falloit avoir des preuves authentiques de leurs délits, et qu'on ne pouvoit le faire sur de simples bruits. La Nation pouvoit influer sur le choix des Ministres; ceux du moment étoient dans le cas de n'être pas agréés par l'Assenblée, puisque leur avènement datoit du renvoi de Ministres vertueux et de troubles alarmans. L'Assemblée ne peut se dispenser d'acquiescer aux désirs de la Nation, en demandant leur renvoi; cette démarche d'ailleurs est forcée, puisque le respect et la reconnois sance du Peuple pour l'Assemblée en dépendent. Elle ne peut cependant pas demander au Roi le rappel des Ministres, car ce seroit attenter au pouvoir exécutif; mais elle doit mettre sous les yeux du Monarque la demande de la ville de Paris. L'Assemblée doit lui déclarer que les Ministres actuels n'obtiendront jamais la confiance de son Peuple, et que fidélité de l'Assemblée ne lui permet pas de dissimuler que leur retraite est le plus sûr garant de la tranquillité de l'Etat. Envoyons en conséquence au Roi une Députation de douze Membres. L'Orateur a remis ensuite sa Motion sur le Bureau. " la M. de Clermont-Tonnerre a annoncé la démission de M. de Villedeuil, et que par conséquent la Motion de M. Barnave ne souffriroit pas une longue discussion. Un Député d'Amiens a déclaré que le choix des Ministres appartenoit au Roi seul; mais si le rappel de M. Necker devoit amener la paix publique, il falloit le demander au Roi. (Nous supprimons plusieurs Avis et Discours plus ou moins conformes à ceux qui précédent, pour arriver à l'opinion de M. Mounier). Ce Député du Dauphiné & discuté la Mo tion de M. Barnave. Il est des circonstances, gleterre est l'influence qu'il exerce sur la (1) Aucune loi n'attribue au Parlement M. Barnave a declaré qu'il ne s'étoit pas deux Chambres contre les Ministres; mais quoiqu'elle fût fondée sur la circonstance, et qu'à l'instant d'accorder des subsides pour la guerre, il parût convenable de solliciter le renvoi des Ministres qui l'avoient si malheu reusement conduite jusqu'alors, la question fut perdue à la très-grande pluralité. Tous les Représentans des Comtés, phalange incorrup tible et impartiale, voterent contre l'opposition, sur le principe fondamental et invio lable qu'au Roi seul appartient le choix ou le renvoi de ses Ministres, et au Parlement le droit de les poursuivre. Cette dernière prérogative balance l'autre. Aussi Milord North repoussa-t-il constamment toutes ces attaques illégales, en offrant de se mettre en jugement. Une seconde voie constitutionnelle dont le Parlement se sert pour faire renvoyer des Ministres, est de leur ôter la majorité des voix; ainsi alcole, ainsi Lord North, en 1782; ainsi Lord Shelburne, l'année suivante, furent obligés de résigner leurs places. Le Ministère, en Angleterre, n'est qu'une manivelle dont le Parlement est le Moteur: s'il refuse le concours de son action aux Agens de l'autorité, la machine s'arrête, et le Roi ne peut lui rendre son mouvement qu'en 'changeant de Ministres. Il n'en est pas moins vrai, comme l'observe judicieusement M. Mounier, que l'intervention du Parlement, dans le choix des Ministres, entretient l'esprit de cabale et nécessite ce qu'on appelle la corruption; mais cette intervention est contraire à l'esprit et à la lettre de la Constitution, qui a donné au Parlement la voie d'impéachment pour réprimer, ou pour punir les Ministres coupables. servi de l'expression exiger le renvoi des Mi- M. de Mirabeau a réfuté M. Mounier; il a déclaré que c'étoit une maxime impie et détestable de dire à l'Assemblée qu'elle ne devoit pas avoir d'influence sur le choix des Ministres. En Angleterre, c'est l'opinion du Peuple qui les éleve et les renverse. Si le vœu général, si l'assentiment général ne peuvent rien sur leur choix, la Nation ne servit pas digne d'être libre. L'autorité du Parlement d'Angleterre sur l'élection des Ministres, loin d'être un vice, étoit un avantage précieux.' M. Mounier a repris la parole et dit : Qu'agiter la question des differens pouvoirs étoit une chose prématurée; qu'il falloit entrer dans des discussions plus profondes, avant de rien statuer; que si cette question avoit été cause de la longue querelle du Roi avec les Parlemens, il ne falloit pas calculer l'avenir par le passé. Il faut empêcher la réunion des pouvoirs, il faut que l'Assemblée nationale ne confonde pas la puissance exécutive et la puissance législative; on posera des li mites sacrées, quand on fera là Constitution. Jusques-là, la Nation compromettroit sa dignité, si elle influoit sur le choix des Ministres. Il a relevé les faits opposés par M. de Mirabeau, et a rappelé lá necessité où avoit ete Sa Majesté Britannique, d'appeler au Peuple de la décision portée par le Parlement sur le premier Ministre, M. Pitt, qu'on vouloit écarter. La confusion des pouvoirs mène a despotisme on à l'anarchie Je ne parle pas du moment, mais de l'avenir; et il faut craindre que les Représentans de la Nation ne soient pas toujours animés de l'esprit qui dirige ceux qu'elle a choisis aujourd'hui. M. Glézen a observé que tous les Préopinans étoient d'accord, mais que des ménagemens les empêchoient de s'entendre; qu'il falloit demander le renvoi des Ministres, mais ne pas aller plus loin. De tout temps, la Nation avoit eu ce droit, quoique leur responsabilité n'ait jamais eu lieu. L'Opinant a lu de l'ouvrage de M. Mounier sur les EtatsGénéraux, les passages concernant le renvoi des Ministres et leur punition, La dénonciation des Ministres coupables, a-t-il ajouté, est donc une loi constitutionnelle. Il faut donc les dénoncer au Roi et à la Nation. Mr. Duquesnoi a, dit que l'Assemblée devoit seulement exprimer au Roi le vœu puIlic, et demander le renvoi des Ministres. M. le Comte de Lally a demandé, au nom de la Capitale, le rappel de M. Necker, de ce glorieux exilé. On nous a recommandé de le solliciter, on nous en a priés, et la prière de tout un Peuple est un ordre. Ce n'est pas que je trouve que M. Necker languisse dans la disgrace; il languissoit, quand on détruisoit les fondemens du bien públic, objet de ses travaux. Cette sainte langueur étoit sur son visage; elle honoroit son ame; elle étoit aussi la suite de ses travaux. Mais on ne languit pas dans la disgrace, quand on emporte avec soi le témoignage de sa conscience, les vœux et Jes regrets de la France entière. M. le Comte de Custines a observé que ceux qui se croyoient en droit de demander le rappel d'un Ministre, s'arrogeroient dans tous les temps le pouvoir de participer au choix des Ministres; que l'Assemblée des |