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serments prêtés par Henri VII, avant comme après son couronnement, étaient de véritables serments de fidélité et devaient être réputés pour tels 1. Dans la seconde, rappelant que Robert, vassal de l'Église romaine et résidant dans le royaume de Naples et non dans l'Empire, n'était pas justiciable de l'empereur, il annulait en ces termes la sentence rendue par Henri contre ce prince. « Nous annulons cette sentence, écrivait-il, en vertu de la suprématie incontestable que le saint-siège possède sur l'Empire, du droit qui appartient au chef de l'Église d'administrer l'Empire durant la vacance, et par cette plénitude de puissance que le successeur de Pierre a reçue de Jésus-Christ, roi des rois et seigneur des seigneurs 2. » Clément venait alors de nommer Robert sénateur de Rome. Conformément à cette seconde constitution, il fit rédiger une bulle par laquelle il lui déléguait en outre les fonctions de vicaire impérial en Italie jusqu'à l'élection d'un nouveau roi des Romains agréé par le saint-siège3.

Cette bulle, datée du 14 mars 1314, fut le dernier acte de Clément. Un mois après, le 20 avril, il expirait, aux environs de Carpentras, à Roquemaure. Par ces deux constitutions, ainsi que par la déclaration qu'il avait faite lors de l'entrée de Henri VII en Italie, il semblait avoir voulu montrer qu'en dépit des événements qui avaient pesé sur lui il restait attaché aux doctrines des Grégoire IX et des Innocent IV, et léguer à ses successeurs le soin de les faire prévaloir. Mais lui-même avait achevé, par sa faiblesse ou sa servilité, la ruine de ce pouvoir universel qui, selon le mot de Grégoire IX, embrassait « les âmes et les corps, » les royaumes et les consciences, et dont le pontificat de Boniface VIII avait été comme le dernier éclat. Malgré les efforts que devait après lui tenter la papauté pour recouvrer cette puissance perdue, malgré les succès qui devaient paraître quelquefois

1. Clementin. 1. II, tit. 1x, de jure jur. Cf. Raynald. anno 1313, no 28. 2. Raynald. anno 1313, no 6-8.

3. Theiner, Cod. dipl. dom. temp. t. I, p. 471, 472. Clément mourut avant que cette bulle eût été expédiée. Raynald. anno 1314, no 5.

accompagner ces efforts, la théocratie, sous laquelle le monde avait si longtemps vécu, n'était plus qu'un, édifice brisé, qu'aucune main désormais ne saurait relever. Repoussé du domaine des choses temporelles par les princes qu'avait encouragés l'exemple de Philippe le Bel, pouvant être encore pour eux un allié utile ou un adversaire avec lequel ils. auraient à compter, mais non plus un maître auquel il leur faudrait obéir, le saint-siège allait se voir rejeté de plus en plus vers l'Église, où son autorité, déjà attaquée, ne devait pas tarder à s'ébranler à son tour.

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A la mort de Clément V, on vit se renouveler, dans le collège des cardinaux, les mêmes divisions qui avaient précédé son avénement. Mais c'était d'une autre cause que naissait le désaccord. Vingt-trois cardinaux, dont quinze français ou gascons et huit italiens, composaient alors le sacré collège qui s'était réuni à Carpentras dans le palais épiscopal. Tandis que les premiers repoussaient d'avance tout candidat qui ne serait pas décidé à maintenir en deçà des Alpes la résidence du saint-siège, les Italiens ne voulaient donner leurs voix qu'à celui de leurs collègues qui promettrait de ramener la papauté à Rome, s'engageant même, dans ce cas, à nommer un Français. Plus de trois mois s'étaient écoulés dans ces dissentiments, lorsque deux neveux du pape défunt, Ber

1. Ce vœu était aussi celui de plus d'un ami de l'Italie. Voy. la lettre que Dante adressait alors à ce sujet aux cardinaux italiens. Opp. min. di Dante, éd. P. Fraticelli (Firenze, 1862), t. III, p. 486 et ss.

trand de Got, vicomte de Lomagne, et Guillaume de Budos, escortés de troupes gasconnes, entrèrent à Carpentras sous prétexte de prendre le corps de leur oncle, qui y avait été transporté de Roquemaure, et de le conduire à une autre destination, en réalité pour forcer les décisions du conclave et retenir la dignité pontificale dans leur propre famille. Des désordres ne tardèrent pas à se produire, à la suite desquels les bandes gasconnes mirent le feu en divers points de la ville et firent irruption dans le palais où était assemblé le sacré collège. Effrayés, les cardinaux s'enfuirent par une brèche pratiquée dans l'un des murs du palais, et, sortant secrètement de Carpentras, se retirèrent les uns à Avignon, les autres à Orange, aussi divisés dès lors sur la désignation du lieu où devait se faire l'élection que sur le choix du nouveau pape 1.

C'est au lendemain de ces événements qu'un des cardinaux italiens, Napoléon Orsini, autrement dit des Ursins, dans une lettre qu'il adressait à Philippe le Bel et où il le priait d'intervenir pour mettre fin à ces dissentiments, écrivait ces mots : << En nommant le défunt pontife, nous nous réjouissions d'avoir agi pour le plus grand bien de l'Église et d'avoir fait un magnifique présent au roi et à la France. Mais notre allégresse n'a pas tardé à se changer en deuil. Car, si l'on pèse les œuvres de ce pape par rapport au roi et au royaume, on voit qu'il a été l'occasion de graves périls, et peut-être son imprudence eût-elle amené quelque catastrophe, si la miséricorde divine n'en eût détourné les effets. Quant au reste, la ville de Rome presque tombée en ruine, le patrimoine de saint Pierre livré au pillage, l'Italie tout entière en proie aux sédi

1. Voir, sur ces faits, la lettre adressée au chapitre général de l'ordre de Citeaux par les cardinaux italiens. Baluze, Vitæ papar. avenion., t. II, p. 286-289. Cf. la lettre citée ci-dessous de Napoléon Orsini. Selon une autre version moins fondée, ce furent les serviteurs des cardinaux qui, se livrant à des désordres pendant que leurs maitres étaient en conclave, mirent le feu au palais épiscopal, d'où l'incendie aurait gagné une partie de la ville. Voy. le récit de Jean de Saint-Victor, Baluze, ibid., t. I, p. 113.

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