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seul inspire la terreur aux malfaiteurs et aux brigands; c'est la maréchaussée. Get instrument de la loi est assez souple pour se prêter à toutes les formes que vous voudrez lui donner, assez vigoureux pour rétablir et maintenir l'ordre dans le royaume; ami de la loi, peut-être parce qu'il avait accoutumé d'en être l'organe, il a durant le cours de cette révolution contribué à maintenir l'ordre en une foule de lieux, attendant sans impatience ce qu'ordonneraient de lui vos décrets, associant avec sagesse le civisme à la rigidité, et distinguant les mouvemens tumultueux de la liberté des mouvemens désordonnés de la licence. Vos comités vous proposeront donc, messieurs, de conserver, ils vous proposeront même d'augmenter la maréchaussée: c'était déjà le vœu des peuples; les circonstances vous en font une loi. Vous lui ôterez tout ce que lui avait donné la volonté arbitraire, et qui contrasterait avec l'ordre judiciaire que vous avez établi; vous lui conserverez tout ce qui dans ses précédentes fonctions lui fournissait les moyens de suivre les traces du délit et de le constater juridiquement, tout ce qui peut lui attirer la confiance des peuples; vous l'attacherez à votre régime, et cet instrument de la loi commandée par le despotisme deviendra celui de la loi établie par la liberté. Ce sera l'objet d'un court rapport qui succédera immédiatement à celui-ci.

>>Si cette force est bien composée et bien répartie elle suffira pour rétablir l'ordre partout avec célérité. A son appui les troupes réglées pourront être requises par les corps administratifs, les municipalités et les tribunaux, et enfin les citoyens eux-mêmes seront appelés à prêter leur secours: revêtus de l'uniforme des gardes nationales, ils montreront que la dernière et la plus grande ressource de la force publique est dans la masse même des citoyens chargés de réprimer la violation de leurs lois.

Quand la force publique intérieure est créée on doit chercher par qui et sur quels principes elle doit être mise en activité. Et d'abord elle ne doit pas se mouvoir elle-même: la liberté serait perdue, l'esclavage serait bientôt établi si au milieu d'une société sans armes des hommes armés pouvaient se mouvoir, agir, contraindre sans en être requis, et com

mander en leur nom quand ils ne doivent le faire qu'au nom de la loi et lorsque les hommes de la loi l'ont voulu. Les exécuteurs de la force publique ne doivent pas même délibérer sur les ordres qu'ils reçoivent: délibérer, hésiter, refuser sont des crimes; obéir, voilà dans un seul mot tous leurs devoirs; instrument aveugle et purement passif, la force publique n'a ni âme, ni pensée, ni volonté; c'est une arme qui reste suspendue au temple de la liberté jusqu'au moment où la société qui l'a créée en demande l'usage.

» Vous avez décrété, messieurs, que la force publique serait mue à la réquisition des corps administratifs, des municipalités et des tribunaux ; vous avez voulu que ce fût l'organe dont se servirait le pouvoir exécutif pour mouvoir la force publique dans le sein de l'empire: cependant, appelé à méditer sur les moyens de lier toutes les forces au pouvoir exécutif, votre comité de constitution s'est aperçu que ce n'était ici qu'une partie d'un grand travail qui doit couronner votre ouvrage ; qu'il vous reste à composer quelques parties sur lesquelles il ne lui est pas possible de prévoir les dispositions que vous décréterez, et que la force exécutrice ne peut être que le dernier résultat de toutes les pensées, la force qui met en mouvement tous les rouages, mais seulement quand les rouages ont tous été assemblés. Vos décrets ont pourvu à l'ordre partiel, à l'ordre instant que les circonstances rendaient nécessaire à mesure que vous faisiez divers actes de création: sans doute, lorsque du faîte de la Constitution vous en contemplerez toutes les parties, lorsque vous en considé→ rerez les liaisons et le jeu, lorsque l'expérience de l'exécution partielle vous aura instruits, vous décrétérez les formes et les lois de l'exécution générale; et votre comité lui-même, instruit alors par vos décrets, devra rechercher un mode d'exécution qui puisse s'appliquer à toutes les parties, prompt comme la volonté et simple comme le mouvement.

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Cependant il peut consacrer dès aujourd'hui ce principe, que le corps législatif, qui seul représente la volonté générale, doit avoir seul la surveillance de la réquisition générale; c'est lui qui doit parler et requérir pour la nation dans ces crises extraordinaires où les pouvoirs inférieurs devien

nent insuffisans, et où la nation, alarmée ou pour son repos ou pour sa liberté, ne peut sauver le vaisseau de l'État que par la puissance et l'activité du pilote.

SECTION III. De la force publique extérieure.

Vous avez pourvu à la force publique extérieure par l'organisation de l'armée. Cette portion des citoyens mise en commission pour la défense de l'État est chargée par vous de repousser les ennemis du dehors, et d'assurer le repos de la société en veillant à ce que des étrangers ne viennent pas le troubler; toujours prête, toujours aguerrie, elle fait une 'garde sévère sur la vaste enceinte de l'empire.

■ Vous vous êtes cependant aperçu, messieurs, que l'armée que vous avez décrétée, une armée de cent cinquante mille hommes, n'est pas une force défensive suffisante dans l'état actuel de l'Europe; et soit qu'il faille écouter, soit qu'il faille dédaigner ces bruits de conspirations étrangères contre notre liberté, et ces menaces de voisins inquiets dont nous devrions d'autant moins craindre les invasions, quels qu'en puissent être les prétextes, que nous avons juré de ne prendre jamais les armes dans un esprit de conquête, il n'entre pas moins dans notre Constitution d'organiser les citoyens en un grand état de défense; et vous entendrez sans doute par-là, messieurs, de composer des corps particuliers dont le rassemblement prompt et facile présente à toutes les nations la France défendant la France, et la patrie soulevant à la fois tous ses enfans contre les perturbateurs, et dirai-je (car les vols de nation à nation ne sont qu'un plus grand brigandage) contre les voleurs et les assassins étrangers.

» Un honorable membre (1) du comité militaire vous a présenté, messieurs, un plan d'armée auxiliaire que vous n'avez pas rejeté, ét votre comité de constitution, chargé par vous de vous présenter un plan d'organisation des gardes nationaIes, a cru devoir, de concert avec le comité militaire, vous présenter une idée semblable, d'autant qu'elle entrait déjà dans

(1) M. Emmery, qui le premier présenta au comité le plan d'une armée nationale auxiliaire; il ne lut point son mémoire à la tribune.

*son plan, qu'elle en faisait même la contexture, et qu'elle y devenait une idée constitutionnelle.

» Le problème politique que vous avez à résoudre c'est de mettre la France en état de déployer tout-à-coup un si grand appareil de guerre qu'elle soit toujours sûre de l'écarter: elle doit justifier par une force immense la loi constitutionnelle qu'elle s'est imposée de ne jamais attaquer; car ce serment renferme celui de se bien défendre.

» Votre intention, messieurs, est de constituer la France sur un état de paix : la paix est l'état naturel d'une société qui se constitue: la guerre est un état contre nature; c'est un désordre, un accident, une maladie du corps politique, comme les combats entre les particuliers sont un désordre, 、une fureur. Les peuples qui se sont constitués dans un état de guerre ont bientôt péri: ceux qui ont fondé leur Constitution sur un état de paix ont subsisté long-temps, et si des guerres passagères ont quelque temps dérangé, si je puis m'exprimer ainsi, leur santé politique, le retour de la paix l'a bientôt rétablie.

>> Votre Constitution est toute fondée sur ces principes: vous avez établi un ordre intérieur; vous en avez lié toutes les parties par une correspondance exacte; vous avez appelé aux fonctions publiques les citoyens, mais des citoyens désarmés, des citoyens choisis par leurs voisins et leurs frères; vous leur avez donné des emplois pacificateurs, la police des cités, l'administration des campagnes, l'économie des déniers publics, le maintien de l'ordre, l'exécution des lois; vous avez porté surtout vos regards protecteurs sur les campagnes, dont la fécondité s'arrête aux premières alarmes de la guerre ; vous avez voulu rendre cet empire durable en intéressant tous les citoyens à sa conservation; libres d'aspirer à tous les emplois, ils choisissent et sont choisis; la loi n'est jamais que l'expression de la volonté générale; l'accès est ouvert à toutes les réclamations, et la justice s'incline pour accueillir l'infortuné et pour tendre la main à l'innocence opprimée.

Ce n'est donc pas, messieurs, un état guerrier et conquérant que vous avez voulu fonder, mais un état agricole

et commerçant, où des citoyens occupés puissent jouir en paix du fruit de leurs travaux. Un grand peuple, un peuple dont le territoire est vaste, et pour qui la nature et l'art ont déjà tout fait, ne doit pas être un peuple conquérant; défendu par lui-même et résistant par sa seule masse, il lui suffit d'en imposer à ses voisins pour être assuré de la paix son repos est celui du lion, qui n'a qu'à se lever pour inspirer la terreur.

»Si tous vos concitoyens se livraient à la profession de soldat ils auraient un état anti-constitutionnel; ils aimeraient la guerre, et vous ne voulez point de guerre; ils seraient tentés d'attaquer, et vous ne voulez que vous défendre; vous avez créé des emplois civils, et ils ne brigueraient que des emplois militaires; et cependant que deviendraient les arts si nous n'avions besoin que de fer! Pour qui prépareraient-ils la guerre si nous ne pouvons avoir d'ennemis? Qu'il serait à craindre que cette humeur belliqueuse, ne pouvant faire éruption au-dehors, ne se répandît dans le corps même, et n'y portât le désordre, la consomption et la mort! Et quel danger n'y aurait-il pas pour leur propre liberté, si, éblouis de l'éclat trompeur des armes, séduits par les idées de domination et d'oppression qu'elles inspirent, dirigés, commandés, exercés par un prince guerrier, les citoyens eux-mêmes pouvaient devenir entre ses mains un instrument de tyrannie, et réduire leur propre pays en servitude!

>> Mais si vous ne vous constituez pas sur un état d'attaque, c'est pour vous constituer mieux sur un état de défense. Chaque nation devant employer le genre de force qui est propre à sa population, à sa position, à son caractère, à sa Constitution, la France doit profiter des avantages réels qu'elle a sur tous les peuples de l'Europe: elle a une trèsgrande population; elle doit se mettre en état de la déployer tout entière: sa constitution est fondée sur les principes de l'équité naturelle; elle doit tendre à se reposer un jour sur ses propres forces: toutes les parties de l'empire sont liées et cohérentes; elle doit appeler ses forces les unes près des autres pour en former un grand moyen de résis

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