Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

ques méchans écrivains, auxquels il ne rougit pas de reprocher leur misère, il prodigue l'encens de la louange à tout ce qui peut le prôner ou le protéger à la cour. Le généreux courage, que celui d'attaquer Cotin, Cas-sagne ou Chapelain ? Et contre Chapelain, qu'est - ce encore qui l'irrite? Qu'il soit le mieux renté de tous les beaux esprits! Passe encore s'il l'eût voulu punir d'avoir osé se déclarer pour Scudéri contre Corneille, et de s'être mêlé de juger le Cid. Boileau, je le répète encore avoit reçu de la nature un sens droit, un jugement solide; et l'étude lui avoit donné tout le talent qu'on peut avoir sans la sensibilité et la chaleur de l'ame: mais il lui manquoit ces deux élémens du génie: car il est très-vrai, comme l'a dit le vertueux et sensible Vauvenargues, que les grandes pensées viennent du cœur.

,

Un jeune poète de nos jours s'est essayé dans le genre de la satyre, il en à fait une contre le luxe; et, dans ce coup d'essai, il a laissé loin en arrière celui que les pédans appellent le satyrique français; il a fait voir de quel style brûlant un homme, profondément blessé des vices de son siècle, sait les peindre et les attaquer; il a montré qu'on pouvoit avoir la vigueur d'Aristophane sans impudence et sans noirceur; la véhémence de Juvenal sans déclamation; l'agrément, la gaieté d'Horace avec plus d'éloquence, de force et d'énergie; et une tournure de vers aussi correcte que Boileau, avec plus de facilité, de mouvement et de chaleur.

(M. MARMONTEL.)

VOICI

SAVAN T.

OICI le portrait que M. Van Effen fait du vrai savant comparé au pédant. Celui qui mérite véritablement le nom de savant est un homme qui sait un grand nombre de choses utiles, lesquelles, digérées par la méditation, peuvent fortifier son raisonnement, le rendre plus éclairé sur ses devoirs, en un mot lui faire passer la vie avec agrément et avec sagesse. Celui qui n'est en possession que du titre de savani, c'est-à-dire le pédant, s'est embarrassé l'esprit, sans discernement et sans choix, des plus inutiles vétilles de l'antiquité; il sait donner une généalogie à chaque mot; chez lui tout terme est arabe, chaldaïque, phé nicien; enfin il s'efforce d'apprendre ce qu'un homme raisonnable est en droit d'ignorer, pour se faire un mérite d'être instruit de ce que peu de personnes savent, et que tout homme de bon sens voudroit oublier, s'il l'avoit appris.

(ANONYME.)

LES

ES sucs ou liqueurs qui font impression sur l'organe du goût, sont ce qu'on appelle saveur, et quelquefois l'on donne ce nom même à leur impression.

Les saveurs violentes sont, pour l'ordinaire, désagréables; et les saveurs qui ne font que chatouiller pour ainsi dire l'organe, sont ordinairement agréables; mais il faut ajouter de plus que ces sensations exigent certaines dispositions de l'imagination qui reçoit les impressions.

Toutes saveurs douces ou légères ne sont pas agréables, ni les saveurs âcres désagréables; il est des douceurs qu'on appelle insipidité, et des âcres qu'on recherche.

En supposant même une saveur reconnue par plusieurs pour âcre, désagréable, on trouvera tel goût auquel cet acre plaira beaucoup, et un autre auquel le sucre le plus friand donnera des envies de vomir.

L'imagination entre donc pour sa part dans la sensation du goût, aussi bien que dans toutes les autres. Pourquoi haïssois-je jadis l'amertume du café, et qu'elle fait aujourd'hui mes délices ? pourquoi la première huître que j'ai avalée m'a-t-elle fait autant d'horreur qu'une médecine, et qu'insensiblement ce mets m'est devenu un des plus friands ragoûts? Cependant l'action du café et des huîtres sur mes organes n'a point changé : la disposition mécanique de ces organes est aussi toujours à peu près la même. Tout le changement est donc du côté de l'ame, qui ne se forme plus les mêmes idées à l'occasion des mêmes impressions. Il n'y a donc pas d'idée attachée essentiellement à telles ou telles impressions, au moins il n'y en a point que l'ame ne puisse changer; de là viennent ces goûts de mode, ces mets chéris dans un pays, détestés dans d'autres ; de là vient enfin qu'on s'accoutume au désagréable, qu'on le métamorphose quelquefois en un objet de plaisir, et qu'il tombe ensuite en un objet de dégoût.

(M. de JAUCOURT.)

[ocr errors]

L

SAVOIR VIVRE.

E SAVOIR VIVRE, dans notre nation, consiste à saisir les usages reçus, à avoir pour les autres toutes les manières convenables établies par la mode, à être honnête et poli dans la société; enfin à faire, avec aisance, avec grace, mille petits riens qui n'ont point de nom. Selon la pure morale et les idées de la droite raison, le savoir vivre ne consiste que dans les grandes et bonnes choses; car ce mot signifie remplir les devoirs de son état, en écarter toutes les futilités, et mener dignement la vie pour laquelle on est né.

[merged small][ocr errors]

FLEU

SCAMAN DR E.

LEUVE de l'Asie mineure, dans la Troade. Ce fleuve est fameux dans l'histoire du siége de Troye, et c'est à Homère qu'il doit sa célébrité.

Les illustres voyageurs anglais, qui nous ont donné les rines de Palmyre, passèrent quinze jours, en 1752, à faire sur les lieux une carte de la plaine du Scamandre, en tenant Homère à la main; c'est sur les bords du Scamandre, nous disent-ils, qu'on trouve de nouvelles beautés dans l'Iliade; et c'est dans le pays où Ulysse a voyagé et où Homère a chanté, que l'Odyssée a des charmes ravissans.

Julie, fille d'Auguste, traversant le Scamandre, pensa être submergée par les eaux de cette rivière, que le concours de plusieurs torrens avoit grossie tout-à-coup. Elle fit un crime aux habitans d'Ilium de ne lui avoir point envoyé de guides; et elle ne les avoit pas seulement avertis de son passage. Agrippa, mari de Julie, parut fort sensible à ce péril, et condamna les pauvres habitans à une amende de cent mille dragmes, qu'il eut bien de la peine à leur remettre. Je ne crois pas que son amitié pour Julie fût la vraie cause de sa colère, car il n'avoit pas une grande estime pour elle; mais la politique fut le véritable ressort de sa conduite. Il se fâcha, soit pour faire croire à Auguste qu'il prenoit vivement à cœur les intérêts de Julie, soit pour maintenir son crédit. Il n'est point libre à un sujet, marié avec la fille de son souverain, de négliger la punition de ceux qui manquent à son épouse; quelque gré qu'il leur en sache dans le fond du cœur, il faut qu'il fasse paroître son mécontentement. Voilà la raison qui l'engagea à se rétracter avec peine de l'injustice de son amende; il fut ravi qu'Auguste pût être instruit de son zèle.

On prétend que les eaux du Scamandre avoient la propriété de rendre blonds les cheveux des femmes qui s'y baignoient, et que les femmes troyennes se prévalurent de cette prérogative. On ajoute même que les trois déesses, avant que de se présenter à Pâris pour être jugées sur leur

« ZurückWeiter »