vient s'enfoncer en terre à dix pas de nous. L'aga fait alors immédiatement cesser le feu qui aurait pu devenir funeste pour nous si un maladroit ou un mal intentionné avait persisté à nous prendre pour but. La fantasia a duré un quart d'heure à peu près; huit à dix mille cartouches ont été brûlées. Je croyais nos ennemis plus avares de poudre.

Le khalifa est descendu de cheval, et s'est accroup isur le gazon dans le lit du Chélif. Nous allons prendre place vis-à-vis de lui, et enfin nous pouvons parler de l'affaire qui nous amène.

Les troupes suivent au dessus de nous le cours de la rivière. Une vingtaine de nègres de la garde d'Abd-el-Kader restent seuls avec

neus.

Je me souviendrai toute ma vie de l'impression que j'éprouve en ce moment. Tout est si grandiose ici!... L'immense plaine du Chélif qui nous sert de tapis... Les deux Atlas où son horizon va se briser... et sur nos têtes mille gros nuages pleins de tempêtes...

L'orage éclate sur nous. Il coupe court aux discussions futiles, hésitations auxquelles donne toujours lieu le traité de la moindre importance avec les Arabes. J'en suis heureux pour ma part, car ces messieurs ne connaissent pas très bien l'arabe, je suis le principal orateur. En moins de vingt minutes nous avons terminé, et un khrodja, au dessus duquel trois Arabes étendent leur burnou pour garantir les papiers de la pluie qui tombe par torrens, dresse en double expédition un acte de nos conventions.

Nous faisons alors nos adieux au khalifa, non sans le remercier des bons procédés qu'il n'a pas cessé d'avoir pour nous. Nous nous remettons en route, et cette fois, c'est pour retourner à Alger. Nous rencontrons en grand nombre des bandes de cavaliers des tribus. Tous viennent de se battre ces jours-ci contre nos troupes.

Comme nos chevaux sont d'un bon pied, malgré la pluie, nous arrivons à minuit chez le caïd des Hadjoutes; nous ne nous sommes pas arrêtés un sel instant, et ni nous, ni nos chevaux n'ont pris de nourriture depuis hier. On nous fait assez bon accueil.

Le 11, nous continuâmes notre marche. Avant de partir, le bach chraoub nous offre du tabac et nous présente la tabatière volée. C'est lui qui est le coupable. Il nous explique qu'ayant été chargé de distribuer des coups de bâton aux autres larrons, il s'était donné garde de s'en réserver. Aujourd'hui il y a prescription, aussi remet-il gravement la tabatière dans sa poche.

A deux heures nous arrivons à portée de canon de Bouffarick où notre guide nous laisse parce qu'il craint les boulets. Nous entrons peu après dans le ca mp et de là repartons pour Alger, où nous arrivons à onze heures du soir.

CHARLES DE TOUSTAIN. (Messager.)

RÉCEPTION DE M. VICTOR HUGO A L'ACADÉMIE

FRANÇAISE.

Chacun jette à l'Académie sa pierre ou son grain de sable; les murs de l'Institut sont plus criblés de sarcasmes qu'ils ne l'ont été de balles en 1830; ne fût-ce que par esprit de contradiction, je veux parler de

l'illustre assemblée sans aiguiser ma plume, et en lui faisant une profonde révérence.

L'Institut est le palais de l'intelligence, et, à ce titre, il a droit à quelque respect. Nous l'avons vu souvent ouvrir sa porte à deux battans pour laisser passer le talent; quelques uns prétendent, il est vrai, qu'il a aussi une petite porte secrète pour faire entrer la médiocrité, mais, hélas! n'en est-il pas de même partout? la chambre des députés et la chambre des pairs n'ont-elles pas aussi leur escalier dérobé? l'Académie, pour rester digne de sa création, doit-être une sorte d'assemblée représentative; il faut que la littérature envoie là ses députés pour défendre tous ses priviléges, pour représenter toutes ses gloires. Tous ses préférés divers doivent y trouver place; les conservateurs, et les fondateurs, ceux qui veulent maintenir l'architecture grecque des vieux monumens de la pensée, ceux qui veulent bâtir de nouveaux édifices, et le génie doit y entrer royalement qu'il s'appelle Corneille ou Victor Hugo.

Au lieu de partager cette conviction, l'Académie a répondu à l'appel du poëte et du public par des retards incompréhensibles. Elle a longtemps méconnu la haute mission dont elle s'est chargée: ce n'est pas elle qui fait la gloire, mais elle doit la constater: quand le public avait moulé le piédestal, il était beau d'être appelé à le couler en bronze. Elle a mieux aimé céder a de mesquines intrigues, et, lorsque M. Victor Hugo frappait à sa porte, au lieu de la lui ouvrir avec empressement, elle tirait lentement les verroux.

Qui est-là? disait-elle.

- C'est le grand poète, répondait la foule; c'est l'architecte et le roi d'une nouvelle poésie. Il admire comme vous les modèles antiques, mais il n'imite pas, parce qu'il sait créer; loin de relâcher les chaînes poétitiques, comme certaines gens l'en accusent, il les tend plus fortement, il brise les liens des rhéteurs, il resserre les liens du goût. C'est le penseur profond, c'est l'écrivain rigoureux, aux études sévères, qui respecte toujours la gammaire et la raison, mais qui sait les parer de vêtemens couleur du soleil. C'est le peintre et le sculpteur de la pensée, qui taille à ses idées une forme nette et svelte, et qui écrit avec un pin

ceau.

L'Académie n'ouvrait pas; le poète et la foule frappaient une seconde fois :

-

Qui est-là? disait l'Académie.

Ce sont les Feuilles d'Automne, les Voix intérieures, les Rayons et les Ombres; ce sont toutes les hautes pensées du poète avec leurs draperies d'écarlate, tous ses rêves orageux, toutes ses douleurs poétiques, toutes ses larmes cristallisées.

Alors l'Académie relut ces recueils éclatans, et, quand elle eut bien visé le brillant passeport du poète, elle le laissa franchir la frontière. Le 3 juin était le jour fixé pour sa réception. La séance ne devait commencer qu'à deux heures, mais la partie matinale du public arrivait à onze heures la patience dans l'ame et le journal du jour dans la poche on s'asseyait, on lisait, et l'on attendait. A midi les bancs étaient déjà remplis ; une foule de femmes les garnissait : c'était à épuiser toutes les comparaisons bocagères et fleuries.

A une heure, enfin, il eût fallu être impalpable ou aérien pour se glisser dans la salle. Les bancs académiques (écrivez fauteuils en style noble) restaient encore vides; bientôt deux ou trois vieillards vinrent les occuper. A la vue de leur visage flétri et de leur taille voûtée la foule partit d'un cruel éclat de rire; nous le signalons comme une lâcheté; le respect pour la vieillesse doit être la religion de ceux même qui n'en ont pas. Savait-on d'ailleurs si c'étaient l'âge, les larmes ou la pensée qui avaient creusé leurs rides? Quelques instans après, les illustrations de l'Académie prirent place en face d'un essaim de femmes plus ou moins jolies, et les fleurs de beauté s'épanouirent vis-à-vis des fleurs de rhétorique. Parmi les Académiciens célèbres on remarquait MM. Lebrun, Villemain, Soumet, Charles Nodier, Pongerville, Tissot, Dupaty, Dupin, Thiers et Guizot.

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A deux heures enfin M. Victor Hugo parut, escorté de tout son beau cortége de poésies: les Feuilles d'Automne volaient devant lui', et les Orientales l'illuminaient de leurs rayons. La foule salua le poète d'une salve d'applaudissemens; sa femme, toute émue, se plaça en face de lui, et l'on se recueillit pour l'écouter.

:

La tâche de M. Victor Hugo était certes fort délicate; lui, novateur, il devait juger un homme que l'on couronnait du même titre, un homme d'un mérite incontestable, mais que l'on disait son frère en audace et qui n'était pas même son arrière-petit-cousin; poète ciseleur et brillant, il était chargé de l'épitaphe académique qui ne peut inspirer que des lieux communs et des phrases filandreuses; académicien, il devait parler avec respect de l'Académie, imposante d'ailleurs par son but et par ses illustrations; chef d'école, il devait en même temps rester fidèle à sa mission; après avoir conduit toute une armée d'intelligences à la conquête d'une nouvelle poésie, il ne pouvait pas l'abandonner l'art lui aurait demandé compte d'un seul pas rétrograde. Placé entre toutes ces difficultés, il les a surmontées (1). Il a dessiné rapidement ses convictions littéraires, mais avec une mesure et une convenance parfaites. En abordant l'Académie, il s'est montré plein d'égards pour la maîtresse de la maison, et l'a saluée de deux ou trois phrases remplies de politesse : il a commencé par immoler sa gloire à celles qui l'entouraient, et s'est dit troublé par cet auditoire si imposant et si charmanl; à ces mots, on vit poindre un soleil levant de gracieux sourires : l'auditoire imposant rajusta son amour-propre, et l'auditoire charmant rajusta ses dentelles.

Il restait à éviter les larmes officielles sur la tombe de M. Lemercier; le poète ne pouvait accepter le rôle modeste et dolent de panégyriste; il - s'est contenté de donner un coup d'œil rapide, mais juste, au beau talent de son prédécesseur, puis il a cherché des généralités dans sa vie : il a tourné le dos à la partie littéraire, et fait face à la politique. Alors son discours s'est trouvé divisé par grands tableaux: la vie publique de M. Lemercier embrasse toutes les scènes de la Révolution; il a vu tour à tour la Convention, qui se peint à nos yeux éclairée d'un reflet rouge, - couleur de pourpre disent les uns, couleur de sang disent les autres; le Directoire renversant l'échafaud pour dresser la table de l'orgie; les vautours devenus papillons, et adorant la belle tête de Mme Tallien après avoir coupé la tête céleste de Mme de Lamballe; l'Empire et Napoléon, les vieux grognards détrônant presque les Chloris, et la Révolution passant successivement du club au boudoir, du boudoir au bivouac.

Ces grands tableaux fournirent au poète, à l'artiste de magnifiques images. On retrouve dans ce discours sa manière constante quoique sous un aspect plus austère : les alliances de mots imprévues et brillantes, la phrase concise, nettement découpée, éclairée tout à coup d'une expression éblouissante, colorée d'un brusque contraste; la pensée immense enchâssée dans quelques mots brefs; la fermeté, l'énergie et la puis

sance.

M. de Salvandy, chargé de répondre à M. Victor Hugo, s'était muni de ses mots les plus spirituels, de ses remarques les plus incisives, de ses aperçus les plus ingénieux; mais il s'est plu à réfuter tous les raisonnemens du poète, politiques ou littéraires; son discours qui peut passer pour un fort bon modèle de style et pour un chef-d'œuvre d'esprit de contradiction, ne nous a pas paru de nature à mettre son impartialité au dessus de tout soupçon; nous lui reprocherons surtout d'avoir indiqué plutôt que jugé les Feuilles d'Automne, les Orientales, les Chants du Crépuscule, les Voix Intérieures, tous ces livres rayonnans que nous avons tous dans notre mémoire, dans notre cœur, dans notre tête. Pourquoi les sacrifier ainsi au premier volume des Odes, au premier ouvrage de l'auteur, rempli sans doute de hautes inspirations, mais d'une forme moins arrêtée, d'une couleur moins riche que ceux qui l'ont suivi ?

Au résumé, cette séance sera un beau souvenir pour M. Victor Hugo,

(1) On ne doit point perdre de vue que nous ne pouvons point apprécier le discours de M. Victor Hugo sous le rapport politique. (Note du Directeur.)

Le poète doit être heureux d'avoir conquis l'Académie, l'Académie doit être fière du poète; le but qu'elle se propose, et qu'elle vient de remplir, est d'appeler à elle les génies lumineux: or, notre siècle comme tout autre, donne rarement des éblouissemens, et dans les lumières de la littérature il y a plus de crépuscule et de clair de lune que de soleil. ANAÏS SÉGALAS.

THÉATRES.

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ACADÉMIE ROYALE DE MUSIQUE. Le Freyschutz, paroles de M. ÉMILIEN PACCINI, musique de WEBER, récitatif de M. H. BERLIOZ. Plus d'une fois, nous avons eu occasion de dire que les succès théâtrals dépendent en général beaucoup plus de l'acteur que de l'auteur, de la lettre que de l'esprit, de la forme que du fond. On a repris, il y a trois ans, le Don Juan de Mozart dont les rôles avaient été confiés à des sujets du second ordre, et la pièce n'a pas fait d'argent, tandis que la Favorite, chef-d'œuvre de médiocrité, attire encore la foule, et que M. Donizetti se glorifie sans doute d'un succès qui appartient à Duprez, à Barroihlet, à Mme Stolz et à Mme Carlotta Grisi, de qui l'opéra en question a absorbé le monopole.

On vient de fournir un nouvel exemple à l'appui de nos assertions, en ajustant pour notre grande scène lyrique, le chef-d'œuvre de Weber. Si ce maître illustre arrivait au monde aujourd'hui, parfaitement inconnu, et qu'il fondât sa renommée sur le Freyschulz tel qu'il vient d'être joué, Weber essuyerait une chute. Il a fallu tout le prestige de ce grand nom pour maintenir le public; mais on avait rendu cette musique tellement méconnaissable, on l'a chantée en si grande confusion, avec une mesure si fausse, que les motifs mêmes ne se ressemblaient plus.

Cet ouvrage est devenu la proie des doublures, et c'est pour elles qu'on l'a monté. Parlons d'abord du livret. Pour rendre compatible avec le goût français cette lourde et indigeste composition allemande qu'on nomme Der Freyschutz, il fallait un auteur adroit, intelligent, bien initié aux exigences du théâtre national: or, ce travail important, a été confié à unpoète qui peut savoir l'allemand, mais qui l'ignore à coup sûr, s'il le sait comme le français ; il fallait un homme habile, on a fait choix de M. Émilien Paccini!

Ce monsieur a tout simplement traduit et rimé le tout en strophes gluantes auxquelles M. Berlioz, homme d'un vrai, d'un profond et admirable talent, n'a pu accoler qu'un récitatif assez lugubre. On croirait toujours qu'il chante son malheur d'être obligé à empourprer d'harmonie les hémistiches de son collaborateur. Un écrivain distingué à qui un ministre proposait une traduction, refusa en disant: - Tandis qu'on traduit les autres, Monseigneur, on n'est pas traduit.

Comment M. Berlioz n'a-t-il pas opposé cette fin de non recevoir, qui eût été si convenable dans sa bouche ? Ce qu'il nous faut de M. Berlioz, c'est sa propre musique et non des vermiculages ou des badigeons appli qués sur des monumens qui ne sont pas les siens.

L'opéra de Weber était bien placé à l'Opéra-Comique; les morceaux en sont vifs, scintillans, originaux, mais en général la mélodie est courte et le récitatif qu'on y ajoute, hors de proportion aves le sujet mélodique, le noie et le fait paraître plus bref encore. Puis l'ouvrage est mal distribué. Ainsi, au premier acte, après le second chœur qui ferait un final magnifique, Bouché vient glacer la scène avec son grand air qu'il chante horriblement. Le deuxième acte est tel ou à peu près, que M. Castil-Blaze nous l'avait autrefois offert à l'Odéon. Mais la scène du carrefour de la forêt est d'une longueur, d'un ennui interminables. Le public de l'Odéon n'avait que trois balles à recevoir, on en décoche sept sur celui de l'Opéra; sept balles, toutes enchantées et qui endorment. Sept balles, et M. Bouché, qui est bien l'ouvrier le plus indolent que je

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Le troisième acte est trouble, mal expliqué, et les Allemands y ont joint une sorte d'appendice moral et ridicule qu'on a conservé. L'action dénouée, quand il n'y a plus qu'à jeter deux ou trois accords, voici qu'un prince tartare avec une robe d'or, un cafetan, une barbe, etc... (notez que c'est un baronnet Bohémien du siècle dernier), survient et veut punir Max, l'amant d'Agathe, de sa complicité dans l'affaire des balles enchantées. Chacun tâche de fléchir ce nabab, mais en vain, et voilà toute une affaire engagée. Arrive alors un ermite qu'on prend pour arbitre. L'ermite pérore, et finit, comme tous les ermites, par pardonner aux coupables et par les marier; après quoi le chœur en dit son avis, le prince aussi, et l'on s'embrasse.

Tous les rôles ont été dénaturés et chantés d'une honteuse manière, sauf ceux de Mme Stolz et de Mlle Nau. La première a fait d'admirables efforts pour conjurer les périls de cette journée, mais c'était l'impossible. Ici comme partout, cette admirable actrice a réuni la pureté du son et de la méthode, à la profondeur de l'expression et du sentiment. Rien d'admirable comme la manière dont elle a dit l'adagio du deuxième acte. Bouché avait l'air d'un commissionnaire en goguette, et il a chanté comme tel. Marié a été exécrable: on ne l'eût pas toléré à Carpentras. Massol, par extraordinaire, a chanté faux ses couplets du premier acte, terminés par les éclats de rire des choristes, passage bien rétabli et fort bien exécuté par eux. Ferdinand Prévot a été rrrridicule, comme d'habitude. Les divertissemens ont paru mal nommés.

Cette traduction nous a donnée une haute idée de l'esprit et de l'adresse de M. Castil-Blaze, et n'a rien changé à notre opinion sur le mérite de M. Émilien Paccini. Une version nouvelle, à moins d'être sublime, n'aurait au surplus jamais charmé le public, habitué à fredonner cette musique sur d'autres paroles, et qui se trouve ainsi fort dépaysé. Le nom des personnages a été changé de même, modification désagréable. Le héros de la pièce, autrefois Tony, a repris son nom gothique de Max. Autant vaudrait, pour ce qui concerne la sonorité, donner pour nom de baptême le bruit d'un coup de bâton sur un sac de plâtre, que ce monosyllabe de Max, aboiement sourd et étouffé.

Nous avons vivement regretté que l'administration, dans ses efforts louables et consciencieux pour plaire au public, ait, en cette circonstance, déféré aux insinuations de ceux qui, sous couleur de religion de l'art, la poussent à de telles entreprises. Espérons que le ballet de Giselle, qu'on monte avec grand soin et dont on dit le plus grand bien, dédommagera l'Académie royale de cet accident, et que l'expérience conduira la direction, en ce qui regarde les doublures, dans la voie d'une salutaire défiance. F. W.

-

GYMNASE. Adrienne, ou le Théâtre et la Famille, vaudeville en un acte, par MM. DESVERGERS et DELATOUR. Nous croyons faire acte d'indulgence en nous dispensant d'une analyse exacte de ce malheureux vaudeville, qui a succombé sous les sifflets du parterre. Autant qu'il nous en souvient, il s'agissait dans cette rapsodie, que nous nous sommes empressé de chasser de notre mémoire, d'une jeune actrice, modèle d'ordre et de vertu, qui pose en grecque devant un petit peintre, et qui donne des leçons de morale à toute sa famille, Par ses soins, l'honneur de ses parens reste intact, et le sien est remis en garde à celui du petit peintre qui, en échange, lui donne son cccur et sa main.

AMBIGU.-Fabio le novice, drame en cinq actes, par MM. |CHARLES LAFONT et NOEL PARFAIT.Pendant la domination des Espagnols à Milan, la famille italienne Manzoni s'est vouée à l'affranchissement de la patrie. Les deux comtes de ce nom échouent dans une nouvelle tentative réprimée par le gouverneur espagnol; l'un d'eux périt, et le survivant jure alors de consacrer sa vie à la vengeance de son frère, ou de confier cette sainte mission à son fils encore fort jeune; mais sa femme, qui est la fille même du gouverneur, et qui ne peut supporter la pensée de voir son fils porter un jour les armes contre sa famille, conduit cet enfant dans un couvent et l'y fait élever secrètement sous le nom de Fabio.

Le jeune novice, dans les veines duquel bouillonne le sang des Manzoni, s'ennuie de la règle des Dominicains, et s'échappe du couvent. Ce sont ses aventures, un peu hasardées, qui font l'intrigue principale de la pièce. Une conspiration italienne, jetée au milieu de cette action, et dans laquelle Fabio se trouve mêlé malgré lui, est au moment de détruire toutes les espérances de sa mère; il est arrêté comme conspirateur et condamné à mort. La comtesse Manzoni apprend cette nouvelle; elle sait que rien ne peut arracher son fils à ce funeste sort, rien qu'un horrible sacrifice dont l'amour maternel peut seul inspirer la pensée. En effet, le comte Manzoni est poursuivi pour cette même conspiration, dont il est le chef, et le gouverneur a juré de donner un blanc-seing à celui qui lui livrerait la retraite du noble italien. La comtesse seule et un hardi conspirateur la connaissent, et, pour sauver son fils, la mère de Fabio livre son mari. Par bonheur, l'échafaud dressé pour le comte est renversé par la mort de Philippe II, roi d'Espagne; les tyrans de l'Italie sont chassés, et Fabio retrouve sa famille ainsi qu'une jeune fille qu'il aimait.

Ce drame, joué avec talent par Albert, Fabio, Alexandre Mauzin, Policastro, et Mme Martin, comtesse Manzoni, est un succès de plus pour le théâtre de l'Ambigu. D. R.

MODES.

On emploie pour les robes la mousseline, l'organdi, la tarlatane, le barrèges, la gaze de tout genre.

Les chapeaux se font en paille de riz et d'Italie, en crèpe, en dentelle, en tulle, en tarlatane, en paille à jour; une voilette les recouvre en partie.

Les écharpes, qui sont devenues à peu près indispensables aujourd'hui, se font généralement en étoffe semblable à celle de la robe, ou en dentelle, en filet, en tulle à guipure. Nous devons signaler comme une nouveauté les écharpes en mousseline, entourées d'un entre-deux en Malines et bordées d'une Malines légèrement froncée.

Mais ces étoffes si légères, presque vaporeuses, n'obtiennent point une vogue tellement exclusive que l'on ne puisse en employer d'autres qui, par la nature même de la matière première ou par l'effet de la maind'œuvre, présentent une plus grande consistance. Celles-ci, mêlées avec les premères dans la même toilette, peuvent former une agréable opposition; mais cet assemblage exige beaucoup de discernement.

Les écharpes de soie, pour être d'un goût distingué, ont besoin de recevoir une garniture en étoffe semblable ou en dentelle. On commence à leur préférer les mantelets, dont la coupe offre plus de variété. Les corsages des robes de soie doivent être plats et former une pointe peu sensible; les manches sont justes et à coude; elles peuvent être ornées dans le haut, soit de jokeis à pointes ou arrondis, soit de plusieurs rangs de garnitures assorties à celle de la jupe qui, souvent, reçoit elle-même pour tout ornement des plis ou des biais que l'on peut terminer, si on le veut, par des dentelles ou par des effilés. Quelquefois aussi ils sont garnis de ruches ou de pattes découpées de diverses manières et posées en échelle sur le devant de la jupe,

Nous avons vu une garniture nouvelle qui mérite une mention parti

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culière. Au bas d'une robe en poue de soie lilas à reflet blanc, on avait posé cinq biais tout à fait rapprochés. Chacun de ces biais était relevé à des distances régulières, et rattachés par un bouton de nacre. Une Berthe à quatre pointes bordées de biais également relevés par des boutons de nacre formait jockeis sur les manches, et simulait le fichu sur le dos et sur la poitrine.

Les robes d'étoffe claire ont ordinairement le corsage froncé, quelquefois à la Niobé, à la Vierge ou à la gerbe; d'autres fois les corsages sont à fronces arrêtées par de scoulisses. Ce dernier genre convient parfaitement aux enfans. Les manches peuvent former trois ou cinq bouillons ou bien se terminer au coude. Les plis sont le mode de garniture le plus usité pour les jupes. Ils sont souvent surmontés de bouillons ou de broderies, quelquefois ils sont remplacés par des volans.

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10 juin. On lit dans l'Impartial de Besançon :

<< Avant-hier au soir, un habitant du faubourg de Rivotte est mort des suites de la morsure d'une vipère. N'ayant pas voulu employer l'alcali, ainsi qu'on le lui conseillait, pour détruire l'effet du venin, il avait coupé avec une serpe les chairs qui entouraient la blessure. Mais cette opération tardive ou mal faite n'a pas empêché le progrès du poison, et quand le médecin appelé pour donner des soins à ce malheureux est arrivé, il venait d'expirer. »

- Il y avait foule jeudi soir au théâtre Victoria à Londres, car on réprésentait un drame intitulé Simon Lee, qui jouit en ce moment d'une grande vogue. L'héroïne de cette pièce (miss Vincent) est constamment poursuivie par sa mauvaise fortune jusqu'au dénoûment où, selon l'usage, la vertu reçoit sa récompense. Tout à coup pendant l'une des scènes les plus pathétiques, lorsque toutes les femmes pleuraient et que les hommes se sentaient disposés à s'attendrir, un spectateur se leva du milieu de l'orchestre, et d'une voix entrecoupée de sanglots : « Que Dieu me damne, s'écria-t-il, si, tant que je possèderai un schelling, vous manquerez du nécessaire ! Et tirant de sa poche une poignée de monnaie, il la jeta sur la scène aux pieds de la malheureuse héroïne. Cela fait, comme il continuait à gesticuler et assurer miss Vincent de son dévoument, un constable de service vint le prier de sortir. Ce pauvre diable, qui est marin et qui arrivait du Brésil, a comparu le lendemain au bureau de police d'Union-Hall sous l'accusation d'avoir troublé le spectacle. Inutile d'ajouter qu'après avoir entendu ses explications pleines de franchise, le magistrat s'est empressé d'ordonner sa mise en liberté.

- Il a été consommé à Paris, dans le mois de mai dernier, 5,749 bœufs, 1,531 vaches, 5,364 veaux et 32,820 moutons; le commerce a reçu 432,433 kil. de suif fondu.

Il avait été consommé, dans le mois de mai 1840, 5,680 bœufs, 2,258 vaches, 7,374 veaux et 37,458 moutons ; le commerce avait reçu 495,131 kil, de suif fondu.

La consommation a donc diminué dans le mois dernier, comparé au moi de mai 1840, de 727 vaches, 2,010 veaux et 4,638 moutons. Il y a eu une faible augmentation de 89 bœufs; la livraison des suifs a été aussi moindre de 62,598 kil.

La diminution dans la consommation a été, comme on le voit, très considérable; elle forme, en poids de viande, 646,290 demi-kilog.; en argent, en moyenne, une somme de 409,717 fr. 50 c. Chaque marché amène une nouvelle hausse sur le prix des viandes; lundi dernier, elles ont encore augmenté de 5 c. par demi-kilog.

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qui n'avaient pas été décrites encore par les professeurs; puis, au milieu de tout cela, des sujets de toute beauté dans les races connues. Malheureusement dans cette collection les vivans sont moins nombreux que les morts. Presque tous ces beaux animaux, ces oiseaux aux nuances de mille couleurs sont empaillés; mais n'importe, leur arrivée sera saluée par les applaudissemens de tous les amis de la science, de tous les amateurs de l'histoire naturelle, et, dans ces applaudissemens, il y aura une bonne part pour les braves marins, pour les savans, les artistes qui ont été s'exposer à tant de dangers et de fatigues, pour ajouter aux richesses que possède déjà le Jardin des Plantes.

Parmi les curiosités que renferme l'Orangerie pour le moment, il y a une longue suite de têtes moulées. Ce sont celles des naturels des pays que l'Astrolabe a visités. Elles ont été moulées avec leurs protubérances, leurs tatouages, leurs joues saillantes, leur nez aplatis. La crânologie fera sans doute son profit de ces travaux exécutés avec beaucoup de soin et d'intelligence.

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M. l'archevêque de Paris vient d'ordonner qu'à l'avenir les confessionnaux soint construits de manière à ce que le prêtre ne soit point caché aux regards du public. Tous les confessionnaux de Saint-Germainl'Auxerrois viennent d'être disposés de cette manière : les pénitens auront un petit prie-dieu de chaque côté, placé de telle façon que leur figure ne sera point vue, tandis que le confesseur sera exposé à tous les yeux sur la sellette de bois.

13. - On lit dans le Journal d'Indre-et-Loire, du 10 juin :

« Un événement affreux vient d'arriver à la papeterie de Marnay, dirigée par M. Patin. Dimanche dernier, les propriétaires de cet établissement avaient réuni à un banquet les ouvriers et plusieurs habitans de la commune. Pour terminer dignement cette fête, le serrurier mécanicien avait chargé un petit canon, et déjà il se disposait à le faire partir, lors que, par une déplorable imprudence, il introduisit dans la bouche du ca non une broche en fer et se mit à frapper à coups redoublés. Cette compression ayant déterminé l'inflammation de la poudre, le canon éclata; les assistans furent plus ou moins grièvement blessés, et le malheureux serrurier, frappé au cœur par la pointe en fer, tomba mort sur-le-champ. Cette catastrophe a changé la fête de Marnay en une scène de deuil et de désolation. >>

14. - Il n'est bruit dans le monde des coulisses et des foyers. que du produit des droits d'auteur de M. Scribe pendant l'année théâtrale qui vient de s'écouler. D'après des renseignemens que nous avons tout lieu de croire exacts, les droits d'auteur de M. Scribe, tant de Paris que de province, y compris ses primes, ses ventes de manuscrits, ses droits de partition, le produits de ses billets d'auteur, ses pensions littéraires de l'Opéra et ses jetons de l'Académie française, se seraient élevés au chiffre monstre de 182,000 francs; c'est-à-dire que M. Scribe gagne à lui seul le tiers, à peu près de ce que gagnent tous les auteurs dramatiques réunis. On s'expliquera aisément ces prodigieux droits d'auteur, quand on réfléchira que quatre théâtres à Paris, et des premiers, sont presque exclusivement consacrés à jouer les pièces de ce fécond auteur, qui en est à sa trois cent quinzième pièce jouée; et que presque tous les théâtres de province ne composent leur répertoire que des opéras, des opéras-comiques, des comédies et des vaudevilles de M. Scribe. On assure que les droits d'auteur de M. Scribe, depuis sa première pièce les Deux Derviches, jouée au vaudeville, en 1816, jusqu'à sa dernière pièce, l'Ingénue, jouée il y a huit jours, à l'Opéra-Comique, lui ont rapporté deux millions cent douze mille francs.

(Quotidienne.)

BOUCHEIX.

Paris. Imprimerie et lithographie de MAULDE et RENOU, rue Bailleul, 9 el 11, près du Louvre.

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