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I.

1524.

DE PHEBUS ET DIANE.

LE clair Phebus donne la vie et l'aise,
Par son baiser tant digne et precieux :
Et mort devient ce que Diane baise.
O dur baiser, rude et mal gracieux :
Tu fais venir un desir soucieux

De mieulx avoir, dont souvent on desvie :
Mais qui pourroit parvenir à ce mieulx,
Il n'est si mort qui ne revint en vie.

II.

1524.

DE DIANE.

HOMMES expers vous dictes

par science, Que Diane est en baisant beaucoup pire, Que n'est la mort : mais par experience De ce vous veulx et vous puis contredire : Car quand sa bouche en la mienne souspire, Toute vigueur dedans mon cueur s'assemble:

Vous resvez donc, ou certes il fault dire,

Qu'en la baisant, mourir vivre me semble.

III.

1524.

A LA BOUCHE DE DIANE.

BOUCHE de coral precieux,
Qui à baiser semblez semondre :
Bouche qui d'un cueur gracieux
Sçavez tant bien dire et respondre,
Respondez moy: doibt mon cueur fondre
Devant vous, comme au feu la cire?
Voulez vous bien celluy occire,
Qui crainct vous estre desplaisant?
Ha bouche, que tant je desire,
Dictes nenny, en me baisant.

IV.

1524.

DE DIANE.

ESTRE Phebus bien souvent je desire, Non pour congnoistre herbes divinement, `Car la douleur qui mon cueur veult occire, Ne se guerist par herbe aucunement':

Non

pour avoir ma place au firmament,

Car en la terre habite mon plaisir:

Non pour son arc encontre Amour saisir,
Car à mon roy ne veulx estre rebelle:
Estre Phebus seulement j'ay desir,
Pour estre aymé de Diane la belle.

V.

1524.

DE DIANE.

'ENFANT Amour n'a plus son are estrange, Dont il blessoit d'hommes, et cueurs et testes: Avec celluy de Diane a faict change, Dont elle alloit aux champs faire les questes: Ilz ont changé, n'en faictes plus d'enquestes : Et si on dict, à quoy les congnois tu? Je voy qu'Amour chasse souvent aux bestes, Et qu'elle attainct les hommes de vertu.

VI.

1525.

DE SA MAISTRESSE.

QUAND je voy ma maistresse,

Le clair soleil me luyt :

S'ailleurs mon il s'adresse,
Ce m'est obscure nuict:

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A YSABEAU, A LAQUELLE IL FEIT L'AMOUR EN SA JEUNESSE,
QU'IL QUICTA DEPUIS POUR SON INCONSTANCE.

QUI en amour veult sa jeunesse esbatre,
Vertus luy sont propres en dictz et faictz :
Mais il ne fault qu'un vent pour les abatre,
Si fermeté ne soustient bien le faix.
Ceste vertu, et ses servans parfaictz
Portent le noir,' qui ne se peult destaindre:
Et qui l'amour premiere laisse estaindre,
Le noir habit n'est digne de porter.
Tout homme doibt ceste vertu attaindre,
Si femme y fault, elle est à supporter.

ET

I La couleur noire était alors l'emblême de la fidélité; Marot luimême nous l'apprend :

Car le noir dit la fermeté des cueurs.

RONDEAU XVII. Livre II.

On se sert aujourd'hui du noir pour signifier la tristesse. La constance et la tristesse se ressemblent beaucoup.

VIII.

1525.

MOMMERIE DE DEUX HERMITES.

SCAVEZ

LE PREMIER HERMITE.

vous la raison pourquoy

Hors du monde je me retire
En un hermitage à recoy?
Sans faulte je vous le veulx dire.
Celle que tant j'ayme et desire,
En lieu de me reconforter,
Tousjours ce cul arriere tire, '
Le diable la puisse emporter.

IX.

L'AUTRE HERMITE.

Je m'en voys tout vestu de gris
En un boys, là je me confine:
Au monde aussi bien j'amaigris,
M'amye est trop dure et trop fine:
Là vivray d'eau et de racine,

Mais, par mon ame,

il ne m'en chault:

1 L'amour n'est pas toujours aveugle. Marot ne pouvait plus douter de l'infidélité de Diane qui méditait une rupture, et chaque jour s'éloignait de lui.

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