Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

tions, le souverain finit par ne plus trouver d'appui solide ni d'entier dévouement.

Louis XVI eut une quantité înnombrable de confidens, de conseils, de guides : il en prit jusque dans les factions qui l'attaquaient. Il n'a peut-être jamais tout dit à un seul, et n'a parlé sincèrement qu'à bien peu. II se réservait de tenir le fil de toutes les me ́nées particulières, et de-là provient sans doute le peu d'ensemble et la faiblesse de ses opérations. Il en résultera aussi de grandes lacunes dans l'histoire détaillée de la révolution.=

Pour que l'on pût connaître à fond les dernières années du règne de Louis XV, il faudrait avoir des Mémoires du duc de Choiseul, du duc d'Aiguillon, du maréchal de Richelieu (1), du duc de La Vauguyon.

(1) J'ai entendu le maréchal de Richelieu dire à M. Campan, bibliothécaire de la reine, de ne point acheter les Mémoires que sans doute on lui attribuėrait après sa mort; que d'avance il les lui déclarait faux ; qu'il ne savait pas l'orthographe, et ne s'était jamais amusé à écrire. Peu de temps après la mort du maréchal, un nommé Soulavie fit paraître les Mémoires du maréchal de Richelieu.' (Note de madame Campan.)

[ocr errors]

Pour le règne malheureux de Louis XVI, il faudrait que le maréchal du Muy, M. de Maurepas, M. de Vergennes, M. de Malesherbes, le duc d'Orléans, M. de La Fayette, l'abbé de Vermond, l'abbé Montesquiou, Mirabeau, la duchesse de Polignac, la duchesse de Luynes, eussent consigné, dans des écrits sincères, toutes les choses auxquelles ils ont eu une part directe (1). Quant au secret des affaires des derniers temps, il a été disséminé entre un bien plus grand nombre de personnes. Quelques ministres ont publié des Mémoires, mais seulement quand ils ont eu à justifier leurs opérations, et ces Mémoires ne traitent que des intérêts de leur propre réputation: sans ce puissant mobile, ils n'eussent probablement rien écrit. En général, les gens les plus rapprochés du souverain, par

(1) Rien n'empêche encore que cette supposition ne se réalise en partie. Parmi les personnages que madame Campan cite en cet endroit, nous en connaissons dont les noms pourraient être, d'un moment à l'autre, attachés à des Mémoires d'un haut intérêt.

(Note de l'édit.)

leur naissance et par leurs emplois, n'ont point laissé de Mémoires; et, dans les monarchies absolues, presque tous les fils des grands événemens se trouvent attachés à des détails que les plus éminens personnages ont seuls pu connaître. Ceux qui n'ont eu le soin que de quelques affaires, n'y voient point le sujet d'un livre; ceux qui ont porté long-temps le fardeau des affaires publiques, se croient par devoir ou par respect pour l'autorité, dans l'impossibilité de tout dire. D'autres conservent des notes avec le projet de les mettre en ordre quand ils auront atteint l'époque d'un heureux loisir : vaine illusion des ambitieux, qu'ils n'entretiennent, pour la plupart, que comme un voile qui cache à leurs yeux la désolante image de leur inévitable disgrâce! Quand elle est venue, le désespoir leur ôte la force de reporter leur attention sur ces temps d'un éclat qu'ils ne cesseront pas de regretter.

Cependant l'historien, qui est quelquefois embarrassé pour se décider entre les versions opposées que lui fournissent les contemporains, l'est bien davantage si les

écrits lui manquent. Alors il s'en rapporte aux traditions, et se fie aux discours populaires; il trace des portraits sur les caricatures politiques crayonnées par la haine ou la flatterie; la calomnie se perpétue, et de nobles caractères demeurent noircis à jamais. Une entreprise mal conduite porte le nom de criminelle; un coupable heureux. devient un héros. L'histoire n'est plus une leçon c'est un roman ou un recueil impur et décousu de libelles qui ont peut-être fait sourire de pitié celui-là même qui les écrivait.

Louis XVI avait l'intention d'écrire des Mémoires. Ses papiers secrets étaient classés dans un ordre qui indiquait son projet. La reine avait aussi le même dessein : elle a conservé long-temps beaucoup de correspondances et un grand nombre de rapports trèsdétaillés, faits sur l'esprit et les événemens du temps. Mais après la journée du 20 juin 1792, elle fut forcée d'en brûler la plus grande partie. Quelques-unes de ces correspondances, que gardait la reine, ont été portées hors de France.

D'après le rang et la position des personnes

que j'ai citées, comme capables d'éclaircir, par leurs écrits, l'histoire de nos orages politiques, on ne peut pas croire que je veuille me placer sur la même ligne; mais j'ai passé la moitié de ma vie soit auprès des filles de Louis XV, soit auprès de Marie-Antoinette. J'ai connu le caractère de ces princesses, j'ai su quelques faits curieux dont la publication peut intéresser, et la vérité des détails fera le mérite de mes écrits.

J'étais fort jeune lorsque je fus placée auprès des princesses, filles de Louis XV, en qualité de lectrice. J'ai vu la cour de Versailles avant l'époque du mariage de Louis XVI avec l'archiduchesse Marie-Antoinette.

Mon père, attaché au département des affaires étrangères, jouissait d'une réputation due à ses lumières et à ses utiles travaux. Il avait beaucoup voyagé. Les Français rapportent des pays étrangers un amour encore plus vif pour leur belle patrie, et personne ne fut plus que lui pénétré de ce sentiment qui doit être la première vertu de tout homme en place. Des gens revêtus de titres éminens, des académiciens, des

T. I.

7

« ZurückWeiter »