Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

[ocr errors]

intentions d'Innocent, Honorius manda au cardinal Galon, que le défunt pontife avait envoyé en Angleterre à titre de légat, de continuer à soutenir le roi Jean et de mettre tout en œuvre pour ramener à un prince vassal de l'Église romaine» ses sujets révoltés 1. La mort inopinée de ce souverain 2, en calmant les haines qu'avaient soulevées ses excès, aida au rétablissement de la paix. A l'instigation du légat, un certain nombre de seigneurs et de prélats se rallièrent au fils aîné de Jean, encore mineur, qui, sous le nom de Henri III, fut couronné roi, le 28 octobre 1216, dans l'église conventuelle de Glocester 3. A la vérité, le jeune prince dut reconnaître par un acte de sujétion envers le saint-siège la protection qu'il en avait reçue. Renouvelant en son propre nom les engagements qu'avait pris Jean sans Terre, il fit hommage de ses États à l'Église romaine et s'obligea, comme lui, à un tribut annuel de mille marcs sterling.

Cette élévation de Henri III ne suffit pas néanmoins à ramener les partisans encore nombreux du fils de Philippe Auguste. Prenant en main la cause du nouveau roi, Honorius non seulement menaça Louis de plus grandes sévérités, s'il ne se désistait de ses entreprises ; il déclara nuls les serments que lui avaient prêtés les barons anglais, enjoignit au cardinal Galon de destituer de leurs dignités, par toute l'étendue du royaume, les prélats qui ne feraient pas leur soumission, l'autorisa à pourvoir de ces dignités des ecclésiastiques dévoués au saint-siège et au roi, et, par ces mesures, provoqua de

1. 30 septembre 1216. Raynald. Annal. eccles. anno 1216, no 30.

2. 19 oct. 1216. Voir, dans Raynald. ibid. no 31, une lettre que, le 15 octobre, Jean sans Terre écrivait à Honorius et dans laquelle il mettait sous la protection du pape son fils et son royaume comme étant « le patrimoine de saint Pierre. >>

3. Rog. de Wendov.

4.

Fecit homagium.. de regnis Angliæ et Hyberniæ, et juravit quod mille marcas, quas pater ejus romanæ contulerat ecclesiæ, fideliter persolveret.» Ibid.

5. 6 déc. 1216, Raynald. anno 1216, no 37, 38. Cf. une autre lettre du 21 avril 1217, ibid., anno 1217, nos 70, 71.

6. 17 janvier 1217, Bouquet, Rec. t. XIX, p. 623.

nouvelles défections dans les rangs des rebelles. Une défaite que Louis essuya, au mois de mai 1217, sous les murs de Lincoln, acheva de ruiner son parti. Abandonné de la plupart des seigneurs qui l'avaient d'abord secondé, Louis renonça enfin à ses prétentions, signa, le 11 septembre, un traité de paix avec Henri III, et, après avoir été relevé de l'excommunication par le légat, repassa en France. L'autorité de Henri III ne fut toutefois reconnue des évêques et des barons du royaume, que lorsque ce prince eut juré le maintien de la Grande Charte que jadis, à la sollicitation du roi Jean, avait cassée Innocent 1. Si, sur ce point, Honorius n'avait pu remplir les vues de son prédécesseur, il avait réussi du moins à retenir l'Angleterre dans la vassalité du saint-siège.

Les affaires de la Terre sainte, qui avaient occupé la fin du pontificat d'Innocent, attirèrent plus particulièrement la sollicitude d'Honorius. La première lettre qu'il écrivit au lendemain de son élection était adressée à Jean de Brienne qui résidait à Saint-Jean d'Acre avec le titre de roi de Jérusalem, lettre dans laquelle il se disait non moins résolu qu'Innocent à consacrer tous ses efforts au recouvrement de la Palestine 2. Avant même qu'il eût quitté Pérouse, des circulaires avaient été envoyées aux princes et aux prélats de la chrétienté, afin que, conformément au décret rendu au concile général de Latran, l'armée des croisés se tînt prête à s'embarquer au mois de juin 1217 3. Mais la mort d'Innocent avait suffi à ralentir les préparatifs commencés pour la croisade, et l'on put constater une fois de plus combien le zèle s'était refroidi au sujet de la Terre sainte. André II, roi de Hongrie, auquel s'était joint Léopold VI, duc d'Autriche, avec le duc

1. «Rex Anglorum .. juravit cum legato et marescallo quod redderent baronibus Angliæ et aliis omnibus de regno omnia jura .. cum libertatibus ante petitis, pro quibus discordia fuit exorta inter Johannem regem et barones.» Rog. de Wendov.

2. Raynald. anno 1216, no 18. Cette lettre, la première qu'on trouve dans le registre d Honorius, est datée de Pérouse, le 25 juillet 1216.

3. 7 août 1216. Potthast, Reg. pontif. no 5325. Cf. 5 déc. 1216, ibid. no 5380, 5381.

de Bavière, fut le seul souverain d'Europe qui, à la date fixée, se dirigea vers Saint-Jean d'Acre . Frédéric II, roi des Romains et de Sicile, qui le premier parmi les princes avait pris la croix et que tout désignait au commandement de l'expédition, allégua les menées en Allemagne de l'empereur déchu, Otton, pour obtenir d'Honorius de différer l'accomplissement de son vou. Le pape attendait du moins un utile secours du nouveau souverain de Constantinople, Pierre de Courtenay, comte d'Auxerre, qui avait été appelé au trône par la mort de Henri de Hainaut, son beau-frère, et qui de France était passé par Rome pour se rendre en ses États. Mais ce prince, en approchant de Constantinople, tomba aux mains des Grecs qui le retinrent prisonnier 3. Une autre déception était réservée au pontife. Le roi de Hongrie, pour l'heureux succès duquel il avait ordonné des prières dans toutes les églises de la catholicité et conduit lui-même une procession dans Rome, ne séjourna que trois mois en Terre sainte, et, après un engagement sans résultat contre les Infidèles, regagna son royaume, ramenant avec lui la plus grande partie de son armée 3.

Restés sous la conduite du duc d'Autriche, les croisés cussent sans doute renoncé à poursuivre leur expédition, si, au printemps de 1218, ils n'eussent été rejoints par d'autres croisés du nord de l'Allemagne et de la Frise, qui, venus par l'Océan et la Méditerranée, s'étaient d'abord arrêtés en Portugal pour combattre les Maures. Avant que le roi de Hon

1. Raynald. anno 1217, n° 19.

2. Lettre d'Honorius à Frédéric, 8 avril 1217, Raynald. ibid., no 41. Cf. Zeller, Hist. d'Allem. t. V, p. 176.

3. Pour ce qui concerne l'avènement de ce Pierre de Courtenay au trône de Constantinople, son passage à Rome où il fut couronné de la main du pape dans l'église Saint-Laurent, et sa captivité suivie peu après de sa mort, voir les documents cités par Raynald. anno 1217, no 4-14. Henri de Hainaut était mort le 11 juin 1216.

4. Lettre à l'archevêque de Reims, 24 nov. 1217, Potthast, Reg. pontif. n° 5622.

5. Rog. de Wendov.

6. Ibid.

grie fût retourné en Europe, Léopold d'Autriche et Jean de Brienne, reprenant un plan déjà adopté dans la précédente croisade, avaient résolu de porter la guerre sur les bords du Nil et d'assiéger Damiette, dans la pensée qu'une fois maîtres de l'Égypte ils le deviendraient plus aisément de la Terre sainte1. Informé d'un projet dont l'exécution exigeait le rassemblement de plus grandes forces, Honorius. manda aux évêques de France et d'Angleterre de hâter, chacun dans leurs diocèses, le départ des croisés qui n'avaient pas encore quitté leurs foyers et de les diriger sur l'Égypte 2. Il adressa également un pressant appel à Frédéric, dont le puissant concours importait le plus aux chrétiens d'outre-mer. Otton venant alors de mourir 3, ce souverain n'avait plus le même motif de retarder son départ. Frédéric répondit qu'il s'y disposait en effet et qu'il avait convoqué, dans cette intention, une diète générale des princes et des évêques de l'Allemagne. Le pape le loua de sa résolution, le menaçant toutefois de le frapper d'excommunication, si, au mois de juin de l'année suivante, il ne s'était embarqué pour Damiette 5.

Le recouvrement de la Terre sainte semblait, avec le rétablissement de la paix en Angleterre, le seul soin qui eût été légué à Honorius par son prédécesseur. Mais, tandis que le pontife s'efforçait de tourner vers la Palestine le zèle des fidèles, la guerre s'était rallumée dans ces provinces du midi de la France où Innocent, pour en chasser l'hérésie, avait porté l'extermination. Les populations de ces provinces n'avaient pas appris sans colère la décision du concile général de Latran qui, en confirmant à Simon de Montfort la possession

1. Voir, dans Raynald. anno 1217, no 30, 31, une lettre du maître des Templiers à Honorius. Cf. ibid. anno 1218, no 6-9, une autre lettre du roi de Jérusalem et du duc d'Autriche, annonçant au pape que les premiers vaisseaux des croisés étaient arrivés le 29 mai 1218 au port de Damiette. 2. Novembre 1218, Potthast, Reg. pontif. n° 5934.

3. Otton mourut au château de Harzbourg, près de Goslar, le 19 mai 1218. 4. 12 janvier 1219, Huillard-Bréholles, Hist. dipl. Friderici II, t. I, p. 584586. Devant nous référer souvent à cet important ouvrage, nous nous bornerons à l'indiquer par ces seuls mots Hist. dipl.

5. 11 février 1219. Raynald. eod. anno, no 7.

des territoires conquis par les Français du Nord, consommait leur propre servitude. L'ancien comte de Toulouse, Raimond VI, au sortir de ce concile où il était allé faire entendre de vaines réclamations, avait lui-même résolu de tenter un dernier effort pour reconquérir ses domaines; et, lorsque ce prince, accompagné du jeune Raimond, son fils, était revenu en France, Marseille, Avignon, Orange, plusieurs autres villes de la Provence et nombre de barons s'étaient engagés à les assister dans la défense de leurs droits. Le roi d'Aragon, Jacques, fils de celui qui avait été tué à la bataille de Muret, s'était également rallié à la cause du vieux Raimond. En dépit des mesures prises par Simon de Montfort pour arrêter la révolte, le mouvement n'avait pas tardé à s'étendre des deux côtés du Rhône, et, les Toulousains s'étant soulevés à leur tour, Raimond VI, au mois de septembre 1217, était rentré dans sa capitale aux acclamations des habitants 1.

Dès le début des événements, Honorius avait envoyé le cardinal Bertrand dans les provinces insurgées pour y ramener les esprits. Instruit du peu de succès de la mission de son légat, le pape craignit de voir l'autorité de l'Église romaine compromise encore une fois en ces contrées, et, s'inspirant du funeste exemple donné par Innocent, résolut d'appeler de nouveau aux armes les Français du Nord. Il enjoignit aux archevêques de Reims, de Sens, de Tours, de Rouen, de Bourges, de Lyon et à leurs suffragants de prêcher la croisade contre les hérétiques albigeois, leur disant d'y entraîner tous ceux des fidèles de leurs diocèses qui ne s'étaient pas croisés pour la Palestine3, et menaça le roi d'Aragon, s'il n'abandonnait Raimond, « de livrer son royaume à l'invasion des catholiques. » Cet appel à la guerre procura des ren

1. Pour tous les faits qui précèdent, voir Schmidt, Hist. des Albig. t. I, p. 267-270.

2. 19 janvier 1217. Potthast, Reg. pontif. no 5425.

3. 3 janvier 1218. Potthast, ibid. n° 5657.

4.

Regnum tuum per extraneas gentes comprimere cogeremur. » 27 décemb. 1217. Voir cette lettre dans Raynald. anno 1217, n° 56, 57.

« ZurückWeiter »