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savans français et étrangers, désiraient connaître mon père; ils aimaient à être admis dans son intérieur.

Vingt années avant la révolution, j'entendais déjà dire souvent que l'on ne retrouvait plus dans le palais de Versailles cet imposant aspect de la puissance de Louis XIV; que les institutions de l'ancienne monarchie tombaient d'un mouvement rapide; que le peuple, écrasé d'impôts, était silencieusement misérable; mais qu'il commençait à prêter l'oreille aux discours hardis des philosophes qui proclamaient hautement ses souffrances et ses droits; et qu'enfin le siècle ne s'achèverait pas, sans que quelque grande secoussene vînt ébranler la France et changer le cours de ses destinées.

Les gens qui parlaient ainsi étaient presque tous partisans du système d'administration de M. Turgot: c'étaient Mirabeau le père, le docteur Quesnay, l'abbé Baudeau, l'abbé Nicoli, chargé des affaires de Léopold, grandduc de Toscane, et aussi enthousiaste des maximes des novateurs que l'était son souverain.

Mon père rendait un sincère hommage à la pureté des intentions de ces économistes. Comme eux il reconnaissait beaucoup d'abus dans le gouvernement; mais il n'accordait point aux adeptes de cette secte politique les lumières administratives nécessaires pour diriger une sage réforme. Il leur disait avec franchise que, dans l'art de faire mouvoir la grande machine du gouvernement, le plus savant d'entre eux était inférieur à un bon subdélégué d'intendance, et que, si jamais le timon des affaires était remis entre leurs mains, ils scraient promptement arrêtés dans l'exécution de leurs projets, par l'immense différence qui existe entre les plus savantes théories et la pratique la plus simple des affaires d'administration.

Dans un de ces entretiens qui, malgré ma grande jeunesse, fixaient mon attention, j'entendis un jour mon père comparer la monarchie française à une belle et antique statue il convenait que le piédestal, qui la soutenait, était près de s'écrouler; que les formes de la statue disparaissaient cachées sous les plantes parasites dont elle s'était

insensiblement couverte; mais il demandait, avec le sentiment d'une douloureuse appréhension, quel serait l'architecte assez habile pour reconstruire le socle sans ébranler la statue? De tels ouvriers ne se sont point trouvés; les essais de réforme n'ont fait que hàter la ruine. L'orage des passions est venu à éclater; le monument tout entier s'est écroulé, et sa chute a ébranlé l'Europe,

DE

MADAME CAMPAN.

CHAPITRE 1.

Cour de Louis XV. - Goût du roi

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tère. Il vend des propriétés sous le seul nom de Louis de Bourbon.

1

-

Le débotter du roi.

- Singuliers noms d'amitié qu'il donnait à ses filles. Leur éducation tout-à-fait négligée. - Prières auprès d'un moribond. Menuet couleur de rose.— Caractère de Mesdames. Orgueil tempéré par la peur de l'orage. Retraite de madame Louise aux Carmélites de SaintDenis. Madame Campan trouve la princesse faisant la lesParoles qu'on lui prête à sa mort. - Grave décision sur Abbé qui se permet d'officier comme un prélat. - Chagrins que cause aux filles de Louis XV son attachement pour madame Du Barry. Elle assiste au Conseil-d'État. Elle jette au feu un paquet de lettres cachetées. La cour divisée entre le parti du duc de Choiseul et celui du duc d'Aiguillon. Les filles de Louis XV peu disposées en faveur du mariage du dauphin avec une archiduchesse.

sive.
le maigre.

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J'AVAIS quinze ans lorsque je fus nommée

lectrice de Mesdames. Je dirai d'abord ce qu'était la cour à cette époque,

Marie Leckzinska venait de mourir; la mort du dauphin avait précédé la sienne de trois ans ; les jésuites étaient détruits, et la piété ne se trouvait plus guère à la cour que dans l'intérieur de Mesdames; le duc de Choiseul régnait.

Le roi ne pensait qu'au plaisir de la chasse; on aurait

croire que pu

les courtisans se permettaient une épigramme, quand on leur entendait dire sérieusement, les jours où Louis XV ne chassait pas, ne fait rien aujourd'hui.

le roi

Les petits voyages étaient aussi une affaire très-importante pour le roi. Le premier jour de l'an il marquait sur son almanach les jours de départ pour Compiègne, pour Fontainebleau, pour Choisy, etc. Les plus grandes affaires, les événemens les plus importans ne dérangeaient jamais cette distribution de son temps.

L'étiquette existait encore à la cour avec toutes les formes qu'elle avait reçues sous Louis XIV; il n'y manquait que la dignité: quant à la gaieté, il n'en était plus question; de lieu de réunion où l'on vît se dé

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