Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

XLIV.

E

DU MAL EN AMOURS.

Le plus grand mal et le plus dangereux,
Que d'une amye on puisse recevoir,

N'est pas refuz, ny congé rigoureux,
Apres qu'on a d'aymer faict son debvoir:
Ce n'est aussi estre privé de veoir
Celle qu'on tient chere comme soy mesme.
Un mal y a en amours plus extresme,
Et qu'on ne peult, sans l'essayer, comprendre:
Diray je quel? c'est quand on est à mesme,
Et toutesfoys on est contrainct d'attendre.

XLV.

QU'IL FAULT TOUSJOURS CRAINDRE ET ESPERER EN AMOURS.

J'APPERÇOY bien qu'amour est de nature estrange,
Difficile à congnoistre et facile à sentir :

Il se veult approcher quand de luy on s'estrange,
Et quand on s'en approche il en faict repentir :
Le suyvre maulgré moy me fallut consentir,
Mais soubz bonne esperance, il me fut rigoureux.
Et lors que je pensois estre le moins heureux,
Entre plusieurs ennuyz je me vey prosperer.
Ayez donc souvenance, o tristes amoureux,
Qu'il fault craindre tousjours, et tousjours esperer.

[ocr errors]

XLVI.

AMOURS QU'ON N'OSE DESCOUVRIR.

FORCE d'amours me veult souvent contraindre
A declairer mon cueur appertement:
Mais un refuz (pour honte) tant à craindre
M'a tousjours faict un grand empeschement.
Mon mal ainsi nourry couvertement,
Dissimulant l'ennuy tant que je puis
D'autre costé du bien que je poursuys
Le souvenir renforce mon martyre.
Voyez (helas) le tourment ou je suis,
Voulant parler, un seul mot ne puis dire.

XLVII.

A UNE DAME QUI FAISAIT FORCE PROMESSES A SES AMANTS.

DAME, vous avez beau maintien,
Et grand'grace en vostre langage:
Mais tout cela est peu ou rien,,
Si vous ne faictes davantage.
J'accorde bien que c'est un gage
De pouvoir jouyr quelque jour.
Si ce n'est pas le parfaict tour,
Qu'il fault pour achever l'affaire :
Pour avoir le deduyct d'amour,
Vault mieulx

peu dire et beaucoup faire.

XLVIII.

A UNE DAME, SUR LE RETOUr d'un qu'ellE AYMOIT.

JE

BONJOUR la Dame au bel amy,

Vous estes maintenant contente,
Et si n'ay plaisir, ne demy :
Car apres vostre longue attente
Venu est celluy qui de rente
M'a laissé fascherie et soing:
Dieu doint nul ne s'en repente,

que

L'amy se congnoist au besoing.

XLIX.

SUR L'ENNUY DE L'ABSENCE.

E ne fais rien que plaindre et souspirer, Desirant plus ce que moins puis avoir, Et sens mon mal chascun jour empirer, En voyant moins ce que plus je veulx veoir. Veoir semble peu à qui s'en peult pourvoir : Mais j'ay congneu par vraye experience, Que quand on faict en amour son debvoir, Il n'est ennuy que l'ennuy d'une absence.

[ocr errors]

ÉPIGRAMMES

A L'IMITATION DE MARTIAL.

LIVRE V.

« ZurückWeiter »