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il n'y auroit pas eu de tous les tems, fur ce point capital, tant de difficultés.

Recourir pour cela à la perfuafion intérieure de l'efprit faint, c'eft donner ouvertement dans l'enthousiasme & le fanatifme; & ce qui démontre la fauffeté de ce fyftême, c'est que fi cette perfua fion provenoit du Saint Esprit, elle feroit uniforme dans ceux qu'il infpireroit. Cependant ceux qu'au jugement de nos freres féparés, il a le plus conftamment éclairés, Luther & Calvin, n'ont eu ni la même inspiration, ni le même rayon, puifque Luther rejette l'épître de S. Paul aux Hébreux, celle de S. Jacques & l'apocalypfe, tandis que Calvin admet ces

trois livres.

N'y cherchons au refte ni rayon ni goût furnaturel: les hérétiques ont rejeté ceux des livres facrés qui leur déplaifoient, parce qu'ils nuifoient à leur doctrine, comme par exemple, Luther les; livres des Machabées, parce qu'ils font mention de la priere pour les défunts, l'épître de S. Jacques, parce qu'elle parle, de l'extrême-onation, &c.

Il est constant qu'ils ne peuvent avoir fur la substance des livres, ni fur l'intégrité de leurs textes., ni fur la fidélité de Teur traduction, que de l'incertitude, & dèslors que deviendra la certitude de leur foi?

II. Mais un point plus général encore, c'eft qu'il eft impoffible qu'aucun homme foit affuré , par la feule écriture véritable fens de fes textes.

du

La foi, vous ai-je déja dit, Monfieur, doit être certaine, & auffi certaine que foumife: cette certitude doit l'emporter même, au jugement des théologiens, fur celle que peuvent donner à l'homme le témoignage de fes fens, & le jugement de fa raifon : elle doit nous mettre dans la difpofition fincere de donner, s'il le faut, & quand il le faudra le faudra, notre fang & notre vie, ainfi que l'ont fait tant de milliers de martyrs, pour profeffer & défendre la foi. Elle doit s'appliquer à chacun des mysteres, à l'unité d'un Dieu, à la trinité des perfonnes, à la divinité du verbe, en un mot à toutes les vérités que nous enfeigne la religion.

Or c'eft cette certitude qu'il eft abfolument impoffible d'avoir par la feule écriture, & en voici la raifon.

C'eft que fur les points conteftés le fens des textes qu'on allegue de part & d'autre, eft obfcur & douteux il eft obfcur puifqu'on en difpute, & l'on ne difpute pas fur ce qui est clair.

On en difpute, & qui? des docteurs, des gens d'efprit; car fi nous ne devons pas refufer des lumieres à des hommes capables

capables de fe former dans l'église & contre l'églife des partis fi confidérables, à un Arius, à un Neftorius, à un Luther, à un Calvin ceux-ci ne doivent pas traiter de ftupides tous les pafteurs, tous les docteurs catholiques & tous les peres.

D'ailleurs, ce font ici des affaires capitales, fur lefquelles, pour prévenir les héréfies, pour les arrêter, les éteindre, on a toujours fait tant d'écrits, tenu tant de conférences, convoqué tant de conciles, qu'on eft forcé de reconnoître que les questions ont été difcutées avec toute la maturité poffible; cependant on n'a jamais pu s'accorder fur le fens des textes de la fainte écriture, fur lefquels fe fondoient les défenfeurs des fentimens divers: donc ce fens eft obfcur.

Mais dès qu'il eft obfcur, & qu'on n'a pour lever cette obfcurité que fes propres lumieres, il eft impoffible de pouvoir fixer ce fens avec certitude.

Il faut même obferver encore, qu'il ne s'éleve de grandes héréfies que fur des points au fujet defquels on trouve des textes véritablement obfcurs, parce que c'est là feulement ce qui peut partager les efprits, tout comme il n'y a de grands procès que fur les causes vraiment litigieufes. C'est donc principalement alors

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que pour difcerner, dans ces débats difficiles, le vrai fens des textes allégués de part & d'autre, on a befoin d'une regle bien affurée; & où fera-t-elle s'il faut que chacun s'en rapporte à son opinion? LE PROTESTAN T.

Je fens bien, Monfieur, toute la force de vos raisons, & je ne fais pas ce que nos miniftres pourroient y répondre : c'est un point dont je ne les ai jamais entendu parler.

LE DOCTEUR.

Preffés par l'évidence, ils font enfin convenus qu'ici la raifon ne fe fuffifoit point à elle-même, que pour difcerner avec certitude le vrai fens des textes difficiles de l'écriture, on avoit befoin de quelque affiftance du faint Efprit : mais cet aveu n'a fait que manifefter leur embarras, fans les en tirer.

Les uns ont prétendu, avec le ministre Claude, comme je viens de vous le dire, que cette affiftance confiftoit dans un certain goût, un inftinct infpiré par l'Efprit faint, pour difcerner le véritable fens des textes.

Les autres ont eu recours à une infpiration immédiate, accordée par l'Esprit faint, foit à tous ceux qui cherchent fincérement la vérité, foit felon quelques

uns, aux feuls prédestinés: mais on fent bien que ce font là des allégations gratuites & fans fondement.

Pour rendre tout ceci plus fenfible, fuppofons qu'au commencement du quatrieme fiecle, & avant la décifion du concile de Nicée, un arien & un catholique entrent en difpute fur la divinité du verbe. L'arien fe fonde fur ce paffage Le pere eft plus grand que moi (a), & il en conclut que le pere & le fils ne font pas un même Dieu.

Le catholique interprete ce texte, feulement de la nature humaine, felon laquelle effectivement le fils eft moindre que le pere; mais l'arien perfifte à vouloir l'entendre du fils, quant à fes deux natures, parce qu'il a dit fans diftinction que le pere étoit plus grand que lui.

Le catholique à fon tour lui allegue cet autre paffage, Mon pere & moi nous ne fommes qu'un (b): mais l'arien l'interprete d'une union non pas de nature, mais de confentement, de bon accord, dans le même fens que Notre Seigneur difoit en priant fon pere pour ses difciples: Faites mon pere, qu'ils foient un entr'eux, comme nous fommes un vous &

(a) Joan. 14. 28. (b) Ibid. 10. 30.

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