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LVIII.

A UN NOMMÉ CHARON QU'IL CONVIE A SOUper.

METS voille au vent, single vers nous, Charon,'
Car on t'attend: puis quand seras en tente,
Tant et plus boy bonum vinum charum,

Qu'aurons pour vray : doncques (sans longue attente)
Tente tes piedz à si decente sente

Sans te fascher, mais en sois content, tant
Qu'en ce faisant nous le soyons autant.

LIX.

MAROT A SES DISCIPLES.

ENFANS, oyez une leçon :
Nostre langue a ceste façon
Que le terme qui va devant,
Vouluntiers regit le suyvant.
Les vieux exemples je suyvray
Pour le mieulx: car à dire vray,
La chanson fut bien ordonnee,

Qui dit : M'amour vous ay

Et du bateau est estonné,

donnee.

1 Quand le dernier mot du vers est répété au commencement du vers suivant, cette rime en écho est appelée fraternisée. Ce sont pourtant ces niaiseries qui faisaient autrefois jeter des cris d'admiration.

Qui dit : M'amour vous ay donné. '
Voila la force que possede

Le femenin, quand il precede.

Or prouveray par bons tesmoings,
Que tous pluriers n'en font

pas

Il fault dire en termes parfaictz,
Dieu en ce monde nous a faictz:
Fault dire en parolles parfaictes,
Dieu en ce monde les a faictes:
Et ne fault point dire en effect,
Dieu en ce monde les a faict:
Ne nous a faict pareillement,

moins:

Mais nous a faictz, tout rondement.

L'Italien dont la faconde

Passe les vulgaires du monde,

Son langage a ainsi basty
En disant, Dio noi a fatti.

Parquoy, quand me suis advisé,
Ou mes juges ont mal visé,
Ou en cela n'ont grand'science,

Ou ilz ont dure conscience.

1 On est étonné de voir Marot résoudre une question de la grammaire, qui a été si long-tems agitée, et dont beaucoup d'écrivains de son siècle n'avaient pas même l'idée.

LX.

A DEUX JEUNES HOMMES QUI ESCRIVOIENT A SA LOUENGE, SÇA VOIR ANTOINE DU MOULIN ET CLAUDE GALLAND. 2

1

SONNET.

ADOLESCENS qui la peine avez prise

De m'enrichir de los non merité,
Pour en louant dire bien verité,

Laissez moy là, et louez moy Loyse.

C'est le doulx feu dont ma muse est esprise,
C'est de mes vers le droict but limité:

Haulsez la donc en toute extremité :

Car bien prisé me sens, quand on la prise.

Et n'enquerez de quoy louer la fault :
Rien qu'amytié en elle ne deffault :
J'y ay trouvé amytié à redire.

Mais au surplus escrivez hardiment

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Ce vouldrez faillir aucunement
que

Vous ne sçauriez, sinon de trop peu dire.

1 Antoine du Moulin, valet-de-chambre de Marguerite, reine de Navarre, homme savant et laborieux. Il a laissé un grand nombre de traductions en vers et en prose, et il a fait réimprimer les ouvrages de plusieurs auteurs de son tems. C'est lui qui a rassemblé et mis en ordre les poésies de Clément Marot, imprimées à Lyon, chez Rouville, en 1546.

2 Claude Galland, né à Tournus, près de Mâcon, a publié quelques poésies.

LXI.

AUX AMATEURS DE LA SAINCTE ESCRIPTURE.

BIEN peu d'enfans on trouve qui ne gardent
Le testament que leur pere a laissé,

Et qui dedans de bien pres ne regardent,
Pour veoir comment il l'a faict et dressé.

O vous, enfans, à qui est adressé

Ce Testament de Dieu nostre bon pere,
Affin qu'à l'œil son vouloir vous appere,
Voulez vous point le lire vouluntiers?
C'est pour le moins, et plus de vous j'espere,
Comme de vrays celestes heritiers.

LXII.

A UN QUI LUY AVOIT RENDU SERVICE.

VOSTRE obligé (Monsieur) je me confesse,
Comme de vous ayant receu grand bien :
De vous payer ne vous feray promesse,
Car ne pourrois en trouver le moyen.
Si respondant voulez, je le veulx bien,
Mon cueur respond et se met en ostage,
C'est mon tresor, d'autre bien je n'ay rien,
Je vous supply le retenir pour gage.

ÉPIGRAMMES.

LIVRE II.

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