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Église, et qu'il envoie un de ses anges devant vous pour vous préparer les chemins du ciel.

Votre très-obéissant fils en Jésus-Christ,

Vienne, juillet 1784.

JOSEPH.

A une dame.

Madame,

Vous connaissez mon caractère ; vous n'ignorez pas que la société des dames est pour moi une simple récréation, et que je n'ai jamais sacrifié mes principes au beau sexe; j'écoute peu les recommandations, et je ne les prends en considération que lorsque le sujet, en faveur duquel on me sollicite, a un vrai mérite.

Deux de vos fils sont déjà comblés de faveurs. L'aîné, qui n'a pas encore vingt ans, est chef d'escadron dans mon armée, et le cadet a obtenu, de l'électeur mon frère, un canonicat à Cologne. Que voulez-vous donc de plus? Ne faudrait-il pas que le premier fût déjà général, et que le second eût un évêché?

En France, on voit des colonels en lisière, et en Espagne les princes royaux commandent, même à dix-huit ans, des armées; aussi le prince de Stahrenberg les força-t-il tant de fois à la retraite, que, durant leur vie entière, ces messieurs ne purent plus concevoir une autre manœuvre.

Il faut être sincère à la cour, sévère en campagne, stoïcien sans dureté, magnanime sans faiblesse, et obtenir l'estime de ses ennemis même par des actions justes, et c'est le but, Madame, auquel je veux atteindre.

Vienne, septembre 1787.

JOSEPH.

(Extrait des Lettres inédites de Joseph II, publiées à Paris chez Persan, 1822.)

Note (Q), page 201.

« MAUREPAS (Jean-Frédéric Phelippeaux, comte de), issu d'une famille originaire de Blois, reconnue comme noble depuis 1399, était fils de Jérôme, ministre et secrétaire d'État, petit-fils du chancelier de Pontchartrain, dont le père et l'aïeul avaient été eux-mêmes dans le ministère; en sorte que ces places restèrent dans la même famille pendant cent soixante- onze ans (depuis 1610 jusqu'en 1781). Le comte de Maurepas, né en 1701, avait été chevalier de Malte de minorité. A l'âge de quatorze ans, il fut pourvu de la charge de secrétaire d'État, à la place de son père qui venait de donner sa démission. Le marquis de la Vrillière fut chargé d'exercer la charge, et de former aux détails de l'administration ce jeune ministre, son parent, et peu après son gendre. Le comte de Maurepas perdit son beau-père en 1725, et c'est alors seulement que commença son ministère, qui embrassa plusieurs grandes provinces, Paris, la cour et la marine. Il n'avait encore que vingt-quatre ans, et ce fut alors qu'il développa réellement ce caractère léger, insouciant et frivole dont il ne se corrigea, ni par les leçons de la disgrâce, ni par la maturité de l'âge, dans le cours d'une existence brillante que la nature et la fortune prolongèrent à l'envi jusqu'à une époque très-avancée. Un de ses contemporains le dépeint ainsi : « Superficiel et incapable d'une

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application sérieuse et profonde, mais doué d'une facilité » de perception et d'une intelligence qui démêlait dans un » instant le nœud le plus compliqué d'une affaire, il suppléait dans les conseils, par l'habitude et la dextérité, à ce qui lui manquait d'étude et de méditation. Accueillant et doux, souple et insinuant, flexible, fertile en ruses pour l'attaque, en adresse pour la défense, en faux-fuyans » pour éluder, en détours pour donner le change, en bons >> mots pour démonter le sérieux par la plaisanterie, en ex

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T. I.

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pédiens pour se tirer d'un pas difficile et glissant: un œil » de lynx pour saisir le faible ou le ridicule des hommes; » un art imperceptible pour les attirer dans le piége, ou les amener à son but; un art encore plus redoutable de se jouer de tout, et du mérite même, quand il voulait le dépriser; enfin l'art d'égayer, de simplifier le travail du cabinet, faisait de M. de Maurepas le plus séduisant des

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» ministres. >>

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On le crut un grand homme d'État, parce qu'il avait fait quatre vers assez méchans contre une favorite détestée. « S’il » n'avait fallu, dit Marmontel, qu'instruire un jeune prince à manier légèrement et adroitement les affaires, à » se jouer des hommes et des choses, et à se faire un amu»sement du devoir de régner, Maurepas eût été, sans au» cune comparaison, l'homme qu'on aurait dû choisir. » Peut-être avait-on espéré que l'âge et le malheur auraient » donné à son caractère plus de solidité, de constance et d'énergie; mais naturellement faible, indolent, person» nel, aimant ses aises et son repos, voulant que sa vieillesse » fût honorée et tranquille, évitant tout ce qui pouvait >> attrister ses soupers ou inquiéter son sommeil, croyant à peine aux vertus pénibles, et regardant le pur amour du » bien public comme une duperie ou comme une jactance; » peu jaloux de donner de l'éclat à son ministère, et faisant >> consister l'art du gouvernement à tout mener sans bruit, » et consultant toujours les considérations plutôt que les principes, Maurepas fut dans sa vieillesse ce qu'il avait été » dans ses jeunes années, un homme aimable, occupé de » lui-même, et un ministre courtisan. » (Biographie universelle, t. XXVII. )

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Note (R), page 228.

« MARIE-ANTOINETTE ne pouvait pas être accusée de démentir sur le trône l'idée avantageuse qu'on s'était faite de ses vertus

dans un rang moins élevé. Elle continua également à montrer, dans l'intérieur de sa cour, la même aversion pour l'étiquette. Elle ne discontinua ni ses promenades à pied, ni ses voyages à Paris. Hors des solennités, elle aimait à s'habiller avec la plus grande simplicité, mais l'air de dignité qui lui était particulier, laissait toujours deviner son rang.

On commença à censurer vivement cette simplicité, d'abord parmi les courtisans, ensuite dans le reste du royaume; et par une de ces contradictions, qui sont plus communes en France qu'ailleurs, en même temps qu'on blâmait la reine, on la copiait avec fureur. Chaque femme voulait avoir le même déshabillé, le même bonnet, les mêmes plumes qu'on lui avait vus. On courait en foule chez une dame Bertin, sa marchande demodes; ce fut une véritable révolution dans l'habillement de nos dames, qui donna une sorte d'importance à cette femme. Les robes traînantes, toutes les formes qui pouvaient donner une certaine noblesse aux parures, furent proscrites; on ne distingua plus une duchesse d'une actrice.

La folie gagna les hommes; les grands avaient depuis long-temps quitté les plumets, les touffes de ruban, les galons au chapeau, pour les laisser à leurs laquais. Ils quittèrent alors les talons rouges et les broderies sur les habits; ils se plurent à parcourir nos rues, vêtus d'un gros drap, un bâton noueux à la main, et chaussés avec des souliers épais.

Cette métamorphose valut à plus d'un d'entre eux des aventures humiliantes. Jetés dans la foule, et n'ayant rien qui les distinguât des hommes du peuple, il arriva que des rustres prirent querelle avec eux, et, dans ce genre de combat, ce n'était pas le noble qui avait la supériorité. Voilà comme insensiblement le second ordre se dépouillait de la considération qu'on lui avait toujours portée, et avançait le règne de cette égalité qui lui a été si funeste.

Ces changemens avaient un inconvénient plus grave encore, en ce qu'ils influèrent considérablement sur les mœurs; car,

d'une part, on prit trop de goût pour les manières, les habitudes du peuple, ainsi que pour les maximes démocratiques qui mettaient tout de niveau, tandis que, de l'autre, on l'accoutumait au mépris, à l'insubordination, à l'insolence. C'est une grande leçon pour ceux qui règnent. Ils oublient trop souvent qu'on ne fait rien de bon, si on ne connaît parfaitement le génie de la nation qu'on gouverne; et qu'il en est des usages imités par les peuples voisins, comme de certaines plantes qui, en changeant de climat, deviennent vénéneuses. » (Histoire de Marie-Antoinette, par Montjoie.)

Note (S), page 230.

«La reine, dans le choix de ses divertissemens, ne se montrait pas plus soumise au cérémonial; on jouait la comédie dans l'intérieur de ses appartemens: elle ne dédaignait pas d'y accepter des rôles, et ces rôles n'étaient pas les plus nobles; elle jouait aussi dans des opéras-comiques. Ce genre d'amusement fut, comme la simplicité de ses habits, blâme et imité le goût pour les représentations théâtrales passa dans toutes les classes de la société ; il n'y eut pas un homme de qualité, pas un financier, pas un bourgeois un peu aisé, qui ne voulût avoir chez lui une salle de spectacle, et y copier les manières des acteurs. Autrefois un simple gentilhomme eût été déshonoré, si l'on eût cru qu'il se fût métamorphosé en comédien, même dans l'intérieur d'une maison. La reine ayant détruit, par son exemple, ce préjugé salutaire, le chef mêine de la magistrature, oubliant la dignité de sa place, apprit par cœur, et joua des rôles bouf

fons.

Cette manie, devenant générale, combla peu à peu l'intervalle qui avait toujours séparé les comédiens des autres classes de la société : on les fréquenta plus que jamais, et les mœurs ne gagnèrent pas à ce rapprochement.

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