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n'éclairait plus que les exercices des écoliers. La simplicité des méthodes en dissimulait la grandeur et la force. Étranger aux savants travaux de ses juges et, sans prendre place parmi leurs disciples, le jeune débutant osa les convier dans une vaste plaine depuis longtemps en friche: ils y trouvèrent un maître non un docteur, qui leur montra des vérités plus admirables pour l'école qu'intéressantes pour l'Académie. Ils l'approuvèrent et crurent l'encourager, sans saluer ni deviner en lui le précurseur d'une génération nouvelle de géomètres et le chef d'une grande école. En retenant plus d'une vérité curieuse dont il proclamait l'importance, Cauchy, dans son rapport, contestait l'étendue de la théorie et la solidité des preuves, et, reprochant à l'ingénieux auteur d'avoir trop osé, il le déprimait en l'approuvant. Ces méthodes découvertes avec tant de joie, ces hardiesses heureuses qui ne l'avaient égaré en aucune rencontre, étaient dénoncées comme imprudentes et tenues pour suspectes; ses succès les plus admirés, formellement repris d'incorrection, étaient placés en dehors de la pureté géométrique.

Vivement froissé d'un tel jugement, Poncelet le repoussa toujours avec force, et les critiques, souvent renouvelées, d'adversaires inégaux en autorité et en génie, mais clairvoyants d'habitude et se connaissant en démonstrations, n'ont pu lui arracher la plus légère concession; sans entrer en discussion, ni satisfaire à leurs doutes, il ne retrancha rien de ses conclusions, et imperturbable dans ses principes, il les laissa triompher par leur propre force.

SAV. MOD.

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Poncelet, silencieux d'habitude au milieu des discussions les plus vives, offrait à ses confrères peu d'occasions de lui témoiguer toute leur sympathie et leur estime. Il se croyait méconnu; et l'Académie elle-même, en invoquant en toute occasion l'autorité du mécanicien, semblait oublier la gloire du géomètre. La publication de ses œuvres mathématiques, depuis longtemps désirée, fut accueillie avec une joie, troublée, chez ses amis, par l'amertume de ses préfaces. Laissant éclater tous ses ressentiments, il y énumère des griefs oubliés et prescrits, reproche des injustices depuis longtemps réparées, rappelle des préventions à jamais évanouies, et réunit laborieusement les pièces d'un procès depuis longtemps jugé. On accepta, sans le reviser, l'arrêt toujours équitable de l'opinion, qui sans assigner de rangs, comptait Poncelet et Cauchy parmi les gloires de la France, et quelques-uns de ses adversaires au nombre des grands géomètres de tous les temps.

Les dernières années de Poncelet furent douces et faciles. Le vieux soldat de Krasnoié avait conservé la rude franchise de ses compagnons d'armes. Son esprit loyal et sans fiel attirait, sans qu'il la recherchât, la sympathie dont il était digne. On l'aimait d'autant plus qu'on le connaissait davantage et de plus près. J. BERTRAND.

Il existait à une très petite distance de la ville des souterrains qui étaient la terreur de beaucoup de gens du pays; personne n'osait y pénétrer, et il s'y passait, assurait-on, des choses aussi effrayantes que mystérieuses. Le jeune Poncelet, jugeant qu'il n'en devait pas être ainsi, résolut de sonder le mystère : il excita

le courage de ses petits compagnons, les décida à tenter l'entreprise et se chargea de guider leurs pas; il les conduisit sous ces longues et obscures voûtes, qui n'étaient que celles d'anciennes galeries de mines abandonnées depuis longtemps, et dont le souvenir était à peu près perdu. Le futur ingénieur se dévoilait déjà dans cet enfant. Il avait imaginé, en effet, de se munir de papier et d'y tracer au crayon, et sans aucun des instruments usités en pareil cas, le chemin qu'il suivait; aussi, ce qui eût été pour un autre un acte de témérité blâmable ne fut pour lui que l'occasion de résoudre un problème. Il en eut la solution heureuse, et sut ramener saine et sauve au jour, après six longues heures d'excursion, sa petite troupe haletante de frayeur, mais ne cessant d'obéir aveuglément à cet enfant, dont la supériorité inspirait déjà une sorte de respect.

Le futur mécanicien se dévoila de même. Il avait aperçu chez un marchand une vieille montre; elle devint le but de son ambition; mais elle coùtait 6 francs, et cette somme était bien grande pour ses faibles ressources; à force d'y penser, en s'ingéniant beaucoup et par de petites économies, il parvint à se la procurer. Il acheta la montre la démonter fut l'affaire d'un instant; puis il en étudia le mécanisme avec tant de soin, qu'il put bientôt la remonter et la faire marcher. Ce fut son premier essai en mécanique, et il le rendit bien. heureux; il avait alors dix ans.

Arrivés à Saratov, les prisonniers furent traités de la manière la plus dure. Parqués par groupes de quatre dans de mauvaises chambres, ils eurent à souffrir nonseulement physiquement de toutes les privations possi_

bles, mais moralement d'insultes grossières. On les blessait dans leurs sentiments patriotiques et dans leur amour pour l'Empereur. Ils étaient inquiets sur le sort de l'armée dont on ne leur parlait que vaguement, en exagérant les désastres, trop grands déjà, qu'elle avait subis.

Poncelet était parvenu au terme de ce triste voyage grâce à l'énergie physique et morale dont la nature l'avait doué; cependant il paya son tribut à tant de rudes épreuves. Il tomba malade et ne se rétablit que lentement sous l'influence bienfaisante du soleil d'avril.

Dans cette triste captivité, la nature d'élite de Poncelet se révéla. Plutôt que de chercher à l'intérieur de la ville quelques distractions, il les demanda à l'étude ; mais tout était difficultés dans une situation comme la sienne. Pour étudier, pour travailler, il eût fallu des livres; le papier, les plumes et l'encre étaient tout au moins nécessaires. Quoique le pécule attribué à chaque prisonnier fùt bien faible, il sut cependant en économiser une partie afin de se procurer du papier grossier; pour plus d'économie, il fabriqua lui-même son

encre.

Les moyens d'études manquant, Poncelet était littéralement réduit à ses souvenirs d'école, et il dut commencer par se créer des instruments de travail, refaire un à un, à son usage, les éléments des mathématiques, Algèbre, Géométrie, Trigonométrie, et reconstruire en quelque sorte par la base l'édifice de ses connaissances. Général DIDION. (Notice sur la vie

et les ouvrages de Poncelet.)

CAUCHY (AUGUSTIN)

Paris, 1789; Sceaux, 1857. Célèbre analyste. Elève, puis professeur à l'Ecole polytechnique; professeur à la Sorbonne. Successeur à l'Académie de Monge, exclu par le Gouvernement. - Royaliste et catholique.

Chef d'école, abondant et puissant, parfois obscur. Ses recherches ont surtout porté sur les fonctions.

Sur les intégrales définies entre des limites imaginaires. Sur la détermination du nombre des racines réelles... Leçons sur les applications du calcul différentiel et intégral à la géométrie. Exercices mathématiques. · Considérations sur les ordres religieux. complètes, publiées par MM. Valson et Collet, sous les auspices de l'Académie des sciences, 10 vol. déjà parus chez Gauthier-Villars.

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- OEuvres

Les œuvres de Cauchy occupent une place immense dans la Science. Toutes les parties des mathématiques, la Géométrie, l'Algèbre, la Théorie des nombres, le Calcul intégral, la Mécanique, l'Astronomie, la Physique mathématique, lui doivent les plus grandes découvertes. Plus de sept cents mémoires qui ont été publiés soit à part, soit dans les Comptes rendus, les mémoires de l'Académie des sciences et les principaux recueils du temps; puis des Ouvrages d'une importance capitale les anciens et les nouveaux Exercices de mathématiques, l'Analyse algébrique, le Cours d'Analyse de l'École polytechnique, etc., sont le témoignage de sa prodigieuse activité scientifique et de la fécondité de son génie. Il faut renoncer à énumérer tant de travaux, à faire l'appréciation de tant de découvertes, à dire leur rôle dans la Science et leur influence sur ses progrès. Mais dans l'œuvre si étendue de Cauchy, une part principale doit être donnée à l'idée fondamentale d'étendre la notion première de l'intégrale définie,

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