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JUGEMENT LOMBARD

RENDU EN L'AN 762.

Le document que nous allons soumettre à nos lecteurs n'offre pas l'attrait d'une pièce inédite. Il a, au contraire, été l'objet d'une publication faite avec beaucoup de soin.

Mais cette publication, toute récente, a eu lieu en Italie, et la charte dont nous voulons parler nous a paru assez intéressante pour mériter d'être encore reproduite dans ce recueil. Elle est conservée à Pise, dans une collection particulière, celle de M. le chanoine Raffaello Roncioni (1), et un professeur de droit à l'université de la même ville, M. Pietro Capei, est son premier éditeur. M. Capei s'exprime ainsi, en tête de son travail, dans la lettre de dédicace adressée au marquis Capponi à Florence : « Cette charte, publiée aujourd'hui pour la première fois, se trouve dans la célèbre collection de documents recueillis par le chanoine Raffaello Roncioni (2).... Je ne regrette pas de m'être écarté quelque temps de mes études particulières pour donner mes soins à cette pièce. Elle n'éclaircit, il est vrai, aucune des nombreuses questions relatives à la condition des Romains vaincus par les Lombards, questions fort agitées parmi les érudits de notre temps; mais elle peut fournir quelques renseignements qui ne sont pas à dédaigner, notamment un nouveau majordome de la cour des rois lombards, et dont l'existence ne soulève point

(1) Le titre donné à cette charte par ses éditeurs italiens est ainsi conçu: Charta Langobarda an. DCCLXII; in tabulario Roncioniano, Pisis, sub no II.

(2) Trovasi questa carta nel celebre archivio di monumenti raccolti gia del canonico Raffaello Roncioni le cui Storie Pisane, furono teste pubblicate nell' Archivio storico. Voy. ci-dessus, t. VI, p. 476 de la Bibliothèque de l'éc. des Chartes.

de doute. » M. Capei a fait suivre le texte de la pièce qu'il a publiée d'une Illustrazione, c'est-à-dire, d'un commentaire, dans lequel il éclaircit quelques-unes des difficultés qu'elle soulève. Sa lettre au marquis Capponi, datée du 5 avril 1845, et le travail qu'elle accompagne, parurent d'abord dans les Annali delle Università Toscane; puis, furent, peu de temps après, imprimés une seconde fois dans un utile recueil dont nous avons parlé précédemment, l'Archivio storico Italiano (1), qui reproduisit, sans y rien changer, l'article des Annali delle Università Toscane. Nous ne suivrons pas cet exemple, et nous n'emprunterons à M. Capei, comme on le verra plus loin, qu'une partie de son travail.

Voici le texte de la charte; nos quelques observations viendront ensuite. Nous avons nécessairement suivi avec fidélité la leçon de M. Capei; nous avons, comme lui, indiqué exactement par deux crochets [] les endroits qu'il a restitués, et par un trait | la fin de chaque ligne de la charte. Le seul changement que nous ayons apporté à sa leçon, est d'avoir substitué une ponctuation serrée et qui fixe le sens, à la faible ponctuation de l'original qu'il paraît avoir intégralement conservée.

† In nomine d[omi]ni, dum ex juss[ione] domni præcell[entissimi] Desiderii regis resedissemus nos, ill[ustri]bus veris, Gisilpert de Verona, Vursio maj[or]d[omus] | et Arsiulf gast[aldius], Ticino in sacro palatio, ibique venerunt in nostri presentia Tarso gasind[ius] domni regis, civi[tatis] Pistoriens[is], qui causa Rodtrude | peragebat, nec non et Alpert de civi[tate] Pisana. Dicebat ipse Tarso: quia tu Alpert contra ordine[m] introisti in res q[uon]d[am] Auriperti | germani tui, eo quod ipse germanus tuus per cartul[am] sue ordinationis instituit exenodochio in alimoniis et subsidiis pauperum | et statuit ut per pontificem civitatis] Pisane rectum et guvernatum fieri deber[it] absque negligentiam et si ipse neglegeret, rectum | fierit per ipsa Rottruda, ideo, ut dixi, tibi res ipsas nihil pertenit et debis eas nobis relaxare et justitiam facere ac.... c[ont]ra responde|bat ipse Alpert: nihil mihi impedit si ipse Auripert judicatum fecit de suis rebus aut exenodochium quia ecce exemplar [cartu]le | convenentie quam ipse Auripert mec[um] factam habuit ut si sine filios legitimos unus de nobis ab ac luce decederit,

(1) Nous avons parlé de ce recueil plus haut, t. VI, p. 476. L'article de M. Capei occupe les pages 111 à 125 du t. II de l'Archivio storico.

unus alteri | deberemus succedere; et quia ipse Auripert sine filios decessit, ego illi succedere debeo. Replecabat adversus eum Tarso: de | exemplar quam ostendis mihi non impedit, quia autentica exinde non habis et nec per thinx est facta nec per launichild; star[e] | non potuissit etiamsi autentic[am] de inde habuissis, nam ecce exemplar de ipso judicato Auriperti qualit[er] ipse res suas [omnes] | in pauperes largibit; stare legibus debit. Asserens iterum adversus eum ipse Alpert : si istam [cartulam quia non autenticam (1)] | stare non debit, tu Tarso, quomodo ista exemplar judicati stabelire velis? Respondebat adversus eum [iterum Tarso] (2): | exemplar stare debit quia judicatum ipsum factum fuit et per preceptum domni Aistulfi regis firmatum. Tunc nos s[upra] s[crip]ti judecis dum omnem eorum audissemus altergationis fecemus nobis relegere ipsa exemplar ordinationis | quam Auripert fecerat ubi legebatur quod de rebus suis senodochio esse statuerat et rectum fierit per Rodtrudam et licentiam haberit ipsa de mobelibus rebus vel usumfructum in die obitus sui dare pro anima sua et quatragenta nomina | homenis livertarit. Simul et fecimus nobis relegere illam exemplar convenentiæ quam Alpert ostendebat | et dum per ambarum partium monimena et altergationis causam ipsam inquireremus, paruit nobis rectum ut illud judicatum quod pro animæ suæ remedium quod (3) Auripert fecerit stare deberit et esset exenedochio sicut | ipse statuerat et non haberit adversus ipsum exenedochio aliquid quod reppeter[it], quia ejus cartul[am] quamquam | exemplar tantummodo essit et autentica exinde non haberit stare nullomodo deberit quia nec per garatihi[nx] nec per launichild factam non erat sicut edicti contenit textus. Cum autem in supradicti princepis presentia | conjunxesemus omnia et per ordine[m] rettulemus altergationem eorum simul et quod monimena ipsa con tenebatur, placuit pietati ejus quod nos recte dedissemus judicium. Et adhuc ipse princeps | dixit nobis quod judicatum ipsum vedissit et per ejus rogum domnus Aistulf eum per suum preceptum firmassit. Unde, qual[iter] in nostri presentia actum vel definitum est, presentem notitia | judicati Leontace notario facere admonuemus. Et ego Petrus per ipsius dictato scripsi, anno domi|norum nostrorum Desiderii et Adelchis regibus in d[e]i nomine sexto et tertio; per indict[ionem] quintadecima. fel[iciter]. |

(1) Cette leçon est douteuse. M. Capei déclare que dans le texte il manque sur ces quatre mots environ 18 lettres.

(2) Ces deux mots sont restitués par M. Capei. Il manque environ dix lettres en cet endroit dans la charte.

(3) Rectius quondam, dit avec raison M. Capei.

Signum manus Gisilpert qui hunc judicium dedit. I

Signum manus Bursioni maj[or]d[omi] qui hunc judicium dedit. [ Signum manus Arsiulf gast[aldionis] qui hunc judicium dedit. | (1) Au dos de la pièce, en écriture un peu moins ancienne, on lit : Exemplar de judicato, tempore Desiderii.

Les faits contenus dans cet acte sont assez multipliés pour qu'il ne soit pas inutile d'en reprendre brièvement le récit. Deux plaideurs se présenteut dans le palais royal de Pavie, devant trois juges nommés par Didier, roi des Lombards. L'un des plaideurs est Tarso, gasinde, c'est-à-dire, domestique du roi, qui comparait au nom d'une femme nommée Rottrude; l'autre est Alpert, de Pise. Les trois délégués du roi prononcent leur jugement en ces termes :

-

Tarso a réclamé de toi, Alpert, les biens de ton frère Auripert, dont tu t'es emparé, quoique tu n'en eusses pas le droit, puisqu'Auripert a fait un acte par lequel il a consacré ses biens à l'établissement d'un hôpital dont il a confié le soin et la direction à l'évêque de Pise, en chargeant Rottrude, en cas de négligence de la part de l'évêque, d'exécuter sa volonté. Peu m'importe, a répondu Alpert, que mon frère ait disposé ainsi de ses biens, car voici un acte par lequel nous sommes convenus lui et moi, que si l'un de nous mourait sans fils légitime, l'autre lui succéderait; or, comme c'est ce qui lui est arrivé, je dois être son héritier. Tarso répliquait: Ton acte ne peut m'être opposé, parce qu'il n'a pas la forme authentique, et que la donation n'a été faite ni par thinx ni par launichild. Ensuite, lors même qu'elle serait authentique, ta charte serait sans valeur, car voici l'acte par lequel Auripert donne tous ses biens aux pauAlpert insista Si l'acte que je présente n'a pas de valeur, sur quoi, Tarso, fais-tu reposer la validité du tien?-Sur ce que la disposition, répondit celui-ci, a été faite en effet par Auripert, puis confirmée par un ordre du roi Aistolfe. trois juges se firent alors relire l'acte par lequel Auripert disposait de ses biens: on y voyait qu'il avait ordonné la fondation d'un hôpital, et qu'il s'en était remis pour l'exécution de sa volonté à Rottrude, à laquelle il accordait la permission de pren

vres.

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:

Les

(1) M. Capei fait observer que cette pièce n'est probablement pas un original, mais seulement une copie; ce qui se confirme, dit-il, en remarquant qu'après le mot signum placé à la fin de la pièce devant les noms de ceux qui l'ont délivrée, il manque le seing.

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dre sur ses biens à lui, pour faire des donations de choses mobilières ou d'usufruits, et pour affranchir quarante serfs, afin d'assurer au jour de sa mort à elle le salut de son âme. Les juges se firent aussi relire le texte du contrat produit par Alpert, et il leur parut juste, disent-ils, que le testament d'Auripert fût déclaré valable, et que son hôpital fût établi sans qu'il y eût rien à distraire des biens qu'il y avait affectés, la charte sur laquelle s'appuyait son frère n'étant qu'un acte non authentique et sans validité. Les juges terminent leur récit par ces paroles : Lorsque nous eûmes résumé tous ces faits en la présence du roi, et que nous eûmes fait connaître de point en point le débat qui s'élevait entre les parties, et en même temps les titres sur lesquels elles se fondaient, il déclara que nous avions bien jugé; et le prince nous dit même de plus qu'il avait vu lui-même la dernière disposition d'Auripert, car c'était à sa propre requête que le roi Aistolphe avait rendu l'ordonnance confirmatrice de cet acte. En conséquence de tous ces faits, ils avaient donné l'ordre au notaire Lontace de rédiger la présente notice du juge

ment.

Ce procès est clair. Le riche Lombard Auripert était convenu avec son frère de lui laisser tous ses biens; mais la mort approchant, il avait disposé par testament de toute sa fortune pour une œuvre pie. La donation étant antérieure, nul doute que le frère n'eût obtenu gain de cause, si elle eût été revêtue des formes légales; mais ces formes lui manquant, ce sont les légataires qui gagnent leur cause.

La donation n'est pas valable, parce que l'acte allégué pour la prouver n'est pas authentique, dit la charte, et qu'elle n'a été opérée d'ailleurs ni par thinx (1) ni par launichild. C'étaient donc trois différents modes dont les deux frères eussent pu user pour faire leur donation. Le premier, la rédaction d'un acte écrit, avait besoin pour être valable de formes particulières. Quelles étaient ces formes? C'est ce qu'il nous est d'autant moins possible de préciser, que nous ne voyons pas d'allusion à ce point dans les lois lombardes. Cela peut être la signature du dona

(1) Notre charte se sert au commencement du mot thinx et à la fin du mot garathinx, tout à fait dans le même sens. Le second de ces mots est en effet le même que le premier; il est seulement augmenté de la particule gar, synonyme de omninò. L'observation est de du Cange.

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