Images de page
PDF
ePub

PRALARD, RICHELET.

69

mier, parlé des Tropes, sont dans l'erreur, puisqu'on en parle déjà dans l'ouvrage que nous citons.

LES TROPES DOIVENT ÊTRE PROPORTIONEZ A L'IDÉE
QU'ON VEUT DONNER.

« L'usage des Tropes est absolument necessaire parce que souvent les mots ordinaires ne suffisent pas. Si je veux donner l'idée d'un rocher dont la hauteur est extraordinaire; ces termes grand, haut, élevé, qui se donnent aux rochers d'une hauteur commune n'en feront qu'une peinture imparfaite : mais disant que ce rocher semble « menacer le Ciel », l'idée du « Ciel » qui est la chose la plus élevée de toute la nature, l'idée de ce mot « menacer >> qui convient à un homme qui est au-dessus des autres, forme l'idée de la hauteur extraordinaire que je ne pouvois exprimer d'une autre manière que par cette hyperbole. On dit plus, de crainte de ne pas dire assez ».

1680. César-Pierre RICHELET, est un de ces linguistes comme on en voit peu, comme on n'en voit pas. Il a publié plusieurs ouvrages: un Dictionnaire des Rimes; un Traité de Versification; puis une Grammaire, un Traité des Genres; qui avaient déjà paru en 1671.

Son œuvre capitale est un Dictionnaire français, publié d'abord à Genève et reproduit plusieurs fois; entr'autres par Goujet à Lyon.

Nous disons que Richelet est un auteur comme on

[blocks in formation]

n'en voit pas. Ainsi pendant que deux cents lexicographes copient servilement le dictionnaire de l'Académie, (que tout le monde condamne), Richelet a osé, dans son livre, présenter les mots français dans leur forme vraie. Malgré les progrès immenses qui ont eu lieu en orthographie depuis deux cents ans, cet auteur est encore plus avancé par exemple que Littré qui vient de paraître. Quelques mots donneront une idée de l'orthographie à laquelle on sera forcé de revenir. Ainsi, dans un siècle ou deux, Richelet sera toutàfait de mode, du moins il faut l'espérer.

[blocks in formation]

D'ALLAIS, CHARPENTIER.

71

1681. D. V. D'ALLAIS, est l'auteur d'une « Grammaire raisonnée et méthodique contenant les règles les plus nécessaires de la langue française ». Cette œuvre qui sort des productions ordinaires à cette époque, peut marcher de front avec les grammaires de Chiflet, de Desmarais et même de Buffier; seulement elle n'a pas eu de retentissement. L'auteur y propose un alphabet méthodique, au moyen duquel il prétend que l'on pourrait facilement réfor mer notre orthographie, et détruire la plus grande difficulté de notre langue.

1683. François CHARPENTIER publia beaucoup d'ouvrages fort estimés. Nous faisons mention de cet écrivain à cause de son plaidoyer magnifique sur la langue française; voici à quelle occasion: il était partisan des inscriptions françaises sur les monuments publics. Un jour, dans un discours latin, prononcé dans la chapelle du Collége de Clermont en 1676, le R. P. Lucas, de la Compagnie de Jésus, faisant allusion à l'Académicien, déclara pour tels et tels autres motifs, que l'inscription à placer sur l'Arc de triomphe, à Paris, devait être en Latin.

Charpentier qui travaillait déjà à son ouvrage intitulé « De l'Excellence de la langue française », le termina en 1683. Les deux volumes dont il se compose sont une réfutation de la critique du R. P. Lucas. Il compare le Français avec le Latin, et tend à prouver que notre langue vivante l'emporte à différents points de vue, sur la langue morte. Il

[blocks in formation]

n'y a pas de livre qui fasse mieux ressortir les richesses et les défectuosités de ces deux langues, que celui que nous signalons ici. L'auteur fait preuve d'un savoir très-étendu dans le mécanisme des langues.

A l'occasion de ces inscriptions, il y eut de grandes discussions dans le monde savant les uns prirent fait et cause pour la langue française, les autres pour la langue latine enfin la langue française prévalut.

Charpentier était tout fier de son triomphe; aussi écrivit-il au comte de Bussy-Rabutin: « Je ne pouvais pas espérer un plus heureux succès de mon opinion que d'avoir fait résoudre le roi de faire effacer les inscriptions latines de tous les tableaux historiques de la grande galerie de Versailles, et d'y en mettre de françaises comme il y en a présentement.

1685. Pierre DANET a publié plusieurs dictionnaires français-latin, latin-français.

Une quatrième édition de son dictionnaire latinfrançais a paru en 1736; elle a été dédiée à Mgr le Dauphin, fils de Louis XV. L'auteur, en présentant les mots, commence par le sens propre et naturel, et y joint ensuite le sens figuré et métaphorique. Afin de rendre son ouvrage plus parfait et d'une plus grande utilité, il y fait voir les différents usages des mots, leur application dans les divers styles; il indique quand ils ne se prononcent pas comme ils s'écrivent.

JUGEMENTS DES SAVANTS.

73

Cependant comme cet ouvrage n'a rien de bien original, il a subi le sort des dictionnaires, forme académique; on le vend aujourd'hui à soixante centimes le kilo, lorsque la reliure n'est pas trop endommagée.

1685. Les JUGEMENTS DES SAVANTS tel est le titre d'un ouvrage publié d'abord en 9 vol., in-8°.

Les novices doivent penser qu'un pareil ouvrage est une boussole..... Pauvres jeunes gens! Voici d'abord comment Paul Bignon, le bibliothécaire du Roi, le principal organe de ce livre, débute:

<< Comme je fais profession de ne rien dire de moimême, je n'ai pas sujet d'appréhender qu'on m'oblige de répondre de la solidité et de la vérité de tous ces jugements ». Puis, plus loin, nous voyons: « Les censeurs que j'ai pris pour mes garants, n'ont point prétendu que leurs Jugements fussent des arrêts, mais qu'on les devait considérer comme de simples propositions qu'ils ont faites de leurs sentiments ». Voilà donc la base générale de ce qu'on appelle « Jugements des savants ». Ils ne disent rien d'eux-mêmes, et ne prennent aucune responsabilité.

[ocr errors]

Dans l'œuvre entière il est question d'une vingtaine de grammairiens avec quinze noms connus.

Quant à Meygret, Pelletier, des Autels, Joubert, inutile d'en parler (dit-on) puisqu'il y a eu des contestations publiques. Voilà un bon moyen de ne pas avoir à donner une appréciation quelconque. Si

« PrécédentContinuer »