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1857. Louis CAPART, a traité du « Tutoiement et du Vouvoiement ». Il commence par se demander comment s'est introduite, dans le langage, l'habitude de dire « Vous pour Tu, et Nous pour Je». Alors il se répond à lui-même :

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« Je comprends, dit-il, qu'un valet, voulant marquer la grande distance qui le sépare de son maître, emploie avec lui des expressions qui fassent bien ressortir les distances. Monsieur veut-il me permettre de lui faire une observation? Il est certain qu'un « Tu », adressé par un cocher à sa maîtresse de maison, ferait un mauvais effet. Oui, on froisserait les convenances, si l'on disait à une dame qu'on ne connaît pas : Veux-tu me permettre de passer ! Mais de là, à « vouvoyer » son frère et sa sœur, son ami, son père et les personnes que l'on fréquente, surtout quand elles sont du même sexe, c'est aller trop loin ». A ce sujet, l'auteur fait ressortir tout le dédain que l'on peut marquer en employant parfois le « vous >».

« Un père, prévenu que son fils se propose de forcer son secrétaire pour le voler, y met une somme d'argent, avec ce billet foudroyant :

Puisqu'un amour infâme a pour « vous » tant d'appas, Qu'il << vous >> fait renoncer à « votre » propre estime, Je veux « vous » épargner un crime :

Acceptez, ne dérobez pas.

Jusqu'alors, ce père avait dit « tu»; mais en présence de l'infamie de son fils, il se décide à dire

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<< vous ». Pourquoi, si « tu», est trop familier, l'emploie-t-on pour l'Eternel? Quand on tutoie Dieu, ne pourrait-on pas bien tutoyer le premier venu, sans le désobliger!

-L'auteur conclut ainsi : « Tu et Vous », seront toujours bien employés par les hommes d'excellente compagnie; les sots seuls peuvent se tromper. Quant au « Nous pour Je », qu'on trouve chez les auteurs, c'est une véritable inconséquence, que rien ne justifie. Si moi-même, dans le cours de cet ouvrage, je mets parfois « Nous pour Je », c'est que je ne veux pas trop contrarier les usages. Si j'écrivais selon mon goût, trop de monde s'écrierait que je ne connais même pas « l'orthographe » ! J'avoue que les ignorants me font peur; ils sont si puissants !

1857. LANGLET-MORTIER. « Nouvelles et véritables Étymologies médicales tirées du Gaulois ». Voilà encore un ouvrage à consulter par ceux qui veulent approfondir la question des origines de la langue française.

Inutile de dire que l'auteur est Gaulois et nullement Romain.

1858. Ernest RENAN. Voici ce que dit l'auteur dans son livre intitulé: «Origine du langage ».

<< Toutes les fois que les grammairiens ont essayé de dessein prémédité de réformer une langue, ils n'ont réussi qu'à la rendre lourde, sans expression, et souvent moins logique que le plus humble patois.

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Qu'on lise, par exemple, les notes que Duclos a ajoutées à la « Grammaire générale » de Port-Royal: jamais peut-être la prétention de critiquer la nature, qui domine le xvIIe siècle, ne s'est plus naïvement avouée. A chaque instant, l'Académicien cherche à montrer les inconséquences et les « fautes » que renferme le langage, tel que le peuple l'a fait. Il sourit de pitié sur la bizarrerie de l'usage, et il voudrait en corriger les écarts par la raison des grammairiens, sans s'apercevoir que les tours qu'il veut supprimer sont d'ordinaire bien préférables à ceux qu'il veut y substituer.

<< L'esprit humain, laissé à lui-même, ne recherche point à plaisir les anomalies. La langue des enfants et du peuple est d'ordinaire plus expressive que la langue consacrée par les grammairiens. Ici, comme toujours, l'œuvre artificielle de l'homme, lorsqu'elle s'attribue une mission réformatrice, détruit l'œuvre de la nature. Et combien celle-ci n'estelle pas plus vivante et plus vraie ! En parcourant le dictionnaire de la langue française, on remarque que les mots vraiment nationaux, sont l'œuvre du peuple, tandis que les mots introduits par les gram -mairiens conservent toujours la trace du pédantisme et d'une latinité à peine dissimulée ».

Si nous comprenons bien Renan, dans son << Origine du Langage », le Grammairien est un être nuisible à l'étude des langues. L'accusation est claire et directe; et comme Duclos personnifie la science grammaticale, il ne pouvait pas échapper

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aux morsures envenimées de l'ancien professeur à la Sorbonne. Renan s'est fait l'apologiste, le défenseur de l'ignorance et de l'incapacité, et nous ne chercherons pas à lui contester le plus léger de ses attributs. Nous ne pouvons pas, cependant, laisser passer sous silence quelques faits controuvés, à l'égard de Port-Royal et de Duclos.

Il n'est jamais venu à la pensée du critique de Port-Royal, de contester la puissance respectable de ce principe Le bon langage est le maître des langues; bien moins encore de critiquer la nature qui domine le XVIIIe siècle; mais il a protesté contre le mauvais usage, qu'on voudrait imposer comme loi, sous prétexte que l'usage, tel qu'il soit, fasse loi.

En attaquant le principe latin, Renan ne s'est même pas aperçu, paraît-il, que Port-Royal qu'il adore, est latiniste par excellence; enfin, nous devons penser que Renan a parlé de Port-Royal et de Duclos, sans avoir rien lu de ces écrivains concernant la grammaire française.

1858. Désiré SCOTT, a publié une petite brochure sur les « Noms et les Prénoms ». Mile Charlotte sera peutêtre contente de savoir que ce nom est d'origine germanique, et veut dire : vaillante. Agathe, provient du Grec, et veut dire bonne. Agnès, provient encore du Grec, et veut dire pure, chaste.

1858. Lazare BENLOEW, a publié, entr'autres ouvrages, un « Aperçu général de la science compara

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tive de la langue ». L'auteur fait des observations sur les langues, comme Vaugelas et ses disciples faisaient autrefois des Remarques sur la phraséologie.

1858. Anatole de CHEVALET. « Origine et Formation de la langue française ». - Cet ouvrage remarquable a différents genres d'utilité La préface est un aperçu historique sur les langues qui ont été parlées successivement entre le Rhin et la Loire; voilà pour l'histoire. Remarquons en passant qu'il n'y a encore rien de bien défini sur l'origine de la langue française, et qu'alors l'homme qui veut savoir, doit nécessairement étudier une vingtaine d'auteurs, très sérieux, qui ont traité de cette grande question. Il va sans dire qu'il serait téméraire, pour un simple rapporteur, de se prononcer sur ce point.

De Chevallet, arrive bientôt au premier document de l'écriture française au viie siècle, qui s'appelait alors, et qu'on désigne encore aujourd'hui, sous le nom de langue Romane. Puis, il explique l'élément Celtique, et l'élément Germanique; et comme complément, il donne des exemples nombreux en forme de dictionnaire. Alors son livre, après avoir servi à nous éclairer sur l'histoire générale, nous sert encore à nous instruire sur l'histoire des mots et des phrases. D'autant plus que l'auteur accompagne toujours ses explications, d'un grand nombre d'exemples qui constituent de plus en plus un dictionnaire du vieux langage; je veux dire cette période du xi1o à la fin du xve siècle.

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