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ment involontaire excita des battemens de mains quí devinrent universels; les grands, la cour, le peuple, animés du même transport, n'eurent que la même manière de l'exprimer. La reine trop vivement émue, ne put résister à l'impression qu'elle éprouvait, et fut obligée de sortir un moment. Lorsqu'elle reparut, elle partagea à son tour l'hommage que la nation venait d'adresser au roi.

Tandis que tout retentissait des cris de joie, les oiseleurs, selon un usage très-ancien, lâchèrent dans l'église une grande quantité d'oiseaux, qui, par le recouvrement de leur liberté, signifiaient l'effusion des grâces du monarque sur le peuple, et que jamais les hommes ne sont plus véritablement libres que sous le règne d'un prince éclairé, juste et bienfaisant. » ( Corresp. secrète de la cour de Louis XVI.)

Note (M), page 234.

« La seule passion que Louis XVI ait jamais développée, est celle de la chasse; elle l'occupait tellement, qu'en montant dans ses petits appartemens, après le 10 août, à Versailles, j'ai vu sur l'escalier six tableaux où l'on trouvait les états de toutes ses chasses, soit quand il était dauphin, soit quand il fut roi. On y voyait le nombre, l'espèce et la qualité du gibier qu'il avait tué à chaque partie de chasse, avec des récapitulations pour chaque mois, chaque saison et chaque année de son règne.

L'intérieur de ses petits appartemens était ainsi distribué un salon orné de dorures offrait en évidence les gravures qui lui avaient été dédiées; les dessins de ca

naux qu'il avait fait creuser; le relief de celui de Bourgogne ; le plan des cônes et travaux de Cherbourg.

La salle supérieure renfermait son magasin de cartes géographiques, ses sphères, ses globes et son cabinet de géographie. On y voyait les dessins des cartes qu'il avait commencées et ceux des cartes qu'il avait finies. Il était habile dans l'art de les laver. Sa mémoire géo graphique était prodigieuse.

Au-dessus était la salle du tour et des menuiseries, meublée d'instrumens ingénieux sur l'art de travailler le bois. Il en avait hérité de Louis XV, et il s'occupait lui-même avec Duret de les conserver propres et lui

sans.

Au-dessus était la bibliothèque des livres publiés sous son règne. Les heures et les livres manuscrits d'Anne de Bretagne, de François ler, des derniers Valois, de Louis XIV, de Louis XV et du dauphin, formaient la grande bibliothèque, héréditaire du château. Louis XVI avait placé séparément, et dans deux cabinets qui se communiquaient, les ouvrages de son temps. On y distinguait une collection complète des éditions de Didot, en vélin, dont chaque volume était renfermé dans un étui de maroquin. Il avait beaucoup d'ouvrages anglais, entre autres, les Débats du Parlement britannique, en un grand nombre de volumes in-folio ( c'est le Moniteur de l'Angleterre, dont la collection est si précieuse et si rare). On y voyait à côté une histoire manuscrite de tous les projets de descente dans cette île, notamment celle du comte de Broglie, et autres plans analogues.

Une des armoires de ce cabinet était pleine de cartons contenant des papiers relatifs à la maison d'Autriche, avec cette étiquette écrite de sa main : Papiers

secrets de ma famille sur la maison d'Autriche ; papiers de ma famille sur les maisons de Stuart et de Hanovre.

Dans une armoire voisine étaient renfermés des papiers relatifs à la Russie. La méchanceté la plus raffinée a publié, contre Catherine II, contre Paul Ier, des ouvrages satiriques, vendus en France pour des histoires. Louis XVI avait recueilli et cacheté de son petit sceau les anecdotes scandaleuses de Catherine II, ainsi que l'ouvrage de Rhulières dont il avait une copie, pour s'assurer que la vie secrète de cette princesse, qui attirait la curiosité de ses contemporains, ne serait point manifestée par son moyen.

Au-dessus de la bibliothèque particulière du roi, on trouvait une forge, deux enclumes, mille outils en fer, différentes serrures ordinaires, mais fines et parfaites; des serrures à secret, des serrures ornées en cuivre doré. C'est là que l'infâme Gamin, qui depuis accusa le roi d'avoir voulu l'empoisonner, et fut payé de sa calomnie par une pension de douze mille livres, lui avait appris l'art du serrurier. Gamin, malgré sa grossièreté, avait conduit le roi à se laisser traiter comme un apprenti l'est dans son atelier par son maître. Ce Gamin, devenu notre guide par ordre du département et de la municipalité de Versailles, ne se plaignait pas cependant de Louis XVI au 20 décembre 1792. Il avait été le confident de ce prince pour une infinité de commissions importantes : le roi lui avait envoyé de Paris le livre rouge dans un paquet ; et la partie cachée pendant l'Assemblée constituante l'était encore en 1793. Gamin la cacha dans un lieu du château, inaccessible aux recherches de tout le monde, où nous la trouvâmes. Ce fut de dessous des tablettes d'une armoire secrète qu'il la retira sous nos yeux. Cette anecdote

persuaderait que Louis XVI espérait retourner dans son château.

Gamin, en apprenant son métier à Louis XVI, avait pris avec lui un ton d'autorité et de maître. «< Le roi » était bon, tolérant, timide, curieux, ami du som>> meil, me disait Gamin; il aimait avec passion `la >> serrurerie, et se cachait de la reine et de la cour » pour limer et forger avec moi. Pour porter son en>> clume et la mienne, à l'insu de tout le monde, il » fallut user de mille stratagèmes dont l'histoire ne >> finirait pas. »

Au-dessus des forges et des enclumes du roi et de Gamin, était un belvédère établi sur une plate-forme couverte de plomb. Là, assis sur un fauteuil et les yeux aidés d'un immense télescope, le roi observait ce qui se passait dans les cours de Versailles, dans l'avenue de Paris et dans les jardins du voisinage. Il avait pris en amitié Duret qui le servait dans l'intérieur, affilait ses outils, nettoyait l'enclume, collait ses cartes, préparait ses lunettes et ses télescopes au point fixe de la vuc du roi qui était myope. Ce bon Duret, et tous les domestiques de l'intérieur, ne parlaient de leur maître qu'avec regret, avec attendrissement et les larmes aux yeux.

Le roi était né d'une santé faible et délicate; mais dès l'âge de vingt-quatre ans, il eut un tempérament très-robuste. A la cour, on citait de lui des tours de force qu'il tenait de sa mère, issue de la maison de Saxe, si célèbre par ses robustes générations.

Il y avait deux hommes dans Louis XVI, l'homme qui connaît et l'homme qui veut. La première de ces qualités était très-étendue et très-variée; le roi savait à fond l'histoire de sa famille et des premières maisons

de France. C'est lui qui composa les instructions pour le voyage autour du monde de M. de La Peyrouse, que le ministre crut dressées par plusieurs membres de l'Académie des Sciences.

Il avait dans la mémoire une infinité de noms et de localités. Il se ressouvenait à merveille des quantités et des nombres. On lui présentait un jour un compte rendu, dans lequel le ministre avait mis au rang de la dépense un article inséré dans le compte de l'année précédente. « Voilà un double emploi, dit le roi : rap>> portez-moi le compte de l'année dernière, je vous >> montrerai qu'il s'y trouve. >>

Quand le roi possédait parfaitement une affaire de détail, et lorsqu'il voyait la justice lésée, il était dur jusqu'à la brutalité. Une injustice criante le faisait sortir de son caractère; alors il voulait être obéi surle-champ, pour être sûr de l'être et pour prévenir une négligence à cet égard.

Mais, dans les grandes affaires d'État, le roi qui veut et qui ordonne ne se trouvait nulle part. Louis XVI était sur le trône ce que sont dans la société ces tempéramens faibles que la nature a rendus même incapables d'une opinion. Dans sa pusillanimité, il donnait sa confiance à un ministre, et quoiqu'il connût dans la variété des avis de son conseil celui qui était le meilleur, jamais il n'eut la force de dire : C'est l'avis d'un tel que je préfère. Là fut la source des malheurs de l'État. » (Mém. hist. et polit. du règne de Louis XVI, par Soulavie, tome II. )

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