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» actions fe font néceffairement; c'eft Dieu » qui fait en lui le mal & le bien. Quand » vous commettez un péché, c'est que » vous ne pouviez l'éviter. Cependant » en le commettant, vous méritez que » Dieu vous condamne aux flammes éter» nelles ». Si, dis-je, un prédicateur parloit de la forte, tout auditeur de bon fens feroit tenté de lui répondre «<: S'il ne me » refte aucune liberté, il eft inutile que » je vienne à vos inftructions: mais quoi » que vous en difiez, je fens que je fuis » libre, & fi j'offense Dieu, les remords » de ma confcience m'avertiffent affez » que je pouvois résister à la tentation ».

Dans tous les pays & dans tous les tems on a décerné des récompenfes pour ceux qui feroient le bien, & des fupplices pour les criminels. Tout le genre humain a donc toujours cru que l'homme eft libre. Otez la liberté, on ne peut plus ni blâmer, ni louer, ni punir, ni récompenfer perfonne. Dieu, dites-vous, fait en nous le mal & le bien; mais s'il fait le mal, comment eft-il infiniment faint, infiniment parfait ? Vous prononcez un blafphême. Comment d'ailleurs pourroit-il, fans injuftice, me condamner à des feux éternels, pour avoir omis ce que je ne pouvois faire, ou pour avoir fait ce dont je ne pouvois m'abstenir? Tout maître prêt à frapper fson es

clave qui n'a pas exécuté fes ordres, est défarmé par cette réponse, fi elle est véritable: Il ne m'a pas été poffible de le faire.

Cet article de la doctrine des fondateurs de la prétendue réforme eft non feulement faux, mais fcandaleux, deftructif de tout bon ordre, puifqu'il tend manifeftement à difculper tous les coupables & à juftifier toutes fortes de crimes. II n'y a aucun homme au monde qui ne croie éviter le blâme d'une action, & qui ne foit réellement regardé comme excufable dès qu'il peut dire avec vérité : Je n'ai pu faire autrement.

Cette erreur de Luther & de Calvin eft tellement oppofée à la foi & à la raifon, que quoiqu'ils fe foient efforcés de l'établir comme un des points capitaux, cependant on ne l'enfeigne plus dans les fectes qu'ils ont fondées: on y enfeigne même le contraire. Voyez le catéchisme des calviniftes imprimé à Geneve en 1770, lifez la page 55; on y fait cette demande : Dieu eft-il l'auteur du mal que les hommes font? On répond, Non, & ce feroit une impiété de le croire.

Mais cette impiété a été enfeignée par Luther & Calvin; cependant on vous les donne pour des envoyés de Dieu.

LE PROTESTAN T.

Je fuis très-perfuadé de tout ce que

vous venez de dire concernant la liberté; paffons, fi vous le voulez bien, à ce qui regarde la juftification.

LE DOCTEUR.

Avant de vous expliquer cette matiere abstraite, je vous prie d'obferver qu'il y a trois principes de la doctrine catholique, que Luther n'entreprit point d'ébranler; les voici :

1o. L'homme eft en état de grace ou en état de péché; il est ami ou ennemi de Dieu.

2o. Il ne peut paffer de l'état du péché à celui de la grace, qu'en vertu des mérites de Jéfus-Chrift.

3°. Ce changement par lequel l'homme paffe de l'état de péché à l'état de grace, eft ce qu'on appelle juftification. Et cette juftification eft gratuite, c'est-à-dire, fans qu'il la doive, aux difpofitions du pécheur pénitent, parce que de toutes les actions que nous pouvons faire avant que d'être justifié, il n'y en a point qui mérite la grace de juftification, quoiqu'elles puiffent y difpofer quand elles ont la grace pour principe. Dieu accorde cette grace de juftification par un effet de fa miféricorde.

Sur ces trois points les proteftans & les catholiques font d'accord; mais ils ne le font pas fur ce qui regarde la nature

de la juftification & les difpofitions qu'il faut y apporter.

Luther & Calvin ont enfeigné que ce qui nous rend juftes n'eft point en nous; que notre juftice eft celle de Jésus-Christ même, qui nous eft imputée, & que nous fommes juftifiés fans qu'il fe faffe en nous aucun changement.

Quant aux difpofitions néceffaires pour être justifiés, Luther & Calvin ne pouvoient guere en reconnoître, après avoir foutenu que l'homme n'étoit pas libre & même qu'il péchoit dans toutes fes actions. Cependant ils ont dit que la foi étoit néceffaire pour que nous fuffions juftifiés; mais ils ne l'entendoient pas comme l'entendent les catholiques, qu'elle est une véritable difpofition; ils la regardoient feulement comme un inftrument par lequel nous recevons la juftification. Quoi qu'il en foit & en quelque fens qu'ils l'aient entendu, ils ont reconnu que la foi étoit néceffaire pour la juftification; mais en même tems ils ont contredit la doctrine de l'église catholique en deux points très-importans.

1°. Les catholiques ont toujours cru que la foi étoit néceffaire au pécheur pour qu'il rentrât en grace avec Dieu: mais qu'outre la foi, il falloit avoir d'autres difpofitions, telles que le regret fincere d'avoir offenfé Dieu, l'efpérance du par

don, &c. au lieu que Luther & Calvin ont enfeigné que la foi feule étoit fuffifante pour que nous fuffions juftifiés.

la

2°. Quand les catholiques difent que foi eft une des difpofitions à la juftification, ils entendent par la foi ce qu'on entend fuivant le fens ordinaire de ce terme, c'eft-à-dire, la vertu furnaturelle qui nous fait croire tout ce que Dieu a révélé: au lieu que quand Luther & Calvin parlent de la foi néceffaire pour la juftification, par cette foi ils entendent la fimple perfuafion & croyance qu'on eft justifié.

Voici comment Luther s'exprime en différens endroits de fes ouvrages: On eft justifié, dit-il, dès qu'on croit avec certitude qu'on l'eft réellement. )

a

Le pécheur doit le croire de la même foi dont il croit que Jésus-Chrift eft venu au monde. (b)

Il ajoute ailleurs: Maudit foit celui qui ne fe mettra pas du nombre des faints. Croyez, & dès-lors vous êtes auffi faint que S. Pierre.

Ainfi quand Luther dit que la foi juftifie, il entend que pour être juftifié, il fuffit de croire fermement qu'on l'eft.

Calvin adopta ce principe de Luther, en ajoutant que pour être juftifié, il falloit

(a) Luth. opera, tom. 1, prop. 15, 18.
(b) Serm. de indulg.

croire

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