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plus de respect pour un caractère en quelque sorțe surnaturel. Par cette expression, le roi constitutionnel était assimilé à un évêque, à un prêtre, dont les personnes étaient aussi sacrées, sans que pour cela ils fussent soustraits à la puissance des lois.

Les auteurs de la constitution qui, en instituant la royauté, créaient un pouvoir hors de la nature, ont cru nécessaire d'ajouter à la sûreté des rois par des terreurs superstitieuses: mais il résulte seulement de cette expression que, si la royauté n'avait pas été abolie, la déchéance aurait dû être prononcée par un jugement séparé.

Le mot inviolable n'est point défini par la constitution lorsqu'elle traite du roi; mais elle l'a défini ailleurs, en parlant des représentants du peuple.

Leur inviolabilité renferme deux conditions bien distinctes, toutes deux applicables au roi l'une de ne pouvoir être poursuivis pour ce qu'ils ont dit ou fait en qualité de représentants; et dès qu'on établissait un roi, il était nécessaire qu'il participât à ce caractère d'inviolabilité.

Cette prérogative, étendue à tous les actes du pouvoir exécutif, faits par le roi, avait des dangers que celle des représentants du peuple ne présentait pas. Aussi le roi était-il obligé de faire revêtir ces actes de la signature d'un ministre, responsable de leur légitimité : la nation n'était pas sans garantie; et si elle n'avait pas toute celle que les principes d'une justice rigoureuse ordonnaient de lui donner, on lui accordait du moins tout ce qui était compatible avec la bisarre institution de la royauté.

Ainsi, tout ce qu'a fait le roi comme dépositaire d'un pouvoir national ne peut lui être imputé ; mais il est accusé, par la notoriété publique, de crimes étrangers à ses fonctions royales. Ce n'est point comme roi, qu'il payait des libelles pour détruire le crédit national, qu'il soudoyait les ennemis de la France, qu'il formait, de concert avec ses frères, une ligue avec les ennemis de la patrie; ce n'est pas comme roi, qu'au mépris des lois, approuvées par lui-même, il armait contre les citoyens des satellites étrangers.

Une autre condition de l'inviolabilité des

représentants élus du peuple, est de ne pouvoir être poursuivis qu'en vertu d'un décret du corps législatif. Aussi, lorsque, dans l'assemblée constituante, on discuta la question de l'inviolabilité du roi, on allégua pour motif, et avec raison, que, par la nature même et l'importance de ses fonctions, il ne pouvait être soumis à répondre devant un tribunal, d'après la réquisition des mêmes fonctionnaires dont il était chargé de surveiller la conduite. On prouva que l'homme qui avait l'autorité de suspendre la formation des lois, que le chef du pouvoir exécutif, celui de l'armée, de la flotte, ne devait point être exposé à se voir arrêté dans ces grandes fonctions par la volonté d'un tribunal particulier. On se servit en sa faveur, et avec le même succès, des raisonnements employés pour soustraire les représentants du peuple à l'ordre commun des poursuites judiciaires.

Il est vrai que, pour ceux-ci, on indiqua la marche que devait tenir la justice, et qu'on n'osa l'indiquer pour le roi; mais jamais cette lâche maxime, qu'un roi incendiaire, assassin, parricide, serait impuni,

n'a souillé les lois de la France, déja plus qu'à demi-libre. Croit-on que si ce principe servile y eût été textuellement inséré, la nation eût voulu adopter, ou du moins essayer l'acte constitutionnel, et le regarder comme une loi obligatoire? Aurions-nous osé le montrer aux étrangers comme une constitution moins défigurée par de grossières violations du droit naturel, que celles de la plupart des autres peuples?

Dira-t-on que l'inviolabilité d'un roi doit être entière, parce qu'il n'existe point, pour lui, de juges impartiaux? On voudrait donc que la grandeur du crime devînt un titre d'impunité, que les attentats contre la sûreté de tout un peuple fussent placés hors de l'atteinte des lois? Ainsi, tout chef de conspirateurs qui aurait mis la patrie et la liberté en péril, pourrait dire à une nation : vous ne pouvez me juger, car je vous ai tous offensés, car il n'y a aucun de vous à qui je n'aie fait craindre pour ses droits, pour ses propriétés, pour sa vie. Et comme alors aussi le droit individuel de pourvoir à sa sûreté reprend toute son indépendance, dès que la loi cesse de la protéger, ce

rafinement de justice deviendrait le signal du désordre et des vengeances arbitraires.

Citerait-on pour preuve de cette impunité absolue l'article d'après lequel le roi, dans le cas d'abdication légale, doit être jugé, pour les crimes subséquents, comme les autres citoyens? Mais, pour les délits subséquents au temps de leur mission, les députés, inviolables, des législatures, sont aussi jugés comme les autres citoyens.

L'inviolabilité du roi et des députés, exprimée par le même mot, doit s'entendre de la même manière, avec cette seule différence, que l'acte constitutionnel a prescrit, pour les uns, la manière de les juger, tandis qu'à l'égard du roi, il garde le silence; et ce silence suffisait bien, sans doute, pour exciter l'indignation des hommes qui avaient dans l'ame le sentiment de la liberté et de l'égalité.

Ainsi, l'impunité du roi n'est pas décrétée par la constitution; mais elle n'a pas établi le mode de le juger. Elle a prononcé que s'il cessait d'être roi, il serait, pour les crimes subséquents, poursuivi et jugé comme les autres citoyens; mais elle n'a rien déterminé

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