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ils sont de servir la patrie lorsque l'ordre public troublé ou Ja patrie en péril demandent l'emploi de leurs forces: le refus de ce service les prive nécessairement du droit de citoyen actif; tous doivent prendre leur inscription dans les municipalités, et la patrie ne dispense du devoir de la servir que ceux que la nature a mis hors d'état de porter les armes; elle ne suspend les fonctions à cet égard que de ceux qui déjà fonctionnaires publics, la servent d'une autre manière. Mais cette force armée pour le maintien de l'ordre et de la liberté, doit toujours être dans l'heureuse impuissance de les attaquer; elle doit ne pouvoir jamais favoriser la licence, jamais elle ne doit agir par elle-même ; toujours elle doit être requise et ceux-là seuls peuvent la requérir que le peuple a choisis pour administrer la chose pablique et pour maintenir l'exécution des lois. La force légalement requise ne connaît plus que l'obéissance, pour préserver la nation du danger de ces résolutions soudaines que peuvent prendre des hommes armés, qui législateurs, juges, et exécuteurs, réuniraient tous les pouvoirs et toutes les passions. Vous avez voulu que les citoyens faisant les fonctions de gardes nationales ne pussent jamais délibérer en cette qualité; vous avez banni les armes et même l'uniforme du sein de ces assemblées délibérantes dont la liberté fait l'essence, où c'est un privilége ou plutôt un devoir du citoyen d'annoncer tout ce qu'il eroit utile à la chose publique, où tous sont égaux devant la loi, où l'homme armé croirait pouvoir exercer l'ascendant que donne toujours l'appareil et le sentiment de la force.

» C'est par une suite de cette égalité, dont nous devons entretenir le sentiment, et par laquelle se maintiendra toujours la liberté, que vous avez décrété qu'il n'y avait qu'une seule garde nationale, soumise aux mêmes réglemens, à la même discipline, et revêtue du même uniforme. Il n'y a plus de provinces diverses; il n'y a qu'une nation; il n'y a plus d'habitans du nord et du midi, peuples jadis rivaux ou jaloux: il n'y a plus que les citoyens égaux du même empire; toute supériorité est alarmante pour des hommes libres et égaux, et celui d'entre eux qui commence par être mon supérieur finira tôt ou tard par être mon maître.

» Enfin vous avez porté vos sages précautions jusque sur la totalité des citoyens armés par la loi, sur cette immense garde nationale qui couvre la surface de l'empire, hérissée d'armes, protégée par des canons, présentant de toute part l'appareil de la guerre; vous avez dit que cette garde nationale ne formerait point un corps militaire, et la sagesse vous a dicté ce décret. Vous avez voulu préserver la nation du dangereux esprit de conquête, que vos lois sublimes ont proscrit (1), et les citoyens de cette émulation de grades et de rangs par lesquels le despotisme achète aisément des esclaves. Que le soldat remplisse le noble devoir de protéger notre sûreté, qu'il obtienne par sa valeur les justes récompenses que lui destine la patrie reconnaissante! Grades, honneurs, cordons, tout est ennobli par la sagesse et le courage, et les moindres faveurs de la patrie sont des honneurs, parce que la patrie ne veut ni corrompre, ni flatter, ni subjuguer. L'armée, avezvous dit, est une force habituelle extraite de la force publique... Donc c'est la force habituelle qui est une armée ; la force publique ne l'est pas : la force habituelle voilà le corps militaire; la force publique c'est la totalité des citoyens, c'est la masse de la nation, c'est la garde nationale de France.

>>> Tels sont les principes que vous avez posés; d'où il suit que ce que vous avez demandé à vos comités c'est de déterminer les fonctions des citoyens servant en qualité de gardes nationales; de les diviser par corps séparés, mais soumis à une loi uniforme; de régler le service qui pourrait être nécessaire en temps de paix; de les rendre propres au service en temps de guerre, et d'établir le genre de discipline qui peut convenir à des citoyens qui ne sont armés que momentanément, et dont les délits étrangers à la discipline seraient d'ailleurs punis par les lois. C'est l'objet du plan que vos comités vous ont présenté; il est divisé en cinq sections : dans la première nous vous proposons des articles extensifs de cette proposition que vous avez décrétée, qu'il y aura dans chaque commune un registre ouvert pour y recevoir l'inscription des

(1) Voyez tome II, page 335, l'article 4 du décret sur le droit de guerre et de paix.-Voyez aussi la Constitution, titre VI.

eltoyens actifs et de leurs fils depuis l'âge de dix-huit ans ; la seconde présente un projet d'organisation pour le service de la garde nationale; la troisième règle les fonctions des citoyens servant en qualité de gardes nationales; la quatrième règle l'ordre du service que les gardes nationales pourront être appelées à faire; la cinquième renferme des articles de discipline qui devront être en vigueur durant le temps de ce service. Le comité militaire vous présentera un plan de tactique et d'exercices militaires propres au genre de défense auquel les citoyens faisant le service des gardes nationales pourront être appelés.

» La première section est le développement de votre décret du 12 juin 1790; ce décret a trois dispositions: 1° l'inscription des citoyens actifs et de leurs fils âgés de dix-huit ans sur un registre ouvert dans chaque municipalité; 2° l'exemption, non de l'inscription, mais du service pour ceux qui ne pourront le remplir à raison de leur âge et infirmités ou autre empêchement ; 3° que les citoyens exemptés ne pourront être remplacés que par des citoyens inscrits. Vos comités ont donc dú développer ces dispositions dans cette espèce de code général des citoyens gardes nationales; ils y ont ajouté des dispositions nouvelles qui leur ont paru nécessaires au complément de cette loi, mais qui ne sont pourtant qu'une conséquence de vos décrets antérieurs. Au premier article, concernant l'inscription des citoyens actifs et de leurs fils, ils vous proposent d'ajouter, 1° une disposition pénale pour engager les citoyens à s'incrire cette disposition n'est pas cpërcitive; la peine sort naturellement du refus que fait le citoyen d'offrir ses services à sa patrie, et comme il est de principe que le membre d'une société prend l'engagement en y entrant de veiller à la sûreté des individus, et par conséquent de la société, comme chacun de ses membres veille à la sûreté de ce citoyen lui-même, son refus le prive du titre de citoyen, et puisque tous les membres de cette société son des citoyens actifs, il est censé renoncer à ce titre en renonçant à ses devoirs; il n'est plus citoyen actif; c'est lui-même qui se destitue. La loi ne fait que sanctionner ce décret, prononcé déjà par la nature des choses. Nous vous proposons

en second lieu d'admettre aux droits des citoyens gardes nationales les étrangers et leurs fils qui seront devenus Français aux termes de vos décrets · ce n'est qu'une application infiniment juste d'une loi que vous avez déjà rendue, car aux termes de vos décrets ces étrangers sont citoyens actifs, 5° Quant à l'âge de l'inscription, nous vous proposons une disposition politique qui d'ailleurs est une conséquence de votre décret du 12 juin.

» C'est un si beau moment pour un citoyen que celui auquel il se consacre au service de son pays, où, sorti de l'enfance et renonçant aux jeux et aux frivolités de cet âge, il voit la patrie lui tendre les bras, le créer homme, et le recevoir au nombre de ses défenseurs, que ce moment doit laisser chez lui de profonds ressouvenirs. Rien ne doit le ve→ tarder; la patrie n'admet aucun prétexte; le vrai citoyen ne doit en alléguer aucun pour se refuser au premier de ses devoirs. A l'âge de son inscription, s'il se trouve éloigné dẹ son pays, il faut que le souvenir de son devoir l'y rappelle, que son cœur palpite en songeant à l'inscription de ses compagnons d'âge, que son imagination enflammée lui retrace la douceur de ces fêtes publiques, la joie pure de ses parens, leurs tendres embrassemens, les félicitations de ses amis, et le serment solennel à tous ses concitoyens pour le maintien de la Constitution. C'est par de telles institutions que les anciens Grecs, ces maîtres dans l'art de chérir la patrie, avaient su attacher les citoyens par un sentiment passionné au pays qui les avait vus naître; le Grec voyageant hors de son pays, lorsqu'il se trouvait dans ces époques solennelles où ses concitoyens réunis célébraient les fêtes de la liberté, sentait son cœur s'attendrir à ces ressouvenirs touchans, et ses yeux se baignaient de larmes: c'est ainsi que se forme, que se propage l'esprit public; ce ne sont pas les lois, c'est l'amour des lois qui rend une constitution immortelle ; et l'amour des lois ne se maintient que par le charme des fêtes publiques, par la majesté des institutions nationales, par l'attrait inévitable de cette universelle solennité dans laquelle tous les citoyens d'un grand empire éprouvent tous à la fois le même sentiment. » Vous avez donné un corps à votre Constitution, il fauț

lui donner une âme et lui inspirer le souffle de la vie. Votre comité de constitution vous proposera des moyens d'animer ainsi les assemblées nationales, soit générales, soit particulières, que vous avez décrétées; d'en corriger la sécheresse, qui jusqu'ici ne les a présentées aux citoyens que comme des devoirs et des sacrifices. Vous avez formé les membres et les muscles du corps politique; il faudra leur donner du jeu, de l'onction et de la souplesse. Mais dans l'objet particulier dont nous vous occupons maintenant, il nous paraît convenable que le citoyen qui sans motif aura retardé son inscription de la garde nationale à dix-huit ans soit aussi retardé dans son inscription civique, que vous avez fixée à vingt-un ans, et qu'il ne puisse pas s'inscrire par procuration : il a dédaigné de s'engager dans l'âge prescrit à la défense de sa patrie; la patrie ne peut le reconnaître, et puisque trois ans doivent s'écouler entre les deux inscriptions, il est juste que la dernière soit retardée de tout ce qu'il a mis d'insouciance à prendre la première; seulement, lorsque la suite d'une éducation nécessaire sera la cause de l'absence d'un jeune homme de dix-huit ans, son père, ou ses parens pourront le faire inscrire au registre public.

» Votre comité vous propose encore que les fils des citoyens actifs qui auront rempli les fonctions de gardes naționales pendant dix ans après leur inscription aient acquis par ce service, ou par l'intention de le faire quand ils en seraient requis, les droits de citoyen actif: cette disposition est dans l'esprit de vos décrets, qui tendent à considérer le fils du citoyen actif comme actif lui-même lorsque son père paie une imposition qui, répartie sur ses enfans, produirait plusieurs impositions suffisantes pour les rendre citoyens actifs 'eux-mêmes. Si le service pour la patrie est un devoir dans celui qui le fait, il n'en mérite pas moins la reconnaissance de la société, et le prix de ce service ne peut se trouver que dans le droit de citoyen que celui-ci était disposé à payer de son sang : d'ailleurs vous aspirez à perfectionner votre décret concernant le droit à l'éligibilité fondé sur la base de l'imposition; et en attendant que l'esprit publie ait amélioré les mœurs publiques, si vous voulez que le titre de citoyen actif soit un motif d'ambition pour le petit nombre de ceux qui en

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