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croire qu'on l'étoit, & croire en même tems qu'on feroit fauvé (a), & que quiconque croyoit qu'il étoit juftifié & qu'il feroit fauve, non feulement étoit justifié, mais feroit certainement fauvé (b), ďoù il concluoit que la juftice étoit inamiffible, c'eft-à-dire qu'un homme en état de grace, y étoit pour toujours & ne pouvoit en décheoir.

La foi que Calvin appelle néceffaire & fuffifante pour la juftification, confifte donc à croire fermement qu'on eft juftifié & qu'on fera fauvé. Il inféra cette doctrine dans l'accord qu'il dreffa en 1559, entre les églifes de Geneve & de Zurich. Elle eft exprimée dans la profeffion de foi, rédigée au fynode de Dordrect (c), ainfi que dans celle de Frederic III, comte palatin, & zélé calvinifte. On trouve sa profeffion de foi dans le recueil de Geneve (d), & on lit ce qui fuit:

Je crois que Dieu veut me donner gratuitement la juftice de Jésus-Chrift, enforte que je n'ai point à appréhender les jugemens de Dieu.

Je crois que je fuis un membre vivant. & perpétuel de l'églife.

Calv. inft. lib. 3, cap. 2.

b) Antidotum concil. trid. lib. 6, cap. 13.

(c) Conf. Tigur. & Gen. opufcula Čalvini, pag. 754 (d) 2 part. pag. 149 & 158.

Enfin je crois très-certainement que je ferai Sauvé.

Voilà, Monfieur, ce que les fondateurs de la réforme ont enfeigné fur la juftification. Vous en avoit-on parlé?

LE PROTESTAN T.

Je n'avois jamais entendu dire que Calvin& Luther euffent nié la liberté de l'homme. J'ignorois pareillement que Calvin eût foutenu que le jufte ne peut perdre la juftice. Je vous avoue que ces deux principes me femblent également déraisonnables. Quant à l'inamiffibilité de la justice, il est évident que l'homme le plus vertueux peut tomber dans un péché grief, & alors il ceffe d'être jufte. Comment continueroit-il d'être aimé de Dieu après l'avoir ainfi outragé? David en commettant un adultere ne ceffa-t-il pas d'être jufte? Cette doctrine de Calvin me paroît d'ailleurs auffi dangereufe pour les mœurs que contraire à la vérité.

Mais quant aux deux autres points que vous venez de m'expliquer, que la foi fuffit pour la juftification, & que la juftice de l'homme n'eft pas la fienne, mais celle de Jésus-Chrift, je me rappelle d'en avoir entendu parler à nos miniftres. Comme ce font des chofes difficiles à entendre, je ne les avois jamais bien comprises, mais

puifqu'elles font un fujet de divifion entre les catholiques & les proteftans, j'efpere que vous voudrez bien me donner encore quelque inftruction à cet égard,

LE DOCTEUR.

Je vais d'abord vous montrer que la foi ne fuffit pas au pécheur pour rentrer en grace avec Dieu.

La foi eft une vertu furnaturelle qui foumettant notre esprit à Dieu, nous fait croire tout ce qu'il a révélé : or il est évident que cette vertu n'eft pas fuffifante pour la juftification.

Suivant la doctrine catholique expliquée par le concile de Trente, la foi eft la Jource & le fondement de la juftification parce que fans la foi nous ne pouvons avoir les autres difpofitions furnaturelles dont nous avons befoin pour être juftifiés, mais elle ne nous fuffit pas.

En confultant d'abord la raison, on ne conçoit pas pourquoi le regret d'avoir offenfé Dieu, l'efpérance du pardon, les œuvres de pénitence, la priere &c. ne Teroient pas du nombre des difpofitions à la juftification. On ne conçoit pas comment un pécheur pourroit être réconci lié avec Dieu, fans une réfolution fincere de ne plus l'offenfer, fans douleur de l'avoir outragé, fans espérance en fes

miféricordes: or un pécheur peut avoir la foi fans ces difpofitions, & par conféquent fi le fyftême dont nous parlons étoit vrai, il pourroit obtenir le pardon fans avoir aucune de ces difpofitions.

Mais fi la doctrine des proteftans ne s'accorde pas avec la raifon, elle s'accorde encore moins avec la croyance chrétienne. Confultons l'écriture, elle va nous apprendre ce que Dieu exige du pécheur avant de lui pardonner. Ecoutons ce qu'il dit par la bouche du prophete Joël: Convertiffez-vous & venez à mai (a): or comment doit fe faire cette converfion ce retour à Dieu ? Eft-ce uniquement par la foi? Non. Convertinez-vous de tout votre cœur, par les jeûnes, par les larmes par les gémillemens. Il ne fuffit pas de déchirer vos vêtemens, brifez vos cœurs.

Ifaïe promet aux pécheurs, de la part de Dieu, le pardon de leurs crimes; mais à quelle condition? Ceffez, leur dit-il, de faire le mal, apprenez à faire le bien, affiftez Topprimé (b).

Daniel confeille à Nabuchodonozor de racheter fes péchés par des aumônes. (c). Si Jean-Baptifte prêche dans le défert, il annonce aux Juifs la rémiffion des pé

a) Joel. c. 2. v. 10. (b) Ifaïe, c. 1, v. 16. (c) Dan, 4, 24.

chés, & il les avertit de fe préparer par une fincere pénitence (a).

Mais écoutons Jésus-Chrift lui-même : S. Matth, rapporte qu'il commença à prêcher & à dire : Faites pénitence, car le royaume des cieux eft proche (b)..

S. Paul difoit aux Athéniens (c): Dieu annonce aux hommes qu'il faut que tous, en tous lieux, faffent pénitence.

Comment voyons-nous dans l'écriture que les pécheurs rentrent en grace avec Dieu ? Que font les Ninivites pour écarter les maux dont le prophete Jonas les menace? Ils prient, ifs jeunent, ils implorent la miféricorde du Seigneur.

Magdeleine obtient la rémiffion de fes péchés par l'ardeur de fa charité. Beaucoup de péchés lui font remis, dit JefusChrift, parce qu'elle a beaucoup aimé (d).

Le publicain prioit dans le temple, il en fortit juftifié: mais comment obtint-il le pardon de fes péchés? Ce fut par fon humilité & fa contrition. Ah! feigneur, difoit-il en frappant fa poitrine, n'ofant lever les yeux ni s'approcher vers le haut du temple, feigneur, faites-moi miféricorde, je fuis un grand pécheur. (e)

) Math. c. 3, v. 2 & S.

(b) c. 4, v. 17.

(c) A&t. c. 17, v. 30.

(d) Luc. 7, v. 47.

(e) Luc, 18, v. 13 & 14.

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