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L'ÉCOLE DES CHARTES.

Les examens d'entrée et de sortie ont eu lieu à l'École des chartes dans le courant du mois de décembre dernier, suivant l'usage établi jusqu'alors. L'examen de sortie, par suite duquel sont délivrés, comme l'on sait, les brevets d'archiviste-paléographe, a été subi, le lundi 7 et le mardi 8 décembre, par les élèves pensionnaires admis à l'École le 1er janvier 1844. L'examen d'entrée, qui était, sous le régime de l'ancienne ordonnance, un concours entre les élèves du cours préparatoire professé par M. Guérard, a été subi le 21 et le 22 décembre, par vingt candidats qui avaient suivi ce cours durant l'année 1846. Nous avons publié, dans la chronique de notre dernière livraison, le résultat de l'examen de sortie; on trouvera ci-après, dans la chronique du présent numéro, le résultat de l'examen d'entrée; nous ferons connaître ici à nos lecteurs la matière de l'un et de l'autre. Ceux qui s'occupent de paléographie nous sauront gré sans doute d'avoir joint au texte les facsimile qui ont été mis entre les mains des élèves.

Examen de sortie. Cet examen s'est composé de deux épreuves, l'une orale, l'autre écrite; et, chaque fois, les candidats ont eu à lire et à expliquer une charte latine et une charte en langue romane du Midi.

La charte latine qui a servi à l'épreuve orale est sans date, et les candidats ne pouvaient guère lui en assigner une que par l'inspection de l'écriture, à moins de connaître par hasard l'époque à laquelle vivait l'auteur de cette charte, Hugues, seigneur de Crèvecœur, en Picardie. Le P. Anselme (1) dit de lui qu'il était le troisième fils d'Évrard, troisième du nom, sire de Breteuil, et de Béatrix de Coucy; qu'il donna sa

(1) Hist. généalogique de la maison de France, etc., t. VII, p. 109.

terre de Mormaison à l'abbaye de Saint Lucien de Beauvais, du consentement de sa femme et de ses enfants, et que Barthélemy, évêque de Beauvais, confirma cette donation en 1168. Il résulte de là que la charte de l'examen est antérieure à 1168, puisque le donateur commence par y déclarer que toute la terre de Mormaison est de son fief, et qu'il en distrait une partie pour la donner à l'abbaye de Saint-Lucien. D'un autre côté, cette charte n'est pas antérieure à 1162, époque à laquelle l'évêque Barthélemy, qui la fit sceller de son sceau, monta sur le siége épiscopal de Beauvais. Elle ne présente aucune difficulté de lecture, et n'est guère plus malaisée à comprendre qu'à lire. On peut remarquer seulement que l'invocation est écrite en caractères allongés, chose assez rare à cette époque. Nous transcrivons ici la pièce en entier, en plaçant entre crochets les passages supprimés dans le fac simile :

(Entre 1162 et 1168.)

Jn

In nomine sancte et individue Trinitatis, amen. Ego Hugo de Crievecuer (1) omnibus tam futuris quam presentibus notifico quia tota terra de Mortmeisuns est de feodo meo : totum ergo feodum d'Eubin, quod est in predicta terra ecclesie beati Luciani, jure perpetuo, libere, quiete et absolute possidendum ego et uxor mea [Ada et filii et filie mee omnes, videlicet Ebrardus, gelrannus, Mathildis, Sarra, Petronilla] prorsus concessimus. Similiter feodum Rogeri cognomento Fere, quod Odo de Rivoilo tenet, quantum videlicet prefata Ecclesia sibi adquisivit et adhuc adquirere atque dirumpere poterit, eidem ecclesie jure perpetuo possidendum ego et uxor mea et filii et filie mee omnes concessimus; salvo tamen redditu hominis mei, id est predicti Odonis de Rivoilo, et meo, videlicet medietate campartii. Ut autem opus istud ratum et firmum in seculum habeatur, domnum Bartholomeum, Belvacensem episcopum, rogavi ut hanc concessionem nostram sigilli sui auctoritate et testimonio corroboraret, muniret et confirmaret. Huic rei testes interfuerunt [ex parte monachorum, monachi: Petrus abbas Albemarle; Gibuinus, prepositus; Benedictus, Gualerannus, clerici; Johannes, archidiaconus; Willelmus de Gerboredo, Petrus de Lavercines, laici; Bartholomeus, major; Simon d'Iwennies; Bernerus de Hestoltmeisnil; Hubertus, marescallus; Simon, cocus; Hugo de Luci, filius Gisle

(1) Crèvecœur, Oise, arrond. de Clermont, canton de Crèvecœur.

mari; Guarinus de Coisels; ex parte vero mea, Bartholomeus presbyter de Crievecuer, Thomas Havoz, Petrus de Crievecuer, Robertus Gros vileins].

La charte romane qui a servi à la même épreuve est moins aisée à lire que celle qui précède; elle est datée de l'an 1310, du troisième jour avant les nones d'avril, regnante Philippo rege Francorum, ce qui présentait aux concurrents deux petits problèmes de chronologie à résoudre. L'objet de l'acte est un acensement fait par Jean d'Albières, seigneur de Viaus (1), d'une pièce de terre située en Albigeois, moyennant une redevance annuelle de trois mines d'avoine, à la mesure de Cordes (2), payable à la Saint-Julien, et une poule de cens payable à Noël. Outre les petites difficultés de lecture qu'offrait cette charte, et dont on jugera aisément par le facsimile que nous publions, elle donnait le moyen aux examinateurs d'adresser aux candidats un certain nombre de questions de linguistique et de droit sur lesquelles nous n'avons pas dessein d'arrêter le lecteur ; nous nous contenterons de lui soumettre le texte de la pièce :

(3 avril 1310.)

Anno Domini millesimo trecentesimo decimo, silicet tertio nonas aprilis, regnante Philippo rege Francorum. Conoguda causa sia ha totz homes prezens que ieu Jhoan d'Albieira, senher del castel de Viaus, per mi e per totz los meus, doni e lauzi a sces e ad acapte, per totz tems, vos, Peire Carrandier de Campanhac, et ha totz homes e fempnas a cui vos o volratz, foras cavazier o clergue, una pessa de terra, al camp de Regambal, ques te am l'estrada comunal, et am la terra d'En Jhoan Celhier, et am la terra d'En Jhoan Viguier, et am la vostra terra meteisha, tota entieirament, on mielhs jes, ab intrars et ab ishirs et ab totz sos autres apertenemens, quals que siu, et ab albres domestgues e salvatgues, per tres eiminas de civada, a meszura de Cordoa, que m'en devetz donar, cadans a San Jolia, et per una gualina de sces, cadans a Nadal portat lo tot a Campanhac, e mon osdal, e per setze diners tornes negres de

(1) Vieux ou Viaur (la Garde-Viaur), localités de l'Albigeois, auj. dans l'arr. de Gaillac (Tarn), ainsi que Campagnac, d'où l'acte est daté.

(2) Près de Gaillac; en latin Cordua (D. Vaissète).

reire acapte, cant si escairau, e mas autras senhorias que i retienh, se-s-i aveniu; e seriei voinh guirens, e tienh me per paguatz dels acaptes de tot quant hom m'en avia aguz a far sa en reires. [E ieu, Peire Carrandier, prendi e recebi aquest asscessament davantdig de vos, senhen Jhoan d'Albieira, tot en aissi coma sobredig es; e prometi vos a pagar cadans lo dig sces, als digz termes et el dig loc, els acaptes e las senhorias cant si escairau ; e us seriei bos e lias tenensiers, e us gardariei lodig fieu de mermar a mon poder, e lous mostrariei de boula em boula totas horas que per vos ne sia requeregutz. Actum apud Campanhacum, in ospicio predicti domini Jhoannis de Alberia, anno et die quibus supra. Hujus rei sunt testes D. Costa, P. Teisheire, B. de Nartiguas, et ego Petrus Domicelh, publicus notarius senescallie Tholozane et Albiensis, qui hanc cartam scripsi et signavi de sces. ]

Pour l'épreuve écrite, on avait remis à chacun des candidats le facsimile partiel ou complet des deux chartes que nous allons rapporter ciaprès. La première, qui est latine et datée de 1190, émane de Pierre, vidame de Gerberoi, qui, du consentement de son fils et de sa fille, fait donation à l'abbaye de Saint-Lucien de Beauvais de son droit de voirie sur le territoire compris entre Pisseleu et Fontaine d'une part, et, de l'autre, entre Luchy et Guehengnies, qui sont aujourd'hui quatre petites localités du département de l'Oise. Cette donation est faite à de certaines conditions et sous certaines réserves, que les candidats n'ont pas démêlées et expliquées sans quelque peine. La difficulté était de bien comprendre la condition des terres, possédées en fief par le vidame, mais exploitées par les serfs de Saint-Lucien, dont les droits péagers sont abandonnés à l'abbaye. Dès lors on s'expliquait la retenue des droits nobles, tels que la saisie et les amendes produites par gages de bataille. La charte, du reste, n'était point difficile à lire. En voici le texte :

(1190.)

Ego Petrus, Gerboredi vicedominus, tam presentibus quam futuris notifico quod, assensu filii mei Petri et filie mee Milissendis, dedi in perpetuam elemosinam ecclesie Sancti Luciani Belvacensis viariam cum redditu et justicia, sicut eam habebam, inter Pisseleu et Fontanas, inter Gahanni et Luciacum, in feodo et terris que ab hominibus et servientibus

Sancti Luciani excoluntur. De duellis, quod ad me pertinet, in manu mea retineo. Quod si hominum meorum feoda, que de me tenent, qualibet occasione saisiero, tantummodo redditum quem haberent, recipiam, hominibus et servientibus predicte ecclesie nullam molestiam vel jacturam a me vel ab heredibus meis super hoc sustinentibus. In recompensationem autem hujus beneficii, de quatuor modiis frumenti quos apud quercum Giheri a me recipiebat annuatim, tres mihi remisit ecclesia; et ecclesia Sancte Marie de Sancto-Paulo quartum illi pro me, singulis annis, restituet. Hujus si quidem elemosine ego et heredes mei tutores erimus et defensores. Actum anno incarnationis Domini millesimo centesimo nonagesimo.

La charte romane, qui date de 1195, renferme une donation pieuse, mais non pas entièrement gratuite, faite par un particulier nommé Raymond de Rodez, sa femme, ses filles et son gendre, à Sainte-Marie de Bonne-Combe, abbaye de l'ordre des Citeaux, située dans le diocèse de Rodez. La donation porte sur deux domaines qui étaient déjà hypothéqués à un tiers, lequel fait abandon de ses droits pour la fondation de son obit à Bonne-Combe.

Anno ab incarnatione Domini millesimo centesimo nonagesimo quinto. Eu Raimonz de Rodes et eu Uga Atizailla, sa moiller, et eu Brunixenz et Alazais, lor fillas, et eu Golfers, maritz de Brunixens, donam et autorgam e desanparam a Deu et a Santa Maria de Bona Cumba, et a Bertran l'abat et als fraires que ara i son ni per adenant i serau, per amor de Deu et dellas armas de nostres paires et de nostras maires, so es assaber lo meig feu del mas maior Dotenx, el meig feu del mas della Caireira, e tox quant nos i aviam a far ni om ni femena de nos. Et aquest do faim senes angan a la lor bona entencio; e tot aizo, en aici con es sobrescriut, tenrem per jasse, e serem vos ne guirent a dreig; e toig nos sobredig avem o jur[at] sobre sans evangelis tocatz. E d'aizo an nos donatz CC. solz de Rodenes de caritat, si que [nos] en tenem per pagat que ad els non remas res en deude; e se plus val, donam vos o per a[mor] de Deu per nom de do. [E aqueig mas sobredig ero a peinnora per oit marx e demeig d'argent fi; e Esteves de Lastroa avia aquesta peinnora, e donet la a Bona Cumba, ab toz o qu'el i avia et ab son cors que i donet. Senh Willelm della Baireira, R. lo capellas de Sant Amauz;

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