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se mettre en faveur en travaillant au mariage de l'archiduchesse Élisabeth, sœur aînée de MarieAntoinette, avec Louis XV, affaire qui fut gauchement entreprise, et que madame Du Barry n'eut pas de peine à faire échouer. J'ai cru ne devoir négliger aucun détail sur le caractère moral et politique d'un homme dont l'existence a été dans la suite si funeste à la gloire de Marie-Antoinette.

romanesque, et qu'il a racontée lui-même dans les Mémoires un peu longs, mais souvent curieux, qu'il a laissés, lui découvrit les secrets de la cour de Vienne. On trouvera dans les Éclaircissemens le récit de cette anccdote: elle se rattache à l'histoire d'une ambassade qui, quoi qu'en dise ici madame Campan, fut sans dignité peut-être, mais ne fut pas sans adresse ni sans succès dans ce genre de guerre sourde et cachée que se font les diplomates ( lettre B). Nous y joindrons un morceau curieux (lettre C) par les détails qu'il renferme sur les moyens employés autrefois à Vienne, à Londres, à Paris, dans toutes les cours, et surtout par Louis XIV, par Marie-Thérèse et Louis XV, pour gager des espions intelligens, corrompre la fidélité des commis, surprendre le secret des chiffres, et violer celui des lettres moyens honteux, mais utiles, que la probité repousse, dont les gouvernemens rougissent, sans doute, et qu'ils feraient encore mieux de ne pas employer.

(Note des édit.)

CHAPITRE III.

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· Elle

Arrivée de l'archiduchesse en France. Madame de Noailles, sa dame d'honneur. - Comment elle s'attira le surnom de madame l'Étiquette. Brillante réception de la dauphine à Versailles. Sa beauté, sa franchise; grâce et noblesse de son maintien. Elle charme Louis XV. Jalousie de madame Du Barry. Événement malheureux de la place Louis XV. - Trait de sensibilité de la dauphine. - Mot spirituel. Anecdotes. fait son entrée à Paris. Enthousiasme des habitans. Froideur du dauphin. - Intrigues de cour. Société intime du dauphin, des princes ses frères, et de leurs épouses. — Les trois princesses et les deux frères du dauphin jouent la comédie en cachette. Singulière circonstance qui interrompt ce genre Les courtisans se rapprochent de Maric-Antoinette et du dauphin.

d'amusement.

On avait préparé, sur les frontières auprès de Kell, un superbe pavillon composé d'un très-vaste salon qui communiquait à deux appartemens: l'un où devaient se tenir les dames et les seigneurs de la cour de Vienne, l'autre destiné à la suite de la dauphine, composée de madame la comtesse de Noailles, sa dame d'honneur; madame la duchesse de Cossé, sa dame d'atours; quatre dames du palais, M. le comte de Saulx-Tavannes, chevalier d'honneur; M. le comte de Tessé, premier écuyer; M. l'évêque de Chartres, premier aumônier, les officiers des gardes-du-corps et les écuyers.

Lorsqu'on eut entièrement déshabillé madame la dauphine, pour qu'elle ne conservât ricn d'une cour étrangère, pas même sa chemise et ses bas (étiquette toujours observée dans cette circonstance), les portes s'ouvrirent; la jeune princesse s'avança, cherchant des yeux la comtesse de Noailles, puis s'élança dans ses bras, en lui demandant, les larmes aux yeux, et avec une franchise qui partait de son cœur, de la diriger, de la conseiller, d'être en tout son guide et son appui. On ne put qu'admirer cette marche aérienne : on était séduit par un seul sourire; et dans cet être tout enchanteur, où brillait l'éclat de la gaieté française, je ne sais quelle sérénité auguste, peutêtre aussi l'attitude un peu fière de sa tête et des épaules, faisait retrouver la fille des Césars.

En rendant justice aux vertus de la comtesse de Noailles, les gens sincèrement attachés à la reine ont toujours regardé comme un de ses premiers malheurs, peut-être même comme le plus grand qu'elle pût éprouver à son entrée dans le monde, de n'avoir pas rencontré, dans la personne naturellement placée pour être son conseil, une femme indulgente, éclairée, et unissant à des avis sages cette grâce qui décide la jeunesse à les suivre. Madame la comtesse de Noailles n'avait rien d'agréable dans son extérieur; son maintien était roide, son air sévère. Elle connaissait parfaitement l'étiquette; mais elle en fatiguait la jeune princesse sans lui en démontrer l'importance. Toutes ces formes étaient

gênantes à la vérité; mais elles avaient été calculées sur la nécessité de présenter aux Français tout ce qui peut leur commander le respect, et surtout de garantir une jeune princesse, par un entourage imposant, des traits mortels de la calomnie. Il aurait fallu faire sentir à la dauphine, qu'en France sa dignité tenait beaucoup à des usages qui n'étaient nullement nécessaires à Vienne pour faire respecter et chérir la famille impériale par les bons et soumis Autrichiens. La dauphine était donc perpétuellement importunée par les représentations de la comtesse de Noailles, et en même temps excitée par l'abbé de Vermond à tourner en dérision et les préceptes sur l'étiquette et celle qui les donnait. Elle écouta plutôt la raillerie que la raison, et surnomma madame la comtesse de Noailles: madame l'Étiquette. Cette plaisanterie fit présumer qu'aussitôt que la jeune princesse agirait selon ses volontés elle se soustrairait aux usages imposans (1).

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(1) Madame la comtesse de Noailles, dame d'honneur de la reine, était remplie de vertus; la piété, la charité, des mœurs irréprochables faisaient d'elle une personne vénérable; mais tout ce qu'un esprit exactement borné peut ajouter d'importun, même aux plus nobles qualités, la dame d'honneur en était abondamment pourvue. L'étiquette était pour elle une sorte d'atmosphère: au moindre dérangement de l'ordre consacré, on eût dit qu'elle allait étouffer. Il eût fallu à la reine une dame d'honneur qui lui fît bien connaître l'origine de ces étiquettes, à la vérité très-gênantes, mais érigées comme une barrière imposante contre la malveillance. L'usage d'avoir des dames et des chevaliers d'honneur, celui de

Les fêtes qui eurent lieu à Versailles, pour le mariage du dauphin, furent très - brillantes. La dauphine y arriva pour l'heure de sa toilette, après avoir couché à la Muette, où Louis XV avait été la recevoir, et où ce prince, aveuglé par un sentiment indigne d'un souverain et d'un père de famille, avait fait souper la jeune princesse, la famille royale et les dames de la cour avec madame Du Barry.

La dauphine en fut blessée; elle en parlait assez ouvertement dans son intérieur, mais elle sut dissimuler son mécontentement en public, et son maintien fut parfait (1).

porter des vertugadins de trois aunes de tour, a sans doute été inventé pour donner à nos jeunes princesses un entourage si respectable que la malicieuse gaieté des Français, leur penchant au dénigrement et trop souvent à la calomnie, ne pussent trouver l'occasion de les attaquer.

La comtesse de Noailles tourmentait sans cesse la reine par mille représentations sur ce qu'elle aurait dû saluer celui-ci de telle façon, celui-là de telle autre. Paris sut que la reine l'avait nommée madame l'Étiquette; selon la disposition des esprits, les uns approuvèrent ce sobriquet, les autres le blâmèrent, mais tous jugèrent les dispositions de la jeune reine à s'affranchir d'entraves fatigantes. (Note de madame Campan.)

(1) Voyez les Mémoires de Weber, T. Ier. *. En général, les Mémoires de cet écrivain qui était frère de lait de Marie-Antoinette, complètent ce que madame Campan a dit de cette princesse : les deux ouvrages sont presque inséparables.

(Note des édit.)

* 2 vol. in-8° qui font partic de la Collection, mais qui se vendent aussi séparément.

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