Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

vrages. De là, dans Moïse, cette parole du Père au Fils et à l'Esprit-Saint, parole d'égal à égal: Faisons l'homme à notre image et à notre ressemblance 2.

En lui était la vie, et la vie était la lumière des hommes. On appelle vie dans les plantes, croître, pousser des feuilles, des boutons, des fruits. Que cette vie est grossière ! qu'elle est morte! On appelle vie, voir, goûter, sentir, aller de çà et de là, comme on est poussé. Que cette vie est animale et muette! On appelle vie, entendre, connaître, se connaître soi-même, connaître Dieu, le vouloir, l'aimer, vouloir être heureux en lui, l'être par sa jouissance: c'est la véritable vie. Mais quelle en est la source? Qui est-ce qui se connaît, qui s'aime soi-même et qui jouit de soi-même, si ce n'est le Verbe? En lui était donc la vie. Mais d'où vient-elle, si ce n'est de son éternelle et vive génération? Sorti vivant d'un Père vivant, dont il a lui-même prononcé Comme le Père a la vie en soi, il a aussi donné à son Fils d'avoir la vie en soi3. Il ne lui a pas donné la vie comme tiré du néant; il lui a donné la vie de sa vive et propre substance; et, comme il est source de vie, il a donné à son Fils d'être une source de vie. Aussi cette vie de l'intelligence est la lumière qui éclaire tous les hommes. C'est de la vie de l'intelligence, de la lumière du Verbe, qu'est sortie toute intelligence et toute lumière".

Cette lumière de vie a lui dans le ciel, dans la splendeur des saints, sur les montagnes, sur les esprits élevés, sur les anges; mais elle a voulu aussi luire parmi les hommes, devenus ténèbres par le péché. Elle-même, cette lumière et sagesse éternelle, nous dit: Sortie de la bouche du Très-Haut, née avant toutes les créatures, c'est moi qui ai fait naître dans le ciel une lumière qui ne s'éteindra jamais, et qui ai couvert toute la terre comme d'un nuage. J'ai habité dans les lieux très-hauts, et mon trône est dans une colonne de nuées. Seule j'ai parcouru le cercle des cieux, pénétré la profondeur des abîmes, marché sur les flots de la mer; je me suis assise dans tous les lieux de la terre et parmi tous les peuples; j'ai possédé l'empire sur toutes les nations. Mais, au milieu de tout cela, j'ai cherché un lieu de repos, j'ai cherché en l'héritage de qui je demeurerais. Alors le Créateur de l'univers m'a dit : Habitez dans Jacob, soyez l'héritage d'Israël ".

Il y a dans ce verset de saint Jean, en lui était la vie, une variété de ponctuation, qui se trouve non-seulement dans nos exemplaires,

[blocks in formation]

mais encore dans ceux des Pères. Plusieurs d'eux ont lu : Ce qui a été fait était vie en lui: Quod factum est in ipso vita erat. Recevons toutes les lumières que l'Evangile nous présente. Nous voyons ici que tout, et même les choses inanimées qui n'ont point de vie en elles-mêmes, était vie dans le Verbe divin, par son idée et par sa pensée éternelle. Ainsi un temple, un palais, qui ne sont qu'un amas de bois et de pierres, où rien n'est vivant, ont quelque chose de vivant dans l'idée et dans le dessein de leur architecte. Tout est donc vie dans le Verbe, qui est l'idée sur laquelle le grand architecte a fait le monde. Tout y est vie, parce que tout y est sagesse. Tout y est sagesse, parce que tout y est ordonné et mis en son rang. L'ordre est une espèce de vie de l'univers. Cette vie est répandue sur toutes ses parties, et leur correspondance mutuelle entre elles et dans leur tout est comme l'âme et la vie du monde matériel, qui porte l'empreinte de la vie et de la sagesse de Dieu 1.

En lui donc, dans le Verbe, tout est vie, tout est lumière, tout est intelligence. Là est la vraie intelligence, la vraie lumière, la vraie vie des hommes. C'est là cette lumière véritable qui illumine tout homme venant en ce monde. C'est par son irradiation dans nos âmes que chacun de nous devient effectivement raisonnable. Toutes les vérités, de quelque ordre qu'elles soient, de quelque part qu'elles nous viennent, et, par suite, toutes les sciences, sont des rayonnements de cette lumière une et infinie. Toutes choses procèdent d'un seul Verbe, dit un pieux auteur, toutes choses parlent ce Verbe unique ; et c'est là le principe qui nous parle, lorsque nous comprenons et que nous jugeons droitement 2. L'univers entier, ayant été fait par lui et pour lui, est un livre où il parle sans cesse à nos yeux. Le livre des saintes Ecritures est un autre univers, où il nous parle plus clairement encore. Mais surtout son Eglise est un livre, est un univers, où il nous parle non plus un langage muet et inanimé, mais une parole vivante et efficace, qui pénètre jusqu'au fond de l'âme. Toujours le Verbe était dans le monde, par son essence comme créateur; car le monde a été fait par lui, et c'est lui qui le soutient par un mot de sa puissance. Cependant le monde ne l'a pas connu. Les patriarches, les prophètes, les justes l'ont connu, ont cru en lui, ont espéré en lui, l'ont aimé. Mais le monde en général ne l'a pas connu : ce monde qui, suivant l'apôtre, gît tout entier dans le mal; ce monde duquel un auteur païen a dit : Se laisser corrompre et corrompre à son tour, voilà ce qui s'appelle le monde 3. La lumière a lui jusque

[ocr errors]
[ocr errors]

1 Bossuet. Elévat. 2 De imit. Christi, 1. 1, c. 3.· pere et corrumpi sæculum vocatur.

3 Tacit. Germ. Corrum

dans ces ténèbres, mais ces ténèbres ne l'ont point comprise. Ou plutôt, les hommes, aveuglés par leurs passions, n'ont pas voulu la comprendre, ils lui ont préféré leurs ténèbres, parce que leurs œuvres étaient mauvaises. A la lueur de la lumière divine, ils voyaient bien ce qui était mieux, ils l'approuvaient même, et cependant ils suivaient ce qui était pire. Au milieu de la gentilité, quelques-uns de ceux qui s'appelaient philosophes, non-seulement ont vu bien des vérités importantes à la clarté de cette lumière qui luit dans les ténèbres, ils ont même entrevu le Verbe, dont cette lumière est un resplendissement. On en trouve la preuve dans leurs livres, dit saint Augustin 1. En effet, nous avons vu que, suivant Héraclite, ce qui constitue la raison individuelle, c'est la participation à la raison commune et divine; que cette raison commune n'étant autre chose que le tableau de l'ordre universel, toutes les fois que nous empruntons à la mémoire commune, nous possédons la vérité; et, quand nous n'interrogeons que notre raison individuelle, nous tombons dans l'erreur 2. Il est difficile de ne pas reconnaître en ces paroles la lumière véritable qui éclaire tout homme venant en ce monde. Nous avons vu que, d'après Platon, Dieu a fait le monde suivant le modèle qui est dans son intelligence. Modèle, exemplaire, idée parfaite, éternelle, toujours la même. Toutes choses y sont d'une manière plus vraie et plus réelle qu'en elles-mêmes. Là elles sont intelligibles, éternelles, immuables comme Dieu; ici elles sont imparfaites, temporelles, continuellement variables. L'homme ne connaît donc parfaitement la vérité qu'à mesure que son intelligence communique avec l'intelligence divine, et qu'elle y contemple les types éternels de toutes choses. La connaissance expérimentale des créatures dans leur existence propre, ne produit qu'une science de second ordre, parce que cette existence n'a par elle-même rien de fixe ni de stable, mais qu'elle est dans un changement continuel 3. Ces hommes connaissaient donc Dieu, ainsi que l'observe saint Paul, ils connaissaient même un peu son Verbe ; ils étaient donc bien inexcusables, ainsi que dit le même apôtre, de n'avoir point glorifié Dieu comme Dieu, de ne l'avoir point confessé courageusement devant les hommes, mais de s'être évanouis dans leurs raisonnements jusqu'à prostituer leurs adorations à des dieux que les hommes avaient faits. La lumière luit dans les ténèbres; mais les ténèbres, que dis-je ? ceux mêmes qui étaient des lumières, ne l'ont point comprise, ne l'ont point embrassée avec amour, n'ont pas voulu le suivre comme la règle souveraine de toute leur vic.

In Johan. ev. Tract., 2, n. 4. 2 L. 20.3 Ibid. Republ., 1. 7.

Il est venu chez soi, dans son propre bien, dans Jacob; il y est apparu aux patriarches, il y a parlé par les prophètes, il s'y est préfiguré dans toutes les cérémonies de la loi, dans tous les sacrifices; mais les siens mêmes, les enfants d'Israël, les Juifs, ne l'ont pas reçu généralement avec une foi vive; ils se glorifiaient de sa loi, et ils le déshonoraient par la transgression de sa loi ; ils se głorifiaient de son nom, et leurs œuvres faisaient blasphêmer ce nom parmi les nations. Tous ceux cependant qui l'ont reçu, soit parmi les Juifs, soit parmi les gentils; tous ceux qui l'ont reçu comme Abraham et David dans le peuple choisi, comme Job dans la race d'Esau, comme Melchisédech dans la race de Chanaan, il leur a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu, enfants et héritiers de Dieu, frères et co - héritiers de son Fils unique, de son Verbe éternel. Ce sont ceux qui ont cru en son nom, au nom du Fils, au nom du verbe ; qui ont cru, qui ont espéré en son nom, puissance, en sa miséricorde, en sa rédemption, en sa venue; qui, avec Abraham, avec beaucoup de rois et de prophètes, ont désiré voir son jour, et qui, dans cette attente, l'ont aimé de tout leur cœur et de toute leur âme : ceux – là sont nés tels, non pas de la commixtion du sang, ni de la volonté de la chair, ni de la volonté de l'homme; non pas de la génération charnelle de Jacob, d'Esau, ou de Chanaan; mais de Dieu, mais d'une ineffable participation à la nature divine, participation infiniment au-dessus de toute créature et qu'on appelle grâce.

en sa

Et le Verbe a été fait chair, il s'est fait homme; il a pris la nature humaine, non-seulement quant à sa portion la plus noble, l'âme, mais encore dans ce qu'elle a de plus bas, le corps, la chair avec toutes ses faiblesses. Et il a habité parmi nous, non plus comme parmi les enfants d'Israël, d'une manière invisible ou figurative, dans la nuée du sanctuaire, sur le propitiatoire de l'arche sainte; mais visiblement et corporellement comme un d'entre nous, de manière à être vu de nos yeux, ouï de nos oreilles, touché de nos mains. Et nous avons vu sa gloire, nous l'avons vu spécialement sur le Thabor : Moïse et Elie y étaient dans la gloire avec lui; mais sa gloire surpassait infiniment la leur; nous y avons vu sa gloire comme celle du Fils unique, gloire que lui témoigna le Père, quand il dit : Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j'ai mis mes complaisances; écoutez-le. Et il a habité parmi nous, plein de grâce et de vérité : non plus comme parmi Jacob, plein d'une majesté terrible, qui faisait trembler la terre, fumer la montagne, éclater la foudre, et dire à tout le peuple : Nous mourons de frayeur; mais plein de grâce, de bonté, de douceur, d'amour,

d'humilité, de modestie; non plus enveloppé d'ombres et de figures, mais plein de vérité, mais la vérité même. Tout en lui est vrai vraie âme, vraie chair, vrai homme, vrai Dieu, vraie naissance, vraie passion, vraie mort, vraie résurrection. Ses paroles sont vérité et vie. Les ombres mêmes, les figures, les promesses de la loi, s'accomplissant en lui, deviennent vraies. Les préceptes enfin se réalisent. La loi a été donnée par Moïse, la loi, la règle, la vérité; mais la vérité impérieuse, mais la règle menaçante, mais la loi de crainte. Le Verbe fait chair ayant habité parmi nous plein de grâce et de vérité, nous avons reçu de sa plénitude grâce sur grâce, et nous observons la loi par amour, et elle devient grâce et vérité en nous par le Verbe fait chair.

Le Verbe fait chair s'est montré parmi nous plein de grâce et de vérité jusque dans son saint précurseur. Si le soleil de justice avait apparu soudain dans toute sa splendeur, il nous aurait éblouis; il envoie devant lui une douce aurore qui l'annonce. Il y eut un homme envoyé de Dieu ; ou, son nom était Jean. Il vint en témoignage pour témoigner de la lumière, afin que tous crussent par lui. Il n'était pas la lumière, mais pour rendre témoignage à la lumière. On le voit, c'est l'aube, c'est l'aurore, qui peu à peu dissipe les ténèbres et dispose nos yeux à contempler le soleil levant. Cet homme lui-même était annoncé depuis quatre cent cinquante ans. Me voici, avait dit l'Eternel par le dernier des prophètes, me voici, envoyant mon ange, et il préparera la voie devant ma face. Et aussitôt viendra à son temple le dominateur que vous cherchez et l'ange de l'alliance que vous désirez. Le voici qui vient, dit Jéhova-Sabaoth1.

Un archange avait dit à Daniel, en Babylone, que les temps étaient fixés à soixante-dix semaines d'années pour abolir la prévarication, finir les péchés, expier l'iniquité, amener la justice éternelle, accomplir la vision et la prophétie, et oindre le saint des saints. Il avait ajouté que, depuis l'ordre pour rebâtir Jérusalem jusqu'au Messie, le prince, il y aurait soixante-neuf semaines, ou quatre cent quatre-vingt-trois ans 2. Ces années s'accomplissaient. Le même archange est envoyé pour annoncer que le précurseur du Messie va naître, et bientôt après le Messie lui-même.

Dans le temps que le sceptre était sorti de Juda, et que, malgré Juda, il avait passé entre les mains d'un Iduméen; par conséquent, dans le temps où, suivant la prophétie de Jacob, le Messie, le Christ devait venir. « Dans les jours d'Hérode, roi de Judée, il y

[blocks in formation]
« ZurückWeiter »