A MONSIEUR L'AMY, MEDECIN.
Qu'ay je mesfaict que vers moy ne prens voye? Graces à Dieu, tu es dru et refaict,
Moy plus deffaict que ceulx que mortz on faict: Mort en effect, si Dieu toy ne m'envoye, Et ne pourvois au mal qui me desvoye : Que je te voye, à demy suis guery, Et sans te veoir à demy suis pery.
corps demande guerison,
Mon frere cher et l'esprit au contraire Le veult laisser comme une orde prison :
L'un tend au monde, et l'autre à s'en distraire.
C'est grand' pitié que de les ouyr braire : Ha, dit le corps, fault il mourir ainsi ?
1 On a vu dans le Ier volume, une épître adressée à Pierre Vuyard, secrétaire du duc de Guise.
Ha, dit l'esprit, fault il languir icy? Va, dit le corps, mieulx que toy je souhaite : Va, dit l'esprit, tu faulx, et moy aussi : Du seigneur Dieu la voulunté soit faicte.
POURQUOY voulez vous tant durer, Ou renaistre en fleurissant aage? Pour aymer et pour endurer, Y trouvez vous tant d'advantage? Certes, celluy n'est pas bien sage Qui quiert deux foys estre frappé, Et veult repasser un passage Dont il est à peine eschappé.
AU ROY FRANÇOYS Ier, PAR L'ordre duqueL MAROT AVOIT REVEU
ET FAICT REIMPRIMER LES POESIES DE FRANÇOYS VILLON.
Si en Villon on trouve encor à dire, S'il n'est reduict, ainsi qu'ay pretendu, A moy tout seul on doibt le blasme (Sire) Qui plus y ay travaillé qu'entendu :
Et s'il est mieulx en son ordre estendu Que paravant, de sorte qu'on le prise, Le gré à vous en doibt estre rendu, Qui fustes seul cause de l'entreprise.
A FRANÇOYS, DAULPHIN DE FRANCE.
CELLUY qui a ce dizain composé, Enfant royal, en qui vertu s'imprime, Et qui à vous presenter l'a osé,
C'est un Clement, un Marot, un qui rythme: Voycy l'ouvrier, l'art, la forge, et la lime: Si vous sentez n'en estre importuné, Vous pouvez bien, prince tresfortuné, Vous en servir à dextre et à senestre, Car vostre estoit avant que fussiez né: Or devinez maintenant qu'il peult estre.
A MONSIEUR LE DUC DE FERRARE.
QUAND la Vertu congneut que la Fortune,
Me conseilloit abandonner la France,
1 Voyez l'épitaphe x du Cimetière
Elle me dit : cherche terre opportune Pour ton recueil, et pour ton asseurance : Incontinent, prince, j'euz esperance, Qu'il feroit bon devers toy se retraire, Qui tous enfans de Vertu veulx attraire, Pour devorer ton palais sumptueux : Et que plaisir ne prendrois à ce faire Si tu n'estois toy mesme vertueux.
A SES AMYS, QUAND LAISSANT LA ROYNE DE NAVARRE FUT RECEU EN LA MAISON ET ESTAT DE MADAME RENEE, DUCHESSE DE FERRARE.
MES amys, j'ay changé ma dame, Une autre a dessus moy puissance Nee deux foys de nom, et d'ame, Enfant de roy par sa naissance, Enfant du ciel par congnoissance De celluy qui la saulvera : De sorte, quand l'autre sçaura, Comment je l'ay telle choisie, Je suis bien seur qu'elle en aura Plus d'aise que de jalousie.
AU ROY, POUR ESTRE REMIS EN SON ESTAT.
Si le roy seul, sans aucun y commettre,
Met tout l'estat de sa maison à poinct, Le cueur me dit, que luy qui m'y feit mettre M'y remettra, et ne m'ostera point:
Craincte d'oubly pourtant au cueur me poinct : Combien qu'il ait la memoire excellente, Et n'ay pas tort: car si je perds ce poinct, Adieu commant le plus beau de ma rente: Or doncques soit sa majesté contente De m'y laisser en mon premier arroy, Soit de sa chambre, ou sa loge, ou sa tente, Ce m'est tout un, mais que je sois au roy.
DE LA CONVALESCENCE DU ROY.2
Roy des Françoys, Françoys premier du nom, Dont les vertus passent le grand renom,
1 Marot, pendant son exil à Ferrare, avait été effacé de l'état de la maison du roi; il y fut remis, à son retour, par l'ordre de François Ier. Voyez l'Essai historique.
2 François Ier fut malade à Lyon, en 1537.
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