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» l'autre tiers sera fourni par une capitation sur tous les pères » de famille, qu'ils aient des enfants à l'école ou non. - Toute » municipalité qui, au 15 janvier 1801, n'aura point établi » d'école, paiera une amende de 40 fr., qui sera délivrée au >> conseil d'éducation et appliquée à l'achat des livres d'école » nécessaires (67). »

Un arrêté sur la fréquentation des écoles suivit immédiatement (le 6 décembre 1800), celui qui avait pour objet leur établissement; il n'est ni moins précis, ni moins ferme : «< 1° Cha» que père de famille est tenu d'envoyer à l'école, au moins » pendant l'hiver, ses enfants qui sont en âge de la fréquenter, » à moins qu'il ne puisse prouver à l'inspecteur de l'école qu'il >> a soin de leur éducation. Sont soumis à cette obligation tous >> ceux qui tiennent en pension des enfants en âge de fréquenter » les écoles. Ceux qui n'envoient pas leurs enfants ou leurs >> pensionnaires à l'école, sont punis par une amende de cinq >> batz par semaine, pour chaque enfant. Ces amendes sont >> destinées à acheter des livres pour les enfants pauvres de » l'école, et à former des prix. Dans le cas où la munici» palité en négligerait la perception, les membres qui la com» posent, en seront solidairement responsables, et les cham»bres administratives les astreindront au paiement des amen>> des qui auraient dû être perçues. >>

»

Le même arrêté impose aux parents et aux personnes qui ont des enfants en pension, l'obligation de procurer les livres d'école, sinon ils seront fournis pour leur compte par la municipalité.

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Tel fut dans son ensemble le système d'instruction publique arrêté, organisé, ou simplement projeté et désiré dans la période de la république helvétique une et indivisible (68). Arrêtons-nous maintenant quelques instants pour recueillir avec soin les idées caractéristiques que la révolution fait éclore ou qu'elle met en relief: en unissant ainsi cette époque au passé et à l'avenir, nous reconnaîtrons à la fois l'héritage reçu des temps anciens et celui qui est laissé aux temps futurs.

Ne serons-nous pas frappés d'abord de la grande impulsion que l'on cherche à donner à l'instruction publique? Les écoles inspirent l'intérêt le plus vif; elles deviennent un des premiers objets de l'attention du gouvernement nouveau; un ministère spécial est institué pour l'avancement des arts et des sciences, et l'un des hommes les plus éminents du pays est appelé à cette haute fonction. Aussi, que d'idées, que de plans nouveaux on voit éclore! Ce mouvement toutefois ne doit pas trop nous étonner. Lorsqu'une révolution invite à prendre part au pouvoir toutes les classes de la société, l'instruction publique et surtout les écoles primaires deviennent l'objet de la vive sollicitude du gouvernement. On sent qu'il faut éclairer ce souverain à mille têtes, appelé le peuple. Malheur au pays livré à une démocratie ignorante et grossière !

Aussi, nous voyons dominer, comme formule de ce besoin, la maxime grave que l'éducation de la jeunesse appartient à

l'Etat. L'Etat ne peut laisser ce grand intérêt national, ni à l'arbitre des familles, ni à l'industrie privée, ni au caprice des individus. Dans la plus haute conception de sa mission, l'Etat est l'éducateur du peuple, car le peuple, c'est lui, et comme tout être organisé, il doit tendre à réaliser régulièrement la plus grande somme de vie.

« Et quand nous disons l'Etat, il faut, pour comprendre toute » la grandeur de ce mot, il faut se figurer l'Etat non pas comme >> un despote qui commande au nom de son intérêt égoïste; >> mais la société elle-même, commandant dans l'intérêt de » tous; il faut se figurer l'Etat non pas comme un pouvoir dont >> on combat, dans le moment, les tendances politiques, ou une dynastie à laquelle on refuse ses affections; il faut voir dans » l'Etat, l'Etat lui-même, c'est-à-dire l'ensemble de tous les » citoyens, non-seulement ceux qui sont, mais ceux qui ont » été et qui seront, la nation, en un mot, avec son passé et son » avenir, avec son génie, sa gloire, ses destinées. Certes, l'Etat, » quand il représente toutes ces choses, quand il représente, » dans l'antiquité, Rome, dans les temps modernes, la France, » l'Angleterre ou la Prusse, l'Etat a le droit de vouloir quelque » chose, au sujet de l'enfant qui vient de naître, et si le père a >> le droit au nom de sa tendresse, de souhaiter pour lui certains » soins physiques et moraux, l'Etat a le droit de vouloir qu'on >> en fasse un citoyen plein de l'esprit de la constitution, aimant >> les lois, aimant le pays, ayant les penchants qui peuvent con» tribuer à la grandeur, à la prospérité nationales. Certes, qui» conque nierait cela, nierait la patrie et ses droits; et s'il serait > impie de nier les droits sacrés de la paternité sur ses enfants, » serait-il moins impie de nier les droits de la patrie sur ses » citoyens (69)? »

On ne demanda point à l'autorité paternelle de sacrifier ses droits : le problème de leur conciliation avec ceux de l'Etat fut

résolu comme il l'est de nos jours: liberté est laissée aux familles de procurer l'instruction de leurs enfants par les moyens de leur choix; mais l'Etat se réserve l'appréciation des résultats; il veut savoir si ces enfants qui seront un jour citoyens, reçoivent une éducation propre à les préparer à cette desti

nation.

Au reste, dans cette inspection supérieure de l'Etat il n'y avait rien de despotique et d'étroit: se souvenant que sa mission est noble et sainte, l'Etat se comprenait lui-même avec grandeur et dignité.

Il y avait un grand problème à résoudre : comment donner l'unité à ce système? La république helvétique, une et indivisible, devait rattacher par l'éducation, plus encore que par la politique et l'administration, toutes les diversités cantonales et communales, à une pensée unique, à une direction centrale. Nous ne dirons pas que le problème ait été résolu : nous demanderons plutôt s'il était possible de le résoudre. Du moins le besoin en fut senti, et les efforts ne manquèrent pas.

Tous ces efforts devaient rester infructueux sous l'influence des mœurs de la Suisse. Mais une innovation qui avait meilleure chance de survivre à ses auteurs, parce qu'elle répondait à un véritable besoin du temps et du pays, se trouvait dans l'extension donnée à l'instruction primaire : nous avons dit combien d'enseignements nouveaux devaient ranimer les écoles et leur donner une véritable vie. Quelle distance entre ce système et les ordonnances de Berne!

Il est dans un système d'instruction publique un autre élément qui sert à le caractériser, non moins que les objets proposés à l'étude de la jeunesse ; c'est l'élément moteur, la force vitale, la nature et l'ordre des idées et des sentiments que l'on s'efforce de réveiller pour imprimer l'impulsion et déterminer le progrès. Le Gouvernement helvétique et le Ministre, qui

était à la fois son conseiller et son organe, se sont franchement exprimés sur ce point : c'est aux grands intérêts de la patrie, de la société et des individus, considérés principalement comme citoyens, qu'ils adressent leur appel; ils ne craignent pas d'exciter le mobile de l'émulation, et même de l'émulation devenue ambition. Tel devait être l'effet de plusieurs institutions nouvelles, ainsi le triomphe des élèves qui obtiennent la dignité d'élus et d'élèves de la patrie, les prix, la fête des écoles. Il y avait peut-être un peu d'enthousiasme factice dans ces conceptions éphémères; mais ne verra-t-on pas aussi un grand bon sens pratique et même un heureux palliatif de l'émulation révolutionnaire, dans cette nécessité de produire un titre officiel, comme témoignage de capacité, lorsqu'un citoyen demande une fonction publique? L'enseignement de la morale introduit partout devait compléter les mobiles que le système mettait en jeu, et en même temps les diriger et les épurer. Signalons enfin deux institutions dont nous trouvons ici la pensée. Les écoles normales pour l'éducation des jeunes instituteurs, et les pensions de retraite pour ceux que la vieillesse appelle au repos. Nous aimons à recueillir ici ces pensées bienfaisantes; semences jetées alors au vent des révolutions, mais tombées au milieu de nous sur un sol fertile, pour donner leurs fruits en leur saison.

Quel jugement doit-on porter de ce système? Nous n'avons pas à l'apprécier dans ses rapports avec la Suisse entière. Mais considéré en lui-même, le plan offrait une vaste et belle conception. Partout respirait l'amour de la patrie uni à l'amour de la science. Une haute idée de l'humanité et du peuple suisse était présentée au respect, nous dirons même au culte de la révolution. Mais les grandes pensées qui naissent dans les révolutions, sont quelquefois trop grandes; elles reçoivent d'une imagination exaltée, ou d'un patriotisme trop

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