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pons, est une bulle du pape Eugène IV, donnée à Florence le 10 avril 1439 (1), contre ceux qui tenaient le concile de Bâle. Cette bulle est rapportée en français dans les chroniques de Monstrelet. Eugène accuse Amédée VIII, duc de Savoie, que le concile de Bâle venait d'élire pape, après l'avoir déposé lui-même, de s'ètre laissé séduire par des sorciers, frangules, straganes ou Vaudois, qui abondent dans son pays, et de s'être servi de leur aide pour l'exécution de ses coupables projets :

« Le duc, le prince et l'ouvrier de toute cette néphande œuvre a esté «< ce très desloyal sathan Asmodus, jadis duc de Sayoye, lequel jà piéçà «< a ces choses prémedictées en son couraige et a esté acerténé de plu« sieurs fauches prenostications et sorceries de plusieurs inexcécrés et << maulditz hommes et femmes, lesquelz ont délaissé leur sauveur der« rière et se sont convertiz aprez Sathan, séduitz par illusion de Dyables, lesquelz en commun langage sont nommées sorceries, frangules, straganes ou Vaudoyses, desquelz on dit en avoir grant foison « en son pays. Et par telles gens, jà passé aulcuns ans, a esté séduyt

«

"

« tellement que affin que il peust estre esleue ung chief monstrueux et

<< difforme en l'église de Dieu, il print ung habit de hermite, etc. (2) »

[1.

Nous citerons en second lieu quelques vers du poëme intitulé le Champion des Dames. Cet ouvrage, composé en l'an 1440 par maître Martin le Franc, prévôt de l'église de Lausanne (3), est dédié à Philippe le Bon, duc de Bourgogne. Deux interlocuteurs discutent sur le mérite des dames; l'un d'eux, qui s'intitule l'Adversaire, accuse un grand nombre de femmes du crime de sorcellerie ou de Vauderie.

(1) Cette date n'a rien d'absolu au sujet des Vaudois. Des documents plus anciens peuvent être rencontrés d'un jour à l'autre.

(2) Chron. d'Enguerrand de Monstrelet, édit. Buchon, t. VII, p. 28.

(3) Le Champion des dames a été imprimé deux fois au moins; mais les exemplaires sont extrêmement rares. Nous nous sommes servi du beau manuscrit de la bibliothè que royale, suppl. franc. SF. 632. Il porte à la fin: Explicit le Ve et derrenier livre du Champion des dames, fait par maistre Martin le Franc, prévost de l'église de Lausanne, en l'an mil cccc et XL.-Escript ou cloistre de l'église Nostre-Dame d'Arras, en l'an de l'Incarnation de Nostre-Seigneur MCCCCL et ung.

L'ADVERSAIRE contre les dessus dictes, met en jeu les faicturières, les Vaudoises. Hélas! tu n'as parlé des masques.

Je te pri que nous en contons,
Dist l'adversaire, et de leurs frasques,
Se ce sont varous ou luitons,

Se vont à pié ou sur bastons,

Se volent en l'air comme oisiaux,

Se menguent les valetons [jeunes enfants].
Dis en, amoureux damoisiaux.
J'entens des vieilles quauquemares
Et de ces vaillans faicturières,
Qui vont par rivières et mares
Champs et bois en mille manières,
Et sont sy soubtilles ouvrières
Qu'elles entrent sans porte ouvrir ;
Dy nous de ces bonnes sorcières
Sans la male fachon couvrir.

LE CHAMPION, pour amortir le dit de l'adversaire, monstre qui fut le premier magicien.

Tant de fois ne sçauras muer
Propos malicieusement,

Dist Franc-Vouloir, que remuer
Ne faces du commencement.
En ce que dis nouvellement
Brief il n'y a point d'aparence,
Et s'il est vrai, certainement
Hommes ont trouvé la science.
Je treuve escript que Zoroastres
Fut premier maistre d'art magique,
Qui faisoit en veant les astres
Invocacion diabolique,

En eaue ou en miroir oblique
Monstroit-il le mauvais esprit;
Ne scay se grammaire ou logique
Telx enchantemens lui apprit,
Et jà soit que le roy Ninus
Fist ses livres au feu jecter,

Et devant lui fust mal venus

Car en prison le fist bouter,
Néantmains l'art de dyable enchanter
Par chiffres et par caractères
Ceulx lesquelx l'ont voulu hanter

Ont depuis fait en pluiseurs terres.
Celle art regna moult en Égipte,
Ou temps que Pharaon vivoit;
Et ores fait elle son gitte

En maintes places qu'on ne voit;
Que s'en la prison on avoit
Tous les maistres invocateurs
Chacun diroit: las qui sçavoit
En ce monde tant d'enchanteurs !
L'ADVERSAIRE.

Certes la besongne est plus pire
Que ne pensés de la moitié,
Respond l'aultre prest à mal dire.
Hélas! N'esse grande pitié
Que l'enfant ou bers alettié
Sera rosty en une haste [broche]
Et puis toutes d'une amitié
Le verront dévorer en haste.

LE CHAMPION.

Je n'entens pas bien ce sermon,
Dit Franc-Vouloir, et n'en fais feste.
L'en parle trop bien du ramon [balai],
Mais la chose n'est manifeste,
Et vouldroie mettre ma teste

Qu'oncques vielle n'ala en l'oirre [l'air]
Ce sembleroit oisiau ou beste

Qu'il faulsit réclamer au loirre [leurre].

L'ADVERSAIRE conte au champion une

histoire de celles faicturières.

L'adversaire ung peu resjouy

Respondy tu feras la croix

Quant tu auras le cas ouy.

Vray est, ouy l'ay-je, m'en crois,
Que les vielles, ne II, ne trois,
Ne vingt, mais plus de trois milliers
Vont ensemble en aulcuns destrois

Veoir leurs dyables familliers.

Ce n'est pas truffe non ne gale;
Tache n'ai-je de menterye,
Ne aude pas que je te gabe
En parlant de leur sorserye.
Quant tu sçauras leur puterye
Toutes les vouldroies vir arses,
Et n'est au monde flaterye
Qui leur fait puist torner à farses.

Je te dy avoir veu en chartre
Vielle, laquelle confessoit,

Aprez qu'escript estoit en chartre,

Comment, dès le temps qu'elle estoit
De XVI ans ou poy s'en faloit,
Certaines nuis de la val pute

Sur ung bastonnet s'en aloit
Veoir la sinagogue pute.

Dis mille vielles en ung fouch [une troupe]

Y avoit-il communément,

En fourme de chat ou de bouch
Veans le dyable proprement,
Auquel baisoient franchement
Le cul en signe d'obéissance,
Renyans Dieu tout plainement
Et toute sa haulte puissance.
Là faisoient choses diverses :
Les unes du dyable aprenoient
Arts et sorceryes perverses,
Dont plusieurs maulx elles faisoient;
Aux aultres les danses plaisoient
Et aux pluiseurs mengier et boire;
Là en habondance trouvoient
De tout plus qu'on ne porroit croire,
Le dyable souvent les preschoit,
Et qui se vouloit repentir,
Trop durement il le tenchoit
Ou le batoit sans alentir.
Mais à tous ceulx qui consentir
Vouloient à tous ses plaisirs
Il promettoit sans rient mentir
Le comble de tous leurs désirs.
Celluy dyable en fourme de cat
Parmi le monde tournoioit,
Et comme juge ou advocat
Toutes requestes escoutoit.
Chacun tel honneur lui faisoit

Comme à Dieu; aussy le faulx gars
Ungs et aultres resjouissoit

Par paroles et par regars.

Et sachiez qu'en la départye
Chacun sa chascune prenoit,
Et s'aucune n'estoit lotye

D'homme, ung dyable luy sourvenoit.

Puis ung chascun s'en revenoit

Comme vent sur son bastonchel:
Telle puissance luy donnoit
Sathan, ce mauvais larronchel.
Item la vielle nous conta

Que, quant hommage au dyable fit,
Ung oingnement luy aporta
De diverses poisons confit
Dont elle maint homme deffit
Depuis encores plus de cent,
Et affola et contrefit

Maint bel et plaisant innocent.
Item redit la male beste
Que par pouldre quelle souffloit
Faisoit sourdre et lever tempeste
Qui blez et vignoble riffloit,
Entes et arbres essiffloit,
Et en estoit ung pays gasté,

Et s'aucun contre elle ronfloit
Il estoit tantost tempesté.
Plus de vro ont déposé,

Sans qu'ilz fussent mis à torture,
Qu'ilz ont le grésil composé
Par dessus tous les mons d'Esture,
Et pluie et vent contre nature
Fait trébucher où ilz vouloient,
Et mainte aultre male aventure
Les dyables faire leur faisoient.
Encor plus fort elle disoit,
Dont je me donne grand hideur,
Que le dyable homme se faisoit
Et avec luy prenoit l'ardeur
De luxure. O Dieu quel horreur !
Vray Dieu que la couple est notable!

O vray Dieu Jhésus quel erreur!
La femme est mariée au dyable!
Je vouloie tout ce mescroire

Et disoie c'est advertin
De teste, quant le me fit croire
Une aultre que vis le matin
Disant j'ai Gohier et Quotin
Veu danser et mener la gogue,
Et sachiez que grec et latin
Viennent à notre sinagogue.

LE CHAMPION.

Veulx-tu, compains, que je te dye,

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