Car le dieu Pan, et Syringue' s'amye
moys d'avril ont un prix suscité :
Et ont donné sur un des montz d'Arcade Au mieulx disant de la fluste une aulbade La fluste d'or, neuf pertuis contenant. Tytire y court, Mopsus s'y va trainant, Et Coridon a le chemin apris :
Chascun y va, pour veoir, qui maintenant Du jeu de fluste emportera le prix.
Lors ton Michel n'a eu teste endormie, Ains est couru veoir la solennité, Et a sonné sa fluste, et chalemye, Tout à ton los, honneur, et dignité. Incontinent que toute la brigade Son armonie ouyt soubz la fueillade, Pan se teut coy, merveille se donnant : Dont chascun va sa fluste abandonnant, Et soubz la sienne à danser se sont pris, Disans entre eulx, ce Françoys resonnant Du jeu de fluste emportera le prix.
Pan (en effect) eut la face blesmie, Et sur Michel se monstra despité :
I Syrinx, nymphe de Diane, poursuivie par Pan, se précipita dans le fleuve Ladon, pour échapper aux caresses de ce hideux amant, et fut changée en roseaux. Le dieu des bergers, entendant le murmure qui sortait de ces roseaux agités par le zéphyr, coupa sept tuyaux d'inégale longueur, les unit avec de la cire, et forma la flute pastorale.
Si doubterois, que de paour d'infamie Du hault du mont ne l'eust précipité, Car un hault dieu, de dueil trop est malade, Quand un mortel le surmonte, et degrade. Mais Pan, qui t'ayme, est assez souvenant, Qu'un tel ouvrier est propre, et advenant A toy, qui es recueil des bons espritz : Donc reviendra, et en s'en revenant Du jeu de fluste emportera le prix.
Prince Lorrain, par vertu consonnant A bons subjectz, ton Michel bien sonnant Plus pour l'honneur, qui est en toy compris, Que pour monstrer, qu'il n'est point aprenant, Du jeu de fluste emportera le prix.
OR est Noël venu son petit trac, Sus donc aux champs, bergieres de Prenons chascun panetiere, et bissac, Fluste, flageol, cornemuse, et rebec, Ores n'est pas temps de clorre le bec, Chantons, saultons, et dansons ric à ric
1 Cette ballade, remarquable par la bizarrerie des rimes, était un
de ces tours de force qui occupaient tant nos vieux poètes.
Puis allons veoir l'enfant au povre nic, Tant exalté d'Helie, aussi d'Enoc, Et adoré de maint grand roy, et duc : S'on nous dit nac, il fauldra dire noc : Chantons Noël tant au soir, qu'au desjuc.
Colin Georget, et toy Margot du Clac Escoute un peu et ne dors plus illec : N'a pas long temps sommeillant pres d'un lac, Me fut advis, qu'en ce grand chemin sec Un jeune enfant se combatoit avec Un grand serpent, et dangereux aspic : Mais l'enfanteau en moins de dire pic, D'une grand' croix luy donna si grand choc Qu'il l'abbatit, et luy cassa le suc Garde n'avoit de dire en ce defroc Chantons Noël tant au soir, qu'au desjuc.
Quand je l'ouy frapper et tic, et tac, Et luy donner si merveilleux eschec, L'ange me dit d'un joyeux estomach, Chante Noël, en françoys, ou en grec, Et de chagrin ne donne plus un zec, Car le serpent a esté prins au bric: Lors m'esveillay et comme fantastic Tous mes trouppeaulx je laissay pres un roc, Si m'en allay plus fier qu'un archiduc En Bethleem: Robin, Gautier, et Roch, Chantons Noël tant au soir, qu'au desjuc.
Sa maison n'est de pierre, ne de bric, Car tous les vents y soufflent à grand floc: Et qu'ainsi soit, demandez à sainct Luc. Sus donc avant, pendons soucy au croc, Chantons Noël tant au soir, qu'au desjuc.
CESSEZ acteurs d'escrire en eloquence D'armes, d'amours, de fables, et sornettes : Venez dicter soubz piteuse loquence Livres plaintifz de tristes chansonnettes : N'escrivez d'or, mais de couleurs brunettes, A celle fin que tout dueil y abonde:
Car Jesuchrist, l'aigneau tout pur et munde, Pour nous tirer des enfers detestables, Endura mort horrible, et furibunde
En ces sainctz jours piteux, et lamentables.
Romps tes flageolz, dieu Pan, par violence, Et va gemir en champestres logettes : Laissez les boys, vous, nymphes d'excellence,
1 Les rimes de la précédente ballade étaient toutes masculines, dans celle-ci, elles sont toutes féminines ; c'était à qui se créerait de nouvelles difficultés.
Et vous rendez en cavernes subjectes Ne chantez plus, refrenez vos gorgettes Tous oyselletz: trouble toy la claire unde: Ciel noircy toy et d'angoisse profonde Bestes des champs par cris espoventables Faictes trembler toute la terre ronde En ces sainctz jours piteux, et lamentables.
Riches habitz de noble preference Vueillez changer dames, et pucellettes Aux ornementz de dolente apparence, Et resserrez voz blanches mammelletes : En temps d'esté fleurissent viollettes, Et en yver sechent par tout le monde : Donc puis qu'en vous joye et soulas redonde Durant les jours à rire convenables,
Pleurez au moins autant noire, que blonde En ces sainctz jours piteux, et lamentables.
Prince chrestien sans que nul te confonde, Presche chascun, qu'à jeusner il se fonde Non seulement de metz bien delectables, Mais de peché, et vice trop immunde En ces sainctz jours piteux, et lamentables.
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