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» La réunion des deux corps du génie et de l'artillerie peut-elle être utile?

» Est-il nécessaire pour le génie d'avoir une troupe directement attachée à sa suite?

>> Les mineurs tiennent-ils essentiellement à l'artillerie ? » Leur réunion au corps du génie serait-elle nuisible à leur service ou à leur instruction ?

>> J'aurai l'honneur de vous présenter, le plus succinctement qu'il me sera possible, toutes les raisons pour et contre, nécessaires au développement de chacune de ces questions.

» La réunion des deux corps produirait deux résultats bien précieux pour l'État, l'économie de finance et le bien du service; l'économie de finance, parce qu'il ne faudrait plus à l'avenir, pour l'exécution du service de l'artillerie et celui des fortifications dans les places, que moitié du nombre des * officiers qui y sont employés dans l'état de séparation ; le bien du service, parce que le but des principaux travaux de ces * deux corps étant presque toujours commun à la guerre, ils - ont besoin de les concerter ensemble, et que, quelque párfait que puisse être ce concert, il ne peut jamais équivaloir * l'unité d'intentions d'un seul chef. Cette réunion empêcherait entre les deux corps toute espèce de rivalité z nuisible au service, et qui ne se manifeste que trop souvent entre eux Jorsque des fonctions rapprochées à la guerre obligent les uns à diriger les travaux, et les autres à préparer les moyens de les défendre ou de les protéger : n'existât-elle d'abord que Zde nom et d'uniforme, le but serait en partie rempli.

»> Du moment que Fopinion publique ne pourrait plus séparer les officiers du génie de ceux de l'artillerie, le succès ides travaux confiés aux uns intéresserait aussi les autres, et des deux côtés chacun concourrait avec le même empresse*ment au succès des opérations dont la gloire ou la honte serait dans le cas de réjaillir sur le corps entier.

»Tous les hommes ne sont pas tous également propres - aux mêmes occupations; les uns, plus actifs par caractère, se plaisent dans le mouvement; les autres, plus réfléchis par inclination, préfèrent les études du cabinet. Le corps de l'artillerie présente dans son ensemble ces deux genres d'occu

pation, et donne ainsi des facilités, en distinguant le génie et le caractère des individus qui le composent, d'employer chacun d'eux à la partie qui peut lui convenir davantage. Le. génie au contraire, dans sa constitution actuelle, se trouve borné pour ainsi dire aux études et aux travaux modestes et paisibles du cabinet; tous les sujets qui se destinent à ce service n'ont point à choisir le genre d'occupation qui leur serait propre; leur activité, s'ils en ont, se trouve perdue pour eux, et ne sert souvent qu'à les détourner de l'étude réfléchie à laquelle ils sont forcés de se livrer par état. Si les deux corps étaient réunis tous ceux qui se destinent aujourd'hui à servir dans l'un ou dans l'autre, ayant acquis par leur éducation première les connaissances préliminaires nécessaires aux différentes parties de ces deux services, pourraient être employés dans celle qui conviendrait le mieux à leur caractère: le service y gagnerait, puisque sou véritable intérêt, surtout dans des corps qui demandent la réunion des connaissances et des talens, exige que chacun soit employé suivant la nature de son génie et conformément à ses moyens.

>> En adoptant le mode de réunion sans confusion des services des deux corps (le seul prațicable dans le moment d'un bouleversement général, pendant lequel il serait peutêtre imprudent d'accroître le chaos en rapprochant de force des élémens dont l'affinité n'est pas encore suffisamment démontrée), on n'exigerait d'aucun de ces deux corps de nouvelles études, puisque chacun resterait toujours chargé des mêmes détails dans la ligne sur laquelle il serait placé. Cette réunion, en ne présentant pas les mêmes inconvé– niens et les mêmes causes de désordre que la réunion trop subite essayée en 1755, donnerait pour le présent la facilité de pouvoir placer soit sur une ligne, soit sur l'autre, suiyant leur aptitude, les nouveaux sujets en sortant des écoles, et pour l'avenir la possibilité des réductions que cette réunion pourrait occasionner en simplifiant ou en réunissant plusieurs fonctions aujourd'hui séparées, dont les détails sont les mêmes. Un conseil composé d'officiers des deux corps et chargé de leur administration, sous les ordres du ministre, pourrait en préparer les détails, l'exécuter successivement

sans secousse et sans commotion, suivant le plan dont on pourrait convenir dans un comité composé d'officiers instruits et expérimentés, comité que vous pourriez demande au roi d'assembler à cet effet.

>> Tels sont les avantages que produirait cette réunion; tels pourraient être les moyens à employer pour y parvenir. Les rivalités que pourraient exciter des services confondus, quoique souvent distincts par leur nature; le choc des opinions existantes à présent dans chacun de ces corps, et qui sont loin d'être unanimes sur le point de la réunion; les combats des intérêts particuliers contre l'utilité générale; les divisions qui pourraient être la suite des prétentions opposées; la confusion que pourrait peut-être occasionner entre ces deux corps leur réunion dans un moment où la situation de l'Europe peut rendre chaque jour leurs services de plus en plus utiles; tels sont les inconvéniens principaux à y opposer.

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» Enfin, messieurs, quelque avantageuse que puisse vous paraître cette réunion, l'économie qu'elle pourrait produire ne serait qu'éventuelle; d'ailleurs, ne nous le dissimulons pas, en l'opérant ainsi sans confondre les services elle ne remplit pas tout-à-fait le but qui en a fait naître d'abord le projet. Le génie désire avoir une troupe à ses ordres, et demande en conséquence les mineurs ; l'artillerie s'oppose à les abandonner : chacun de ces deux corps, malgré leur réunion projetée, dans le cas même où elle s'opérerait, demande à les conserver ou à les attirer sur la ligne qui lui sera propre. La difficulté existante entre eux n'est donc pas encore décidée. Quel que soit le parti qu'on puisse prendre à ce sujet, les deux questions de savoir s'il est nécessaire pour le génie d'avoir une troupe à ses ordres, et si les mineurs peuvent sans inconvéniens être démembrés de l'artillerie pour être attachés à la suite du génie, subsistent en leur entier ; leur discussion peut-être pourra servir à fixer votre opinion.

» Le corps du génie par la nature de son service est destiné à fortifier nos places, à les mettre à l'abri des efforts de nos ennemis; il doit veiller à leur entretien et à leur

conservation pendant la paix; il est chargé de toutes les constructions de bâtimens militaires ; enfin c'est à lui pendant la guerre à diriger les travaux d'attaque et de défense dans les siéges qu'on aurait à entreprendre ou à soutenir; uniquement composé d'officiers faits pour commander, il manque de bras pour exécuter.

>> Pour ses constructions, pour ses plus petites réparations pendant la paix, il est obligé de recourir à des entrepreneurs dont le bénéfice nécessaire augmente toujours les dépenses; et lorsque ses officiers, par l'importance des travaux qui leur sont confiés, ne peuvent pas en surveiller eux-mêmes la totalité, ils sont forcés d'employer des piqueurs, des conducteurs d'ateliers, soldés et fournis par les entrepreneurs mêmes, par conséquent peu propres à assurer l'économie ou la solidité des ouvrages contre la négligence ou la cupidité des hommes qui les ont désignés et qui les paient. S'ils sont chargés à l'armée de conduire les sapes ou de diriger les travaux des tranchées, ils se voient contraints d'emprunter les sapeurs à l'artillerie et de demander à l'infanterie les travailleurs nécessaires à cet effet: dirigeant ainsi des hommes qui ne sont pas habitués à leur commandement et qui n'y sont soumis que momentanément, ils ne peuvent avoir sur eux la même prépondérance; les hommes les plus sûrs et les plus intelligens pour conduire les travaux ne leur sont pas toujours envoyés par l'infanterie, qui, s'en voyant privée avec peine, ne met pas une grande exactitude dans le choix de ceux qu'elle a à fournir; enfin, quelque bons qu'ils puissent être, ils ne sont que passagèrement avec eux; ils arrivent neufs à ces fonctions, etles abandonnent souvent à d'autres qu'il faut encore former dans le moment où ils pourraient, instruits par l'expérience, s'en acquitter avec le plus d'utilité.

» L'économie des travaux pendant la paix demanderait donc que les ingénieurs eussent à leur suite une troupe capable de leur fournir des bras pour exécuter ou surveiller leurs travaux; le bien du service à la guerre exigerait qu'ils eussent une troupe directement à leurs ordres, et avec laquelle ils pussent non-seulement diriger d'une manière

plus certaine les sapes, les tranchées et autres travaux de ce genre confiés à leur exécution, mais encore fortifier les camps, les postes et les positions accessoires, fouiller des localités compliquées pour en découvrir les accès, ouvrir des communications, intercepter des passages, former des abattis, rompre des chemins, procurer des inondations et les gouverner à volonté; ouvrages utiles et intéressans, pour l'exécution desquels ils n'ont jamais que des ressources d'emprunt, toujours fatigantes pour ceux qui les fournissent, et pour lesquels ils sont souvent réduits à l'inutile faculté de les concevoir sans pouvoir les entreprendre faute de

moyens.

» M. de Vauban, ce général célèbre, et dont l'opinion doit être si prépondérante sur tout ce qui peut intéresser le service du génie, avait si bien senti tous les inconvéniens résultant de ce défaut de moyens inhérens à son corps, qu'il écrivait à M. de Louvois le 2 novembre 1688, après le siége de Philipsbourg :

« J'ai encore plus de peine à trouver des sapeurs dans >> les fusiliers dont je puisse m'accommoder.

» Il serait à propos, ajoute-t-il, de former une compa»gnie de sapeurs de deux cents hommes, dans lesquels >> j'introduirais tous ceux qui me sont nécessaires pour servir » à la tranchée, soit pour la sape, soit pour poser à dé» couvert et faire les passages des fossés, régler les gabions, >> fascines et mille autres minuties qui sont absolument né» cessaires à la conduite des siéges, que je ne saurais réduire »>en sa perfection faute d'un corps dépendant de moi, dont »je puisse disposer, etc..

» l'our conclusion, si vous voyez de grandes apparences ́» de paix ne formez pas cette compagnie, parce que ce »> ne serait qu'un surcroît de peine pour moi dont je me » passerai bien; mais si vous croyez que la guerre puisse continuer ne perdez pas un moment de temps à prendre >>> les résolutions nécessaires à la mettre sur pied, du moins >> si vous voulez que je puisse continuer à servir dans des siéges de la nature de celui de Philipsbourg, qui m'a donné tant de peine que je renoncerais plutôt à toutes les for

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