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ment évité de faire aucune mention des Rapports du Comité de Constitution présentés par M. Mounier. Ces Ouvrages, présentés, le 31 Août, par MM. de Lally-Tolendal et Mounier, et des Mo tifs, lus par ce dernier à la Séance du 4 Septembre, néanmoins tiennent aux plus chers, aux plus graves intérêts de la Nation. On assure que plusieurs Libraires ont même refusé de les mettre en vente. Ce sont autant de raisons de les présenter à l'examen du Public. Voici la substance des Motifs.

Nous avons examiné cette importante question, si les Lois doivent être délibérées dans une seule Chambre, ou si deux Chambres sont absolument nécessaires. Nous avons été convaincus de la nécessité de distinguer les moyens propres à créer une Constitution, de ceux qui doivent la maintenir. L'Assemblée présente, chargée de fixer l'organisation des Pouvoirs, et d'élever l'édifice de la liberté, devoit être formée par un seul Corps, afin d'avoir plus de force et de célérité; mais ce même degré de force, s'il étoit conservé après la Constitution, finiroit par tout détruire.

Et comment empêcher pour l'avenir, dans une seule Assemblée, les erreurs, la précipitation, l'enthousiasme ? Comment espérer qu'elle abaissera son Pouvoir devant celui de la Constitution, et que dans les differends qui s'eleveront entre elle et le Tróne, l'un ou l'autre ne sera pas renversé? Des hommes reunis pour faire des Lois, des hommes honorés de la confiance publique, considérés

comme les gardiens, comme les dépositaires de la liberté du Peuple, auroient une si grande autorité, qu'il leur seroit facile chaque jour d'en étendre les limites; et le Veto que pourroit opposer le Monarque à leurs résolutions, seroit presque toujours une arme impuissante. Que de moyens en effet auroit une seule Chambre pour triompher d'un pareil obstacle! Le refus de l'impot, l'influence dont elle jouiroit sur le Peuple, permettroient bien rarement au Prince de lui résister.

Sans cesse entrainée par les discours véhémens de ses Orateurs, ou par l'impression subite qu'elle recevroit de tous les évenemens, elle se mettroit au-dess's de toutes les règles. Vainement la Constitution auroit circonscrit son Pouvoir, elle en altéreroit fréquemment les dispositions. Les atteintes indirectes qu'elle pourroit y porter ne seroient pas aperçues par la Nation, et peut-être même seduiroient la multitude. Des Lois nouvelles succéderoient rapidement à d'autres Lois. La Législation redeviendroit bientôt un ca hos où l'on ne pourroit se diriger que par des interprétations arbitraires : parmi tant de changemens, la liberté publique ne sauroit être conservée; l'anarchie ou l'esclavage en seroient la suite nécessaire; car une seule Assemblee pourroit être aussi funeste à la liberté du Peuple qu'à l'indépendance de la Couronne. Elle pourroit, dans un moment d'enthousiasme, accroitre la puissance d'un Roi victorieux, ou, dans des circonstances difficiles, établir en faveur du Prince une diç tature qui deviendroit perpétuelle.

Deux Chambres, au contraire, délibérant séparément, assurent la sagesse de leurs ré solutions respectives, et rendent au Corps lė

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gislatif la marche lente et majestueuse dont il ne doit jamais s'écarter.

Le Comité a cru qu'une des Chambres, formées par les Députés librement et directement élus par le Peuple dans toutes les parties du royaume, pourroit être appelée la Chambre des Représentans, et que l'autre pourroit porter le nom de Sénat ; il ne s'est point expliqué sur la composition de celle-ci.

Il a cependant été convaincu que les Sénateurs et les Représentans devroient être dans une position differente, afin de n'être pas animés des mêmes passions, et que s'il existoit une identité parfaite dans les formes de leur Election, ils seroient constamment dirigés par les mêmes vues; qu'alors le Sénat ne pourroit plus maintenir la Constitu tion, s'opposer à la précipitation des Représentans, et protéger tout-à-la-fois la liberté des Citoyens et les prérogatives de la Cou

ronne.

Si le nom de Sénat pouvoit choquer, parce qu'il rappelle des Corps aristocratiques, on devroit considérer que le Sénat d'Athenes, et ceux des Américains, ont ennobli cette dénomination. D'ailleurs, il seroit facile de substituer à ce mot; le nom de Conseil National, ou de Chambre des Conservateurs, ou tout autre du même genre.

Le Comite a pensé que les deux Chambres devroient avoir également le droit de proposer et de refuser une nouvelle Loi. Les inconvéniens qui doivent déterminer à ne pas donner l'initiative au Monarque, ne se présentent pas à l'egard du Senat. Il n'est pas à craindre que sur deux Chambres, toujours assemblées en même-temps, l'une puisse s'em

parer, au préjudice de l'autre, de la faculté
de proposer et de rediger les Lois.
Ainsi il ne résulteroit de ce concours qu'une
émulation tres-utile au bien public.

Si les Sénateurs étoient à vie, ils suffiroit peut-être, comme quelques personnes le desirent, qu'ils eussent simplement le droit de suspendre: mais si l'on prefere des Senateurs éligibles pour un temps déterminé, il seroit certainement impossible de ne pas leur accorder, le droit de s'opposer aux résolutions des Représentans. Il faut que le Senat soit formé par des hommes dignes de la confiance publique. Il seroit plus dangereux qu'utile, s'il étoit composé par ceux qui n'auroient pu se faire élire au nombre des Représentans : ce ne seroit pas à une pareille Chambre qu'il conviendroit.de confier le jugement des crimes d'Etat; et comment esperer qu'on s'empresseroit de se placer au rang des Senateurs, si leurs fonctions étoient moins importantes que celles des Représentans.

Dans la plupart des Sénats Américains, il faut, pour être éligibles, avoir un revenu considerable en proprietes foncières, et le consentement des Senateurs est nécessaire pour les nouvelles Lois. Craindroit-on de trop multiplier les obstacles, et d'enchainer l'activité du Corps legislatif? Mais si les Lois proposées ne sont pas contraires à la Constitution, si elles sont utiles à la felicité generale, quel intérêt pourroit porter les Sénateurs à les combattre? Ce n'est jamais en rendant les nouvelles Lois difficiles qu'on attaque la Liberté : c'est en perdant le respect pour les anciennes ; c'est en prenant des resolutions imprudentes et precipitees. Di ra-t-on qu'il seroit absurde de subordonuer

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la volonté de la Nation à des Sénateurs ? Mais si les Sénateurs étoient établis par la Nation elle-même, ils seroient aussi ses Mandataires; ils seroient aussi les organes de sa volonté, et les Représentans ne recevroient que la portion d'autorité dont la Nation n'auroit pas disposé en faveur du Monarque et du Sénat.

Le Comité a proposé de déclarer que, pour être Représentant, il faudroit être âgé de vingt-cinq ans. Vous examinerez, Messieurs, s'il seroit utile de devancer la Majorité et d'ouvrir plutót à la jeunesse une noble carriere, qui, dans l'âge des passions, tourneroit son ardeur vers l'utilité publique, et lui inspireroit le desir de se rendre digne de la confiance du peuple.

Le Comite en indiquant les qualités qui doivent donner aux Citoyens la faculté d'étre Electeurs et Eligibles pour la Chambre des Représentans, s'est vu oblige de prononcer entre deux inconveniens qui choq jent en apparence la liberté naturelle. Il est evident qu'on ne peut pas admettre tous les Citoyens indistinctement au nombre des Electeurs et des Eligibles : ce seroit s'exposer à confier le sort de l'Etat à des mains inexpérimentées, qui en consommeroient rapidement la ruine. Il falloit donc ou restreindre le nombre des Electeurs, et ne mettre aucune borne à leur choix, ou laisser à tous les Citoyens le droit d'elire, et leur tracer des regles pour diriger lear nomination. Le premier partieút été beaucoup plus contraire aux principes. Tous les Citoyens ont le droit d'influer sur le Gouvernement, au moins par leurs suffrages; ils doivent en être rapprochés par la représentation. Si vous exigez

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