Il traînera les chars que le Belge nous donne. O vous, qui desirez qu'en leur emploi dociles Les coursiers, les taureaux vous soient long-tems utiles, Pour soutenir en eux la vigueur qui vous sert, Sauvez-les de l'amour, c'est l'amour qui les perd. Qu'en des lieux isolés un fleuve ou des montagnes Séparent le taureau de ses jeunes compagnes; Formez-lui sous vos toîts des réduits écartés. La genisse qui broute ou marche à ses côtés, De ses regards lascifs lentement le dévore; Il oublîra les prés pour l'objet qu'il adore.. La femelle souvent, par ses tendres appas, Engage deux rivaux dans de cruels combats. Dans le bois cependant elle paît sans allarmes ; Tous deux brûlans d'amour se disputent ses charmes. Furieux l'un de l'autre ils déchirent le flanc; Leur corps percé de coups est inondé de sang. Le prix de la conquête augmente. leur courage, Et le ciel retentit des efforts de leur rage. Nec mos bellantes unà stabulare; sed alter Omne adeo genus in terris hominumque, ferarumque, Et genus æquoreum, pecudes, pictæque volucres In furias ignemque ruunt: amor omnibus idem. Tempore non alio catulorum oblita leæna, Sævior erravit campis: nec funera vulgò Tam multa informes ursi, stragemque dedêre Ils ne sauroient ensemble habiter désormais. Le vaincu porte ailleurs sa honte & ses regrets. Tel est donc de l'amour le prestige invincible, Hommes, dieux, animaux, tous ont un cœur sensible Tous brûlent en aimant, d'une égale fureur. La lionne qu'embrase une amoureuse ardeur, Signale ses desirs au milieu du carnage; Le tigre est plus cruel; l'ours fait plus de ravage. Per sylvas; tum sævus aper, tum pessima tigris. Ac neque eos jam frena virúm, neque verbera sæva, Ipse ruit dentesque Sabellicus exacuit sus, Et pede prosubigit terram, fricat arbore costas, Quid lynces Bacchi variæ, & genus acre luporum, Atque canum? quid,quæ imbelles dant prœlia cervi? Scilicet ante omnes furor est insignis equarum: Et mentem Venus ipsa dedit, quo tempore Glauci Potniades malis membra absumpsêre quadriga. Illas ducit amor trans Gargara, transque sonantem Ascanium superant montes, & flumina tranant : Qu'alors le voyageur, à qui ses jours sont chers, Voyez-vous du coursier le tremblement extrême, Il ne craint ni les coups, ni le frein, ni la voix, Il exerce son corps, il aiguise ses dents. Je vois un jeune amant 17, ô tendresse insensée! Sa mère en vain l'appelle, en vain son triste sort Fend les flots, suit l'amour, l'implore & fait naufrage. Les lynx, les loups cruels, les chiens, les cerfs tremblans S'exposent pour l'amour à des combats sanglans. Des cavales sur-tout l'ardeur est incroyable. Vénus dans ses fureurs souvent impitoyable, Par ses traits embrasés alluma leur transport, Pour punir de Glaucus 18 le sacrilège effort. Le traître amour les guide, ou plutôt les égare Au-delà de l'Ascagne 1, au-delà du Gargare 2o, 20 |