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DE ceulx qui tant de mon bien se tourmentent, J'ay d'une part grand'compassion:

Puis me font rire en voyant qu'ilz augmentent
Dedans m'amye un feu d'affection:

Un feu lequel par leur invention
Cuydent estaindre. O la povre cautelle :
Ilz sont plus loing de leur intention,
Qu'ilz ne vouldroient que je fusse loing d'elle.

XL.

1535.

DE SON FEU, ET DE CELLUY QUI SE PRINT AU BOSQUET DE FERRARE. 2

Puis qu'au milieu de l'eau d'un puissant fleuve
Le vert bosquet par feu est consumé,
Pourquoy mon cueur en cendre ne se treuve
Au feu sans eau que tu m'as allumé ?

Marot, pendant son exil à Ferrare, composa cette épigramme contre ses ennemis qui voyaient avec chagrin Marguerite, loin de l'oublier au jour du malheur, faisant tous ses efforts pour dissiper l'orage que Diane et la calomnie avaient appelé sur sa tête.

2

Voyez l'épigramme 11 du livre II, où Marot nous parle de cet agréable bosquet.

Le cueur est sec, le feu bien enflammé : Mais la rigueur (Anne) dont tu es pleine, Le veoir souffrir a tousjours mieulx aymé, Que par la mort mettre fin à sa peine.

XLI.

A UNE DONT IL NE POUVOIT OSTER SON CUEUR.

PUIS qu'il convient par le pardon gaigner De tous pechez faire confession

Et

pour d'enfer l'esperit esloigner Avoir au cueur ferme contrition : Je te supply fais satisfaction

Du povre cueur qu'en peine tu retiens,
Ou si le veulx en ta possession,
Confesse donc mes pechez et les tiens.

XLII.

D'UN POURSUYVANT EN AMOURS.

Je sens en moy une flamme nouvelle,
Laquelle vient d'une cause excellente
Qui tous les jours me dit, et me revelle,
Que demourer doy personne dolente.
O Amour plein de force violente,
Pourquoy as tu mon tourment entrepris ?

Approchez vous, belle qui m'avez pris:
Amour cruel vostre amy veult occire,

Et gaignera la bataille et le prix,

Si ne m'armez du bien que je desire.

XLIII.

A ANNE.

LE clair soleil par sa presence efface,
Et faict fayr les tenebreuses nuictz,
Ainsi pour moy (Anne) devant ta face
S'en vont fuyans mes langoureux ennuiz:
Quand ne te voy tout ennuyé je suis :
Quand je te voy je suis bien d'autre sorte.
Dont vient cela? sçavoir je ne le puis,
Si n'est d'amour, Anne, que je te porte.

XLIV.

DE ANNE QU'IL AYME FORT.

JAMAIS je ne confesserois,

Qu'amour d'Anne ne m'a sceu poindre:
Je l'ayme, mais trop l'aymerois,

Quand son cueur au mien vouldroit joindre:
Si mon mal quiers, m'amour n'est moindre,
Ne moins prisé le Dieu qui vole:
Si je suis fol, amour m'affolle,
Et vouldrois, tant j'ay d'amytié,
Qu'autant que moy elle fust folle,
Pour estre plus fol la moytié.

XLV.

A ANNE QU'IL SONGE DE NUICT.

ANNE ma sœur, dont me vient le

songer,

Qui toute nuict par devers vous me meine?
Quel nouvel hoste est venu se loger

Dedans mon cueur, et tousjours si pourmaine,
Certes je croy (et ma foy n'est point vaine)
Que c'est un Dieu me vient il consoler?
Ha, c'est Amour, je le sens bien voler.
Anne ma sœur, vous l'avez faict mon hoste:
Et le sera, me deust il affoller,

Si celle la qui l'y meit ne l'en oste.

XLVI.

DU MOYS DE MAY ET D'ANNE.

MA
AY, qui portoit robbe reverdissante,
De fleur semee un jour se meit en place,
Et quand m'amye il veit tant fleurissante,
De grand despit rougit sa verte face,
En me disant : Tu cuydes qu'elle efface,
A mon advis les fleurs qui de moy yssent:
Je luy respons, toutes tes fleurs perissent,
Incontinent qu'yver les vient toucher,
Mais en tous temps de ma dame fleurissent
Les
grans vertus que mort ne peult secher.

PUIS

XLVII.

A ANNE, DU JOUR DE SAINCTE ANNE.

que vous portez le nom d'Anne,
Il ne fault point faire la beste:
Des aujourd'huy je vous condamne
A solennizer vostre feste:

Ou autrement tenez vous preste
De veoir vostre nom à neant:
Aussi pour vous trop doulx il sonne,
Veu la rigueur de la personne,
Un dur nom vous est mieulx seant.

XLVIII.

DU JOUR DES INNOCENS.

TRESCHERE Sœur, si je sçavois ou couche

Vostre personne au jour des Innocens, '
De bon matin j'yrois à vostre couche,

I

Veoir ce gent corps que j'ayme entre cinq cens:
Adonc ma main (veu l'ardeur que je sens)
Ne se pourroit bonnement contenter,
Sans vous toucher, tenir, taster, tenter:
Et si quelqu'un survenoit d'adventure,

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I Lorsque l'on pouvait surprendre de jeunes filles au lit, le jour des Innocens, on se permettait de leur donner des claques sur les fesses, et souvent le jeu ne s'arrêtait pas là. Tel siècle, telles mœurs!

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