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siècle; il traverse ensuite diverses phases, toujours en croissant, jusqu'à ce qu'enfin, dans le quatrième siècle, il se résout définitivement dans l'abominable arianisme. En conséquence, depuis Origène et Hippolyte, on voit commencer une lutte incessante contre ce principe hérétique, lutte à laquelle Tertullien, les deux Denys, de Rome et d'Alexandrie, et d'autres, prirent une part active.

Les montanistes qui, à la grande douleur de l'Église, avaient acquis de nombreux partisans, vers la fin du siècle précédent, continuèrent leurs menées, surtout depuis qu'ils eurent gagné de puissans appuis dans Proclus et Tertullien. Toutefois, cette secte ne put jamais acquérir une grande prépondérance. Elle suivait de vagues sensations plutôt que des opinions clairement définies, ce qui lui rendait en outre fort difficile de se livrer à une controverse scientifique. Tertullien fut sans contredit son défenseur le plus habile et le plus savant; mais tous ses efforts pour lui donner de la considération sous ce rapport, demeurèrent sans résultat. C'est sans doute à cela qu'il faut attribuer la circonstance qu'on n'opposa à ses progrès qu'une surveillance active de la part des évêques, et que l'on ne songea point à la combattre dans de nombreux écrits.

Le schisme des novatiens et quelques autres hérésies moins considérables n'eurent pas beaucoup plus d'influence que celle-là sur le progrès des doctrines chrétiennes ; mais les discussions auxquelles elles donnèrent lieu, fournirent l'occasion de mettre en saillie et d'éclairer un des côtés de l'Église et du Christianisme dont on ne s'était pas encore occupé d'une manière si spéciale. Si jusqu'alors on s'était attaqué immédiatement aux dogmes que l'on s'efforçait de défigurer, plus tard la discipline et l'organisation intérieure de l'Eglise furent sérieusement menacées. Les catholiques se virent forcés de développer, d'après des formes précises, contre les novatiens, et de défendre vigoureusement contre ces mou

vemens schismatiques, les doctrines de l'Eglise sur la pénitence, sur le pouvoir de l'Eglise, sur sa constitution', et sur son unité, reposant dans l'épiscopat. Quoique le motif et par conséquent la controverse demeurât plus local, l'effet n'en devint pas moins général et d'un grand avantage pour les temps qui suivirent, même sous d'autres rapports. Les attaques destructives des hérétiques et plus tard des schismatiques, eurent pour résultat immédiat que l'Eglise catholique comprit toujours plus profondément son essence, exprima et soutint son unité et son système d'exclusion d'une manière toujours plus générale et plus décidée contre ses ennemis. Ceci renfermait encore une autre nécessité : celle d'examiner de plus près, et de ramener à des limites fixes, la position de l'Eglise vis-à-vis de l'hérésie et leurs rapports réciproques. Il en résulta des questions et des discussions nouvelles, et la lutte se trouva transportée sur un terrain où les choses n'étaient pas aussi clairement définies et calculées. Ainsi, par exemple, il fut question de la validité du baptême des hérétiques et d'autres points analogues, dont le résultat définitif fut, à la vérité, dès lors mis hors de tout doute, mais qui ne fut porté jusqu'à l'évidence que dans le siècle suivant. Saint Cyprien, le plus zélé défenseur de l'unité catholique, rendit de grands services à l'Église, bien qu'il fût moins heureux dans la solution du problème que dans la défense de sa manière de voir personnelle. Il peut être considéré comme le premier grand écrivain qui ait conçu et traité avec vigueur la discipline pénitentiaire de l'Église, le pouvoir divin des évêques et son rapport à l'Église visible; en un mot, le sens profond de l'organisme ecclésiastique. La plus grande partie de ses lettres et son excellent ouvrage De Unitate Ecclesiæ, appartiennent à cette catégorie.

Interrompons un moment ce récit et tournons nos regards vers l'intérieur de l'Église, pour voir quelles étaient les ressources qu'elle possédait pour parvenir à tous ces buts

différens, et quels progrès la science chrétienne avait faits jusqu'alors. L'Église catholique tirait encore ses défenseurs presque exclusivement des écoles païennes. Cette source avait jusqu'à ce moment toujours suffi à ses besoins; mais pour l'avenir, les exigences croissant journellement, tout semblait annoncer que les forces qu'elle y trouvait seraient désormais insuffisantes. On ne pouvait se dissimuler que l'extension rapide du Christianisme, surtout dans les classes élevées, et l'adoption de sa science particulière seraient fort retardées par le manque d'écoles et d'institutions essentiellement chrétiennes. Mais de grands obstacles s'opposaient encore à ce qu'un pareil état de choses pût être changé. Les parens chrétiens ne se décidaient pas sans peine à faire donner à leurs enfans une éducation scientifique dans les écoles publiques impériales ou communales. L'instruction que l'on y recevait et la littérature classique sur laquelle cette instruction reposait, étaient essentiellement religieuses, mais religieuses païennes. Les principes du paganisme étaient inculqués avec l'explication des auteurs classiques. C'était donc avec raison que l'on se méfiait de ces écoles; quelques précautions que l'on prît, une eau bourbeuse pouvait de là s'introduire dans le limpide ruisseau de la doctrine chrétienne, à laquelle il serait bien difficile après cela de rendre sa pureté. D'ailleurs, les professeurs de philosophie et de belles-lettres étaient les ennemis déclarés du Christianisme. Ils ne se contentaient pas de le combattre dans leurs écrits, ils en faisaient dans leurs écoles un but de railleries et de dédains. C'étaient eux surtout qui excitaient le gouvernement à des mesures violentes contre les chrétiens. Or, si d'un côté tous ces motifs devaient indisposer les chrétiens contre ces professeurs et leurs écoles, de l'autre, ils ne pouvaient reconnaître les grands avantages que devait leur procurer l'instruction que l'on y recevait. Le Christianisme était une religion à la fois positive et divine; il était, d'après la doc

trine de l'Apôtre, le résumé de toute vérité, de sorte que la philosophie était superflue pour lui, puisqu'elle ne pouvait rien lui apprendre de nouveau; il semblait même qu'il pût se passer des formes, la foi étant une force de Dieu; dans quel but donc y ajouter encore la philosophie? Enfin leurs yeux n'étaient que trop souvent frappés des tristes résultats produits par l'union de la philosophie avec le Christianisme; c'était à elle en effet qu'il fallait attribuer les horribles travestissemens du dogme chrétien par les hérétiques, qui ne voulaient point oublier la philosophie grecque par laquelle ils avaient été entraînés dans de si déplorables erreurs. Quand on réfléchit à tout cela, on comprend facilement l'horreur avec laquelle la majorité des chrétiens contemplait alors la science grecque et reculait d'effroi devant elle, comme devant une œuvre du démon; on comprendra tous les reproches que dut souffrir Origène pour s'en être tant occupé, et comment, d'un autre côté, Clément d'Alexandrie ne négligeait rien pour donner à la façon de penser de ses coreligionnaires, sous ce rapport, une meilleure direction.

Or, comme d'une part on manquait et d'écoles et d'une littérature grecque, dans lesquelles la jeunesse pût puiser une instruction fondée sur des principes chrétiens, et comme de l'autre les écoles païennes présentaient de si graves inconvéniens, rien ne faisait espérer que la science et la littérature chrétienne pussent prendre de long-temps un grand essor, et l'Église se voyait forcée de compter encore sur les secours que Dieu daignerait lui envoyer du sein même de ses ennemis.

En attendant, si telle était la situation des choses en général, il y eut néanmoins dès lors dans les circonstances particulières quelques changemens qui faisaient entrevoir un meilleur avenir. Bien que l'Église ne pût pas, sous le rapport de l'instruction, agir précisément comme elle l'aurait voulu,

elle ne perdit pourtant pas cet objet de vue. Dès lors chaque Église un peu importante avait sa propre école; ces institutions furent peu à peu améliorées et agrandies, et dans le cours du troisième siècle on y attacha des cours scientifiques partout où cela fut possible et où on le jugea nécessaire. Alexandrie donna l'exemple avec un brillant succès. Cette ville était alors le principal siége de la science et de l'érudition grecque; un musée fondé par Ptolémée Lagus (1), et agrandi par Tibère (2), y existait aux frais de l'empereur; là on enseignait toutes les connaissances humaines, et les étudians, réunis dans une pension (ITI), y achevaient leur éducation littéraire. Alexandrie était donc le lieu de réunion des savans vers lequel la jeunesse, avide d'instruction, gravitait de toutes les provinces de l'empire. Cet état de choses pouvait devenir dangereux au progrès du Christianisme dans cette ville, ou bien au contraire du plus grand avantage si un pareil établissement devenait l'objet d'une louable émulation. C'est ce qui arriva. On commença par l'enseignement du catéchisme, pour lequel un établissement existait depuis long-temps à Alexandrie (3); on y joignit d'abord un cours raisonné de Christianisme, et puis peu à peu l'enseignement général des sciences philosophiques. Le but que l'on se proposait était non seulement d'instruire la jeunesse chrétienne, mais encore d'attirer à cette école des païens bien élevés, afin de les préparer et de les gagner par degrés à la foi chrétienne. L'explication des Saintes Écritures formait le principal objet des études ; mais on y enseignait aussi la philosophie, la géométrie, la grammaire, la rhétorique, etc. Il ne serait pas facile de désigner l'époque précise où cet arrangement eut lieu, et il est probable qu'il ne parvint que par degrés à la perfection à la

(1) Strabo, 1. XVII, § 8. —(2) Sueton. in vit. Tib., c. 24.—(3) Euseb., h. c. V, 10.

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