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expliquer l'Evangile? cela eft autant de fon Miniftere: on n'ofe cependant pas le foutenir, c'est que l'expérience prouveroit le contraire; je dirai bien ce qui eft au centre de la terre, je le détaillerai même fi on veut par ce que perfonne ne pourra me convaincre de faux, mais je ne ferai pas affez fol pour dire ce qui eft dans la poche de mon voifin.

Des livres, des difcours ne font pas. une voie fûre, Dieu en a pû prendre une autre meilleure, & il ne l'auroit pas fait ?

Dieu eft infiniment jufte, c'eft-à-dire il ne peut demander que ce qui eft poffible & raifonnable, & traiter chacun fuiyant fes mérites; le mérite des actions réfulte de leur conformité avec la Loi, & leur malice du contraire; la Loi eft la volonté du légiflateur rendue intelligible à ceux pour qui elle eft faite, autant qu'il eft en fa puiffance; la volonté de Dieu n'eft pas rendue intelligible aux hommes autant qu'il eft en fa puiffance, quand elle n'eft exprimée que par des liyres qui peuvent être altérés & contes tés, & par la bouche des hommes qui peuvent fe tromper eux-mêmes & en impofer aux autres pour leur propre in térêt,

Quant au livre il faudroit que chaque particulier né & à naître le tint immédiatement de Dieu, écrit en fa propre langue, que chaque homme le fût lire naturellement & que ce livre fût clair, fans équivoque, enforte que l'on n'eût befoin d'aucune interprétation.

Ou Dieu n'a point donné de Loi aux hommes, ou il leur en a donné une intelligible & non matérielle, une Loi toujours préfente qui parle à l'efprit & à la volonté, une Loi à portée & connue des fourds & des aveugles, qui ne laiffe point de lieu à l'ignorance; en un mot une Loi publiée & intimée à chaque homme. Voilà ce qui eft conforme à la bonté à la fageffe & à la juftice d'un être tel qu'on nous peint Dieu; il eft indigne de lui de faire des loix, d'inftituer des préceptes & de donner des confeils auxquels on n'entende rien fi l'on ne fait l'Hébreu, le Syriaque, le Grec, le Latin, & fi on n'a lû mille volumes de Commentaires, de paraphrafes & d'interprétations.

A l'égard des Miniftres, & des Envoiés & des Vicaires de Dieu, il faudroit qu'ils fuffent au deffus du refte des hommes & tout ce qu'ils ne font pas. Si le Roi pouvoit former fes Miniftres & fes Ambaffadeurs, il les feroit, fans doute,

par

parfaits, & tels que rien ne leur manqueroit pour bien remplir leurs fonctions. Argument démonftratif.

Les moyens font proportionnés à la nature & aux attributs de celui qui les employe.

Des livres & des difcours humains né font pas des moyens d'inftruction dignes de Dieu ni proportionnés à fa fageffe, à fa puiffance, à fa juftice.

Donc des livres & des difcours ne peuvent être les moyens dont Dieu fe ferve ou ait pû fe fervir pour inftruire les hommes de fes volontés.

CHAPITRE XVI.

Quatorzieme vérité.

Des Religions établies fur des
res des difcours ne
viennent point de Dieu

DR

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ieu prend toujours les voyes les plus fimples & les plus courtes; or la yoye de parler aux hommes par Tinftinct & par le fentiment intérieur eft plus courte & plus fure que celle de faire un livre & de renvoyer à d'autres

hommes pour lire, traduire, expliquer & commenter ce livre; quand on voudroit fuppofer que Dieu auroit voulu fe fervir de moyens matériels il étoit plus fimple de faire un livre tel qu'il n'eût befoin ni d'explications ni d'interprétations; s'il avoit voulu avoir des Miniftres il auroit établi des hommes capables d'annoncer fes loix, & ces hommes auroient eû un caractere vifible & marqué de leur misfion.

Quand on faura pofitivement que tel livre vient de Dieu & contient fes loix, & que tel homme eft l'interprête de fes loix, on exécutera les préceptes du livre, & l'on aura recours à l'homme en question dans fes difficultés. Mais quand un homme dira, tel livre eft de Dieu, & j'en fuis l'interprête, il faut être auffi ftupide, qu'il eft effronté, pour le croire fur fa parole; fi je doute que le livre qu'il me donne foit divin le livre ne peut établir l'interprête, & fi je doute de l'interprête, tout ce qu'il me dira n'établira rien en faveur de la validité du livre.

Argument démonstratif.

Dieu prend toujours les

ourtes & les plus fimples.

voyes

les plus

Des livres & des difcours humains ne

font pas les voyes plus fimples.

les plus courtes & les

Donc des Religions fondées fur des livres & fur des difcours humains ne font point venues par des voyes dignes de Dieu; donc elles ne viennent point de Dieu.

La juftice & la fageffe de Dieu prouvent ma majeure, je ne crois pas qu'un homme fenfé puiffe nier la mineure; c'est à vous, mon R. P., à voir fi vous nierez la conféquence.

CHAPITRE XVII.
Quinzieme vérité.

Toutes les Religions factices
font faules.

LA

fans

A vérité ne peut être apperçue être reconnue, ni reconnue fans arracher le confentement. Si on nie fincérement une propofition qui contient une vérité, c'eft que celui qui la nie n'entend pas la propofition & qu'elle ne contient pas une vérité à fon égard.

J'ai vu des gens contefter de bonne foi des vérités. J'ai vû au fiége de.

un Officier me foutenir que de quelque

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