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le célibat. Les seuls traits qui les distinguèrent de la masse catholique, furent leur amour de la pauvreté et des lectures de la Bible, qu'ils faisaient en secret et comme en famille. Leur situation par rapport au clergé catholique romain dut être analogue à celle que prirent plus tard les Jansénistes, après la bulle Unigenitus, vis-à-vis du clergé conformiste. C'est donc surtout, par leur version de la Sainte Écriture en langue vulgaire et par leur retour sérieux aux bonnes mœurs des temps apostoliques, qu'ils contribuèrent à la réforme de l'Église.

LIVRE III

LA DEUXIÈME MOITIÉ DU XIVe

ET LE XV SIÈCLE

TABLEAU DE L'ÉPOQUE

Le siècle et demi, qui s'étend de 1350 à 1500, marque la transition du moyen âge aux temps modernes. Alors, les Écossais, les Flamands et les Suisses combattirent pour leur indépendance contre des voisins puissants et tyranniques. La nation française, à l'aide de la petite noblesse et d'une paysanne héroïque Jeanne Darc, réussit à chasser l'Anglais du royaume et de la capitale, après une guerre séculaire. Les Espagnols refoulèrent peu à peu les Maures du centre au sud de la péninsule, jusqu'à ce que la prise de Grenade marquât la fin de leur domination (1495). L'empire grec, par contre, après avoir perdu ses plus belles provinces d'Asie, soumises par le Croissant, vit la Grèce envahie et Constantinople conquise par Mahomet II.

L'invasion musulmane s'avançait par le bas Danube, menaçait Buda-Pesth et Vienne. Si la défaite des comtes de Toulouse et des autres seigneurs du Languedoc, protecteurs des Albigeois, amena le déclin des troubadours, ces derniers, du moins avant de disparaître, décochèrent plusieurs de leurs « sirventes », comme les flèches du Parthe, aux prélats fanatiques qui avaient attiré sur

leur beau pays les foudres du Saint-Siège et la croisade barbare de Simon de Montfort.

Dans la seconde moitié du xive siècle, la langue romanolimousine était comprise des bords de l'Ebre aux rives de la Loire et du Rhône; cela pourrait expliquer comment saint Vincent Ferrier, qui était Catalan, put prêcher aux Français et aux Italiens, sans avoir besoin d'apprendre leur langue ou d'user d'interprète.

La grande querelle entre les rois de France et la cour de Rome au sujet de la suprématie du Pape donna lieu à la composition de plusieurs traités sur les rapports entre l'Église et l'État, dont quelques-uns, comme le « Songe du Vergier », furent publiés en français. De son côté, la lutte héroïque des chrétiens d'Espagne contre les Maures fit éclore les «< romanceros », qui furent comme les premiers bégaiements de la Muse épique et du drame.

Cependant, la peste, issue d'Égypte et qui décima les populations en Italie, Allemagne et France, réveilla les consciences par l'idée du jugement d'outre-tombe et fournit aux prédicateurs un thème d'éloquents appels à la repentance. Saint Vincent Ferrier fut le plus populaire de ces orateurs sacrés.

Aux conflits de la royauté avec les Papes et de la juridiction civile avec l'officialité des évêques, des séculiers universitaires avec les ordres monastiques, qui prétendaient à l'enseignement, vint s'ajouter, enfin, la rivalité entre les cardinaux italiens et français qui amena le grand schisme d'Occident (1378-1415).

En présence de cette anarchie, dont les princes de ce monde, Pape et empereurs, évêques et juges royaux, donnaient le triste spectacle, que devenaient la religion du grand nombre? Les uns, les âmes croyantes et sérieuses, souffraient de ces luttes, surtout du schisme qui faisait beaucoup de mal à l'Église et s'efforçaient d'y remédier par la voie des Conciles, comme Pierre d'Ailly, ou par une action directe sur le Pape et le haut clergé, par

exemple sainte Catherine de Sienne et saint Vincent Ferrier. D'autres, à l'esprit plus léger et critique, se livraient soit à d'amères satires des vices du clergé comme Pedro de Osma ou Pétrarque, soit à des attaques violentes contre la Cour de Rome, comme certains troubadours. D'autres enfin plus hardis, comme Wiclif ou Huss, mirent la cognée à la racine de l'arbre et réclamèrent la réforme radicale de l'Église.

Cependant, les Papes, dont pas un, pas même les élus du Concile général, ne fut à la hauteur de la crise, refusaient d'exécuter les réformes, pourtant bien inoffensives, demandées par Pierre d'Ailly, Gerson et Clamengis. Le grand effort, fait à Pise, Constance et Bâle n'aboutit à presque rien, en fait de réformes, et ne fit qu'apaiser la révolution hussite.

Tandis que les Vaudois continuaient, sans bruit et sans découragement, à faire et propager leurs versions de la Bible en langue vulgaire, des savants et des orateurs ébranlèrent, par leurs critiques, les fondements même sur lesquels Rome appuyait ses prétentions. Laurent Valla démontra la fausseté de la prétendue donation de Constantin au pape Silvestre, Jérômé Savonarole, par ses discours éloquents sur les grandes doctrines du salut, détermina à Florence une rénovation morale et sociale, analogue à celle que Calvin devait inaugurer, quarante ans plus tard, à Genève.

Nous adopterons, pour cette dernière partie, le même ordre que pour les précédentes. Dans un premier chapitre, on étudiera les promoteurs de la réforme la plus modérée. Cette aile droite de l'armée des précurseurs est formée par Pétrarque Lopez de Ayala et les deux Ferrier, les cardinaux Pierre d'Ailly et Ximénès. Au centre, se placent, comme d'eux-mêmes. l'auteur du « Songe du Vergier », Gerson et N. de Clamengis. L'aile gauche, enfin, comprend les Vaudois et Pédro Martinez, Laurent Valla et J. Savonarole.

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