Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

arrivé dans l'Attique et dans la Béotie sa date, telle qu'elle a été fixée par Varron, et rapportée par Censorin (de Die nat. cap. 21), à 1600 ans avant la première olympiade, remonterait à 4196 ans, c'est-à-dire, à 28 ans près, à l'époque fixée pour le déluge de Noé par le texte hébraïque de la Genèse, selon le calcul d'Usserius. Varron place expressément ce déluge quatre siècles avant Inachus, et chacun sait que Varron a passé dans son tems, pour l'homme qui avait mis le plus d'érudition et de jugement dans la chronologie. Cependant il paraît, qu' Acusilas et Hellanicus, les premiers auteurs connus, qui aient parlé du déluge d'Ogygès, et d'où Platon dans le Timée, pag. m. 524, Clément d'Alexandrie, Stromat. I, p. m. 321, et Eusèbe, Præp. Ev. X, p. m. 489, ont extrait ce que nous en savons, le plaçaient cent ans après Inachus, du tems de Phoronée, par conséquent plus de cinq cents ans plus tard que Varron; mais comme ce synchronisme n'empêchait ni eux, ni plusieurs autres de faire de Phoronée le premier des hommes, on voit de suite, que les traditions qu'ils en avaient, étaient mêlées de fables, et n'appartenaient en réalité qu'à la mythologie.

Le second de ces déluges serait celui de Deucalion. Le plus ancien auteur subsistant, où nous en trouvions la mention, est Pindare, (Olymp Od. IX.) Il fait aborder Deucalion sur le Parnasse, s'établir dans la ville de Protogénie (première naissance), et y reformer son peuple avec des pierres; en un mot il rapporte déjà, mais en l'appliquant à une nation seulement, la fable généralisée depuis, comme on la voit dans Ovide, à tout le genre humain.

1 Voyez plus bas page 95, vers 399.

Cependant les plus anciens historiens grecs que le tems nous ait conservés, Hérodote, Thucidyde, Xénophon ne font mention d'aucun déluge, ni du tems d'Ogygès, ni du tems de Deucalion, bien qu'ils nomment ce dernier, et en parlent comme de l'un des premiers rois des Hellènes; ils semblent donc aussi avoir considéré ces grandes inondations, comme appartenant à des tems antérieurs à l'histoire, ou comme faisant partie de la mythologie.

Ce qu'Hérodote dit, que la Thessalie doit avoir formé un lac, avant que le Pénée se fùt ouvert une issue entre l'Ossa et l'Olympe, n'est qu'une de ces hypothèses géologiques, applicables à un pays particulier, et telles que nous en voyons tous les jours dans nos modernes. Hérodote n'en fait aucune application à Deucalion, ni à son déluge, quoique ce fût assurément une occasion bien naturelle de parler d'un semblable événement. Mais bientôt après le siècle d'Hérodote, des philosophes, pour accréditer ou des systèmes physiques, ou des romans moraux et politiques, s'emparèrent de cette tradition, et lui attribuèrent une extension plus ou moins grande, selon qu'il venait à leurs idées.

Platon, dans le Timée, n'en dit que quelques mots, pour commencer le récit de la grande catastrophe, qui, selon lui, détruisit l'Atlantide; mais dans ce peu de mots, il place le nom de Deucalion immédiatement après celui de Phoronée, et sans faire mention d'Ogygès.

Aristote, Meteor. I, 14, semble considérer le déluge de Deucalion, comme une inondation locale, arrivée auprès de Dodone et du fleuve Achéloüs, lieux différens de ceux où on la place ordinairement, quand même il s'agirait de

Dodone et de l'Achéloüs de la Phocide, ainsi que Clavier, Apollod. tome II, p. 79, me semble l'avoir bien établi.

Dans Apollodore, Bibl. l. I, §. 7, le déluge de Deucalion reprend quelque chose de sa grandeur, et tout son caractère mythologique. Il arrive à l'époque du passage de l'âge d'airain à l'âge de fer; Deucalion est le fils du Titan Prométhée, du fabricateur de l'homme; après le cataclysme, il crée de nouveau le genre humain avec des pierres; et cependant, d'après Apollodore lui-même, il n'y a d'inondé que la Grèce en dehors du Péloponnèse et de l'isthme, comme si toute la Grèce en dehors de l'isthme avait pu être inondée, sans qu'une infinité d'autres pays, et le Péloponnèse lui-même, qui n'est pas plus élevé que la Grèce, fussent inondés aussi.

Diodore, liv. I, p. m. 10, n'assigne pas à cette catastrophe des limites si étroites, puisqu'il conjecture que ses effets auraient pu s'étendre jusques vers la Haute-Égypte.

La tradition de Phrygie relative à Annacus ou Nannacus, qui fut une sorte de précurseur de Deucalion, suppose aussi, aussi, que le déluge de celui-ci s'étendit sur l'Asie Mineure, et même qu'il détruisit tout le genre humain ; car c'est après ce déluge seulement, qu'elle place Prométhée, chargé par Jupiter de reproduire l'espèce. Il est vrai que cette tradition, si différente des autres, ne nous a été conservée que par des auteurs du Bas-Empire, Étienne de Byzance (Voce Iconion), Zenodote ou Zenobius (Prov. Cent. VI, n. 10), et Suidas (Voce Nannacus). Mais Zenodote cite des auteurs plus anciens, tels qu'Hermogène, auteur d'un traité sur les Phrygiens, et Hérode le Jambographe.

Iconium, où l'on suppose que régnait Annacus, est sur le

grand plateau de l'Asie Mineure; ainsi il n'a pu être inondé, sans que la presque totalité de cette presqu'ile le fût.

C'est sur le Parnasse, qu'Apollodore, comme Pindare, fait aborder Deucalion; mais d'autres auteurs lui assignent des lieux différens. Selon Servius, ad Virg. Ecl. VI, v. 41, (tome V, page 297 de cette collection), ce fut sur le mont Athos, et selon Hygin, fab. 153, ce fut sur l'Etna qu'il trouva un refuge. D'après le récit de Lucien (de Dea Syra), il semblerait même, qu'à Hierapolis on croyait que Deucalion était descendu près de cette ville.

Le coffre qu'Apollodore, loc. cit., donne à Deucalion pour moyen de salut, les colombes par l'instinct desquelles, selon Plutarque (de Solert. Anim.), il cherchait à savoir si les eaux s'étaient retirées, les animaux de toute espèce qu'il avait embarqués avec lui, selon Lucien (de Dea Syra), sont des circonstances si manifestement empruntées de la narration de Moïse, qu'il est presqu'impossible, qu'elles n'en aient pas été tirées, soit immédiatement, soit par la connaissance que ces écrivains ont eue du récit de Bérose.

Il paraît donc certain que l'idée que l'on se faisait le plus communément, soit du déluge d'Ogygès, soit du déluge de Deucalion, était dérivée de l'ancienne tradition du déluge universel, insensiblement modifiée, diversifiée selon les lieux. Chaque colonie en avait apporté avec elle le souvenir. Mais dans ces tems, où rien n'était encore fixé par l'écriture, les prêtres chargés de conserver la mémoire des principaux faits, et sans doute de celui-là plus que d'aucun autre, le localisaient petit à petit, d'après le penchant naturel à tous les hommes de placer, près des lieux qu'ils habitent, les grands évènemens, dont ils n'ont plus qu'une

réminiscence confuse, et d'après l'intérêt encore plus naturel, que les prêtres de chaque lieu avaient d'inspirer une vénération religieuse pour leurs temples, et en les accréditant ainsi, de s'accréditer eux-mêmes.

C'est particulièrement dans cette dernière vue, qu'en beaucoup d'endroits, on montrait des ouvertures, par où l'on disait que les eaux du déluge s'étaient engouffrées : la plus célèbre était celle du Parnasse.

Il y avait, au rapport de Pausanias, (Attic. liv. I, c. 18) quelque chose de semblable à Athènes, dans un bosquet sacré, appelé Olympias. Un enfoncement d'une coudée de profondeur passait pour avoir reçu les eaux du déluge de Deucalion, et l'on y jetait chaque année des gâteaux de farine et de miel; aussi prétendait-on bien, que Deucalion avait demeuré à Athènes, qu'il y avait construit un temple Jupiter Phyxius, et que l'on y possédait son sépulcre, bien que l'on crût aussi le posséder à Pyrrha, dans la Phtyotide.

Les Hierapolitains de Syrie, selon Lucien (de Dea Syra), prétendaient de leur côté posséder l'orifice, par lequel s'étaient écoulées les eaux de ce déluge : un temple célèbre couvrait cet hiatus de la terre, où l'on jetait deux fois chaque année une grande quantité d'eau de mer, qu'il absorbait entièrement, bien qu'il fût fort étroit, ce qui prouve qu'il conduisait dans quelque grande cavité.

Ce qui est bien extraordinaire, c'est qu'on retrouve dans un de ces nombreux poëmes, ou romans versifiés, qui composent le corps de la mythologie Indienne, un personnage dont le nom et les aventures ont des rapports frappans avec le Deucalion des Grecs; c'est Deva-cala-yavana, ou, dans le langage familier, Deo-cal-yun, qui, ayant attaqué

« ZurückWeiter »