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HENRY, LETELLIER.

vous n'obtiendriez pas un diplôme de simple instituteur si vous ne connaissez pas les règles souvent bizarres de la grammaire universitaire.

1812. Gabriel HENRY, est l'auteur de notre première Histoire de la langue française ». Il expose l'origine commune des langues de l'Europe, puis la filiation de la langue française aux autres langues. Il relie la Grammaire à la Littérature, et s'arrête naturellement en 1812. Ce livre est indispensable dans une bibliothèque de linguiste et même d'historien, de littérateur et d'homme du monde.

1812. Charles-Constant LETELLIER, est l'auteur d'une grammaire qui a eu beaucoup de vogue dans les écoles, de 1815 à 1825. Il y donne un modèle d'analyse grammaticale, puis des exercices de cacographie. La simplicité de ce livre en fait le mérite. Quant aux exercices de cacographie, sont-ils utiles ou nuisibles aux jeunes étudiants? Là est la question. L'auteur a su éviter l'erreur de ceux qui veulent tout embrasser dans un livre, et qui ne complètent rien.

Ce nom de Letellier me remet en mémoire une petite aventure. C'était en 1863, je venais de publier mon « Exposé général de la langue française », qui était le premier germe de l'ouvrage que je publie aujourd'hui. Je rencontre à Bruxelles, un de mes anciens compagnons de classe, qui tient ici un rang élevé dans l'enseignement. Il y avait vingt ans que nous ne nous étions vus. Je n'eus pas besoin de lui

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demander ce qu'il était devenu, son entourage m'avait renseigné. Eh bien ! me dit-il, que faitesvous à Paris? - Ma foi, j'étudie la langue française; et je lui présentai en même temps un exemplaire de l'ouvrage qui venait de paraître.

Quand il en eut vu le titre, il s'écria: Jeux de mots! calembourgs! blagues de Paris! et sans me laisser le temps de lui répondre - J'ai appris, me dit-il, en même temps que vous, dans la même école, la grammaire française de Letellier; je la sais encore par cœur, d'un bout à l'autre ; on ne me fera jamais accroire qu'il existe d'autres principes de grammaire, je ne permettrai jamais aux professeurs qui sont sous ma direction, de s'écarter des principes de Letellier. Je voulus répliquer, mais il m'opposa toujours le même « raisonnement ». —La grammaire que j'ai suivie a dû être excellente, puisqu'elle a été autorisée dans les écoles; et je n'admets pas qu'on puisse poser d'autres principes que ceux de mon professeur ».

J'ai eu l'occasion, depuis cette époque, de voir à Bruxelles plusieurs personnes d'élite dans la magisture, le journalisme, l'enseignement, le commerce, et j'ai pu apprécier que l'idée de mon ancien camarade est partagée. La grammaire qu'ils ont suivie, et dont ils vous réciteront, si vous le voulez, toutes les phrases, est un code qui ne permet ni une observation, ni même une réflexion. Le raisonnement, en Grammaire, est pour certaines personnes, de la blague, de la fanfaronnade, de la sottise.

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1813. Georges CARSTAIRS. L'écriture joue le plus grand rôle dans les études linguistiques; aussi devons-nous parler de ceux qui ont aidé au développement de l'art d'écrire. Voici les faits: Carstairs est l'auteur d'une méthode réellement nouvelle; elle consiste à remplacer le mouvement contre nature des doigts, où la main était appuyée fortement sur le radial droit, par un mouvement libre de l'avant-bras et de la main, soutenus par le milieu de l'avant-bras. Alors la main marche d'une seule pièce, et les doigts n'ont plus qu'un mouvement d'ensemble et simple pour maintenir et diriger la plume. Après avoir exercé pendant vingt ans en Amérique, Carstairs obtint un jour l'appui de M. Hume, membre du Parlement anglais, qui fit un rapport favorable sur la méthode présentée à S. A. R. le Duc de Kent. Celui-ci favorisa le développement de la méthode en Angleterre. Puis, douze ans après, en 1828, Carstairs, appuyé par M. Jullien, bibliothécaire de l'Institut, obtint de M. de Vatimesnil, Ministre de l'Instruction publique en France, l'approbation de cette méthode, et son introduction dans les écoles. Il a fallu à Carstairs quarante ans de persévérance pour que son œuvre fut vulgarisée en Europe.

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Il va sans dire que les exploiteurs lui ont contesté la priorité, entr'autres Trémery et dix autres professeurs, dont les noms m'échappent. Ceci me rappelle une anecdote qui m'est personnelle. C'était en 1848. Je passai par la rue Neuve-des-PetitsChamps; je vois une grande soirée d'écriture annon

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cée chez F***, passage Vivienne. J'entre; la salle était bien garnie; on attendait le professeur qui se faisait désirer. Il y avait une planche noire derrière un petit théâtre, avec un alphabet tracé à la craie. Je me trouvais derrière les dames, avec plusieurs jeunes commis qui se plaignaient du professeur; ils avaient payé, disaient-ils, une somme de. . .

pour modifier leur écriture; ils y étaient arrivés, mais plus tard, leur écriture avait repris son ancienne forme. Je leur disais vous vous êtes négligés, au lieu de respecter les recommandations qu'on a dù vous faire.

Enfin, M. F*** arrive avec son gilet écarlate, et expose sa méthode : Un jour, par hasard, dit-il, j'ai tiré les nerfs d'une patte de poule, et le mouvement qui s'est produit, dans cette patte de poule, m'a fait découvrir le véritable mécanisme à imprimer aux doigts des élèves. Cela dit, il demande qu'on veuille bien lui faire quelques observations Excité par les jeunes gens qui étaient autour de moi, et dans le désir de donner au professeur l'occasion de développer ses moyens, je lui demande les rapports qui existent entre sa méthode et celle de Carstairs. Il me répond, qu'il ne connaît pas Carstairs, que sa méthode n'a aucun rapport avec celle de qui que ce soit; j'ajoute quelques mots, et j'entends crier: A la porte ! à la porte! On m'avait pris pour un concurrent. Une dame fort jolie me pria de lui donner mon adresse, ayant, disait-elle, l'intention de m'envoyer sa cuisinière...

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1814. G. GLEY. « Langue et littérature des anciens Francs ». Il est souvent question de la langue des Francs à propos des origines de la langue française.

Voyons ce que nous en dit notre auteur: « Lorsqu'au commencement du cinquième siècle, les Francs sortirent des forêts de la grande Germanie, pour passer le Rhin, ils parlaient une langue dont les sons n'avaient aucun rapport avec les dialectes alors en usage parmi les peuples qui habitaient les rives de la Seine, du Rhône et de la Loire. C'est dans cette langue, appelée par leurs auteurs, francique ou francisque, qu'ils avaient, avant de quitter leurs anciennes demeures, rédigé leur loi salique c'est la langue que parlait Clovis.

« Voici un spécimen de l'écriture et du langage francique il est du septième ou huitième siècle.

Fater unser, du pist in himilum.

Mihhil gotlichist daz der man den almagtigan truhtin sinan fater uuesan quidit. Karesit denne, daz allero manno uuelih sih selpan (uuirdic) des uuir dicanGote, cotes sunt (sun) ze uuesan.

TRADUCTION.

Père notre, tu es dans les cieux.

Grandement divin est, que l'homme le tout-puissant seigneur son père être dit. Qu'il prépare donc, que de tous hommes chacun soi-même digne de cela, nous pensions à Dieu, de Dieu fils d'être.

1814. Léon CHAPSAL, a publié, avec le concours de Noël, plusieurs livres classiques qui ont eu un grand débit; ces ouvrages sont une Grammaire,

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