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opposera aux efforts de nos ennemis une barrière insurmontable.

» Parez, messieurs, aux maux qui pourraient résulter des désordres intérieurs, et les entreprises que pourraient tenter quelques hommes désespérés ne seront jamais redoutables, et les grandes puissances de l'Europe ne s'engageront pas dans une querelle avec vous; aucune d'elles n'a la possibilité d'entreprendre de vous nuire aussi long-temps que vous conserverez cette suite et cette vigueur dans les résolutions qui assurent votre considération au-dehors comme votre autorité intérieure.

>> Les puissances du nord sont encore occupées de leurs propres affaires; et quoiqu'on annonce comme prochaine la terminaison des conférences de Sistow, des intérêts si compliqués ne s'accordent pas facilement; mais, fussent-elles parvenues à les régler, un temps considérable serait encore nécessaire pour que leurs forces pussent être combinées et dirigées contre nous dans un système général.

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L'Espagne, la Sardaigne et l'empereur lui-même, occupés de maintenir leur paix intérieure, loin de vouloir envoyer des armées pomper au milieu de nous l'esprit de notre révolution, désirent peut-être que des résolutions sages terminent dans notre propre pays un mouvement qui les inquiète et les épouvante, et cherchent à franchir sans commotion ce moment de crise pour les rois.

» Le ministère anglais, contenu par l'esprit public et le vœu national, ne peut tenter une entreprise contre nous sans compromettre son existence et sans exposer à des secousses la constitution qu'il défend avec tant de sollicitude.

» Tous doivent savoir qu'il n'est plus possible d'opprimer la liberté française; tous doivent calculer les hasards d'une lutte imprudente contre nous; la réaction de leurs efforts serait trop dangereuse au sein de leurs propres états: trop de moyens sont offerts à un grand peuple dont on veut détruire la liberté, et qui dès-lors acquiert le droit de tout tenter pour la défendre.

» Parmi les puissances de l'Europe il en est d'ailleurs à qui notre alliance est précieuse et nécessaire. Dans le système

politique le parti qu'adopte la France met un grand poids dans la balance, et le moment où notre gouvernement va recevoir sa forme et sa vigueur, où la terminaison de nos mouvemens intérieurs va nous rétablir dans notre influence naturelle, n'est pas celui où par des querelles imprudentes ceux qui ont un si grand intérêt à nous rester unis chercheraient à nous aliéner.

» Messieurs, si nous le voulons fortement, au-dehors comme au-dedans la révolution est terminée. Depuis la grande crise du départ du roi votre conduite a fait disparaître bien des erreurs et des illusions; vous avez prouvé que là où tant de passions et d'intérêts voulaient n'apercevoir qu'une faction il y avait une véritable et légitime puissance; que là où l'on ne voulait voir que trouble et anarchie il y avait au moment même des plus grandes crises de l'ordre, des mesures suivies et un gouvernement vigoureux; que là où l'on n'avait prévu que de l'exaltation et des fureurs il y avait de la sagesse, des principes constans et du calme dans les résolutions; que là enfin où l'on n'avait vu que les passions privées et l'agitation d'un. petit nombre d'hommes il y avait la volonté générale et la résolution invariable d'une grande nation.

» Continuez, messieurs, à suivre cette marche grande et imposante en achevant vos glorieux travaux, en établissant solidement dans l'intérieur du royaume la tranquillité et l'exécution des lois; opposez aux tentatives extérieures une redoutable défense, et bientôt, j'ose le dire, vous verrez s'évanouir à la fois des inquiétudes et des espérances qui ne sont fondées que sur de fausses notions de votre situation et de vos moyens.

» Voici, messieurs, le projet de décret que vos comités m'ont chargé d'avoir l'honneur de vous présenter. »

Ce projet de décret, rédigé conformément aux dispositions développées dans le rapport, fut adopté dans la même séance, et sans discussion.

Il portáit pour disposition principale que quatre-vingtdix-sept mille hommes, pris sur la conscription libre de trois

cent mille gardes nationales décrétée les 11 et 21 juin, seraient mis sur-le-champ en activité. Ce décret était à peine rendu, et déjà de toute part des citoyens accouraient sous les drapeaux; en peu de jours les enrôlemens volontaires surpassèrent de beaucoup le nombre d'hommes demandé: les pères de la patrie avaient parlé en son nom; ce n'était plus le service d'un homme, la gloire d'une famille, c'étaient la liberté, la patrie qui réclamaient l'appui de leurs enfans: dès-lors le zèle le plus empressé ne parut qu'un simple devoir; et ce zèle, que provoquaient seulement des mesures de prudence, s'accrut bientôt en raison des besoins et des dangers; bientôt tout le peuple français se levera pour maintenir et pour défendre et ses volontés et ses droits.

Nous avons recueilli les travaux les plus importans de nos premiers législateurs sur l'organisation de la force publique, et l'on a vu que cette force réside essentiellement dans les gardes nationales, qui sont la nation : nous terminerons en rapportant une lettre qui nous paraît compléter le développement de ce principe, en même temps qu'elle rappelle aux citoyens armés leurs devoirs constitutionnels; et ces devoirs ne pouvaient être mieux tracés que par l'homme qui sut si bien les respecter et les chérir.

Lettre du général La Fayette à la garde nationale parisienne. (8 octobre 1791.)

Messieurs, au moment où l'Assemblée nationale constituante vient de déposer ses pouvoirs, où les fonctions de ses membres ont cessé, j'atteins également le terme des engagemens que je contractai lorsque, placé par le vœu du peuple à la tête des citoyens qui les premiers se dévouèrent à la conquête et au maintien de la liberté, je promis à la capitale, qui en donnait l'heureux signal, d'y tenir élevé l'étendart sacré de la révolution que la confiance publique m'avait remis.

» Aujourd'hui, messieurs, la Constitution a été terminée par ceux qui avaient droit de la faire, et après avoir été jurée

par tous les citoyens, par toutes les sections de l'empire, elle vient d'être légalement adoptée par le peuple tout entier, et solennellement reconnue par la première assemblée législative de ses représentans, comme elle l'avait été, avec autant de réflexion que de loyauté, par le représentant héréditaire qu'elle a chargé de l'exécution des lois. Ainsi les jours de la révolution font place à ceux d'une organisation régulière, à ceux de la liberté, de la prospérité qu'elle garantit; ainsi, lorsque tout concourt à la pacification des troubles intérieurs, les menaces des ennemis de la patrie devront à la vue du bonheur public leur paraître à eux-mêmes d'autant plus insensées que, quelque combinaison qu'on parvînt jamais à former contre les droits du peuple, il n'est aucune âme libre qui pût concevoir la lâche pensée de transiger sur aucun de ces droits, et que la liberté et l'égalité, une fois établies dans les deux hémisphères, ne rétrograderont pas.

» Vous servir jusqu'à ce jour, messieurs, fut le devoir que m'imposèrent et les sentimens qui ont animé ma vie entière et le juste retour de dévoûment qu'exigeait votre confiance; remettre actuellement sans réserve à ma patrie tout ce qu'elle m'avait donné de force et d'influence pour la défendre pendant les convulsions qui l'ont agitée, voilà ce que je dois à mes résolutions connues, et ce qui sa tisfait au seul genre d'ambition dont je sois possédé.

» Après cette exposition de ma conduite et de mes motifs, je ferai, messieurs, quelques réflexions sur la situation nouvelle où nous place l'ordre constitutionnel qui va commencer. La liberté naissait entourée de signes de paix, lorsque ses ennemis, provoquant les défenseurs du peuple, nécessitèrent la naissance inattendue des gardes nationales, leur organisation spontanée, leur alliance universelle, enfin ce développement de forces civiques qui rappelait l'usage des armes à sa véritable destination, et justifiait cette vérité qu'il m'est doux de répéter aujourd'hui, que pour qu'une nation soit libre il suffit qu'elle le veuille (1). Mais il est

(1) C'est le 11 juillet 1789 que le général La Fayette prononça cette vérité à la tribune, en présentant à l'Assemblée son projet de déclaration

temps de donner d'autres exemples, et ceux-là seront encore plus imposans; ce sont ceux d'une force irrésistible qui ne s'exerce que pour le maintien des lois.

» J'aime à rappeler, ici, messieurs, comment, au milieu de tant de complots hostiles, d'intrigues àmbitieuses, d'égaremens licencieux, vous avez opposé à toutes les combinaisons perverses une infatigable fermeté; aux fureurs des partis, aux séductions de tout genre le pur amour de la patrie;

des droits. Dans notre tome I, page 232, nous avons donné ce projet; voici l'extrait littéral du discours dont il le fit précéder:

..... On vous a déjà présenté un projet de travail sur la Constitution. Ce plan, si justement applaudi, présente la nécessité d'une déclaration des droits comme le premier objet de votre attention.

En effet, soit que vous offriez sur-le-champ à la nation cette énonciation de vérités incontestables, soit que vous pensiez que ce premier chapitre de votre grand ouvrage ne doive pas être isolé, il est constant que vos idées doivent d'abord se fixer sur une déclaration qui renferme les premiers principes de toute Constitution, les premiers élémens de toute législation: quelque simples, quelque communs même que soient ces principes, il sera souvent utile d'y rapporter les discussions de l'Assemblée.

> Une déclaration des droits présente deux objets d'utilité.

Le premier est de rappeler les sentimens que la nature a gravés dans le cœur de chaque individu, d'en faciliter le développement, qui est d'autant plus intéressant que, pour qu'une nation aime la liberté il suffit qu'elle la connaisse, et que pour qu'elle soit libre il suffit qu'elle le veuille.

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Le second objet d'utilité est d'exprimer ces vérités éternelles d'où doivent découler toutes les institutions, et qui doivent devenir dans les travaux des représentans de la nation un guide fidèle qui les ramène toujours à la source du droit naturel et social.

Le mérite d'une déclaration des' droits consiste dans la vérité et la précision; elle doit dire ce que tout le monde sait, ce que tout le monde sent. C'est cette idée, messieurs, qui seule a pu m'engager à tracer une esquisse que j'ai l'honneur de vous présenter.

Je suis bien loin de demander qu'on l'adopte; je demande seulement que l'Assemblée en fasse faire des copies pour être distribuées dans les différens bureaux; ce premier essai de ma part engagera d'autres membres à vous présenter d'autres projets qui rempliront mieux les vœux de l'Assemblée, et que je m'empresserai de préférer au mien.»

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