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L'archevêque de Reims, ayant été averti par le maître des cérémonies de l'arrivée de la Sainte-Ampoule, alla aussitôt la recevoir à la porte de l'église : en la remettant entre ses mains, le grand-prieur, suivant l'usage, lui adressa ces paroles : « Je vous. confie, >> Monseigneur, ce précieux trésor envoyé du ciel au » grand saint Remy, pour le sacre de Clovis et des >> rois ses successeurs ; mais je vous supplie, selon l'an»cienne coutume, de vous obliger de me la remettre >> entre les mains après le sacre de notre roi Louis XVI. » L'archevêque, conformément à la coutume, fait le serment exigé conçu en ces termes : « Je reçois avec respect » cette Sainte-Ampoule, et vous promets, foi de prélat, >> de la remettre entre vos mains, la cérémonie du sacre >> achevée. » En disant ces mots, le cardinal de La Roche-Aimon prit la merveilleuse fiole, rentra dans le chœur, et la déposa sur l'autel. Quelques instans après, il s'approcha du roi dont il reçut le serment, appelé de protection, pour toutes les églises sujettes de la couronne promesse que Sa Majesté fit assise et couverte. « Je promets, dit le roi, d'empêcher les personnes de » tout rang de commettre des rapines et des iniquités, » de quelque nature qu'elles soient. Je jure de m'appli» quer sincèrement et de tout mon pouvoir, à exter>> miner de toutes les terres soumises à ma domination » les hérétiques nommément condamnés par l'Église.

Après cette formule de serment, deux pairs ecclésiastiques présentent le roi à l'assemblée et lui demandent si elle agrée Louis XVI pour roi de France. Un silence respectueux, disent les livres qui contiennent les détails de cette cérémonie, annonça le consentement général.

L'archevêque de Reims présenta au roi le livre des

Évangiles, sur lequel Sa Majesté posant les mains fit serment de maintenir et conserver les ordres du SaintEsprit et de Saint-Louis, et de porter toujours la croix de ce dernier ordre, attachée à un ruban de soie, couleur de feu; de faire observer l'édit contre les duels, sans avoir jamais aucun égard aux représentations des princes ou seigneurs qui pourraient intercéder en faveur des coupables. La première partie de ce serment n'est guère importante, et la seconde est enfreinte tous les jours.

Lorsque le roi eut reçu, pour la seconde fois, l'épée de Charlemagne, il la déposa entre les mains du maréchal de Clermont-Tonnerre, faisant les fonctions de connétable, qui la tint la pointe levée pendant la cérémonie du sacre et du couronnement, ainsi qu'au festin royal. Pendant que le roi recevait et remettait cette épée de Charlemagne, on récita plusieurs oraisons. Dans l'une on demandait à Dieu que les saints monastères se ressentissent des libéralités du roi, que ses grâces se répandissent sur les grands du royaume; que la rosée du ciel et la graisse de la terre procurassent dans ses États une abondance intarissable de blé, de vin, d'huile et de toutes sortes de fruits, afin que sous son règne les peuples pussent jouir d'une santé constante, etc.

Quand ces prières furent finies, le prélat officiant ouvrit la Sainte-Ampoule, en fit tomber un peu d'huile qu'il délaya avec l'huile bénite, appelée saint-chrême. Le roi se prosterna devant l'autel sur un grand carreau de velours violet, semé de fleurs de lis d'or, ayant le vieil archevêque, duc de Reims, aussi prosterné à sa droite, et resta dans cette humble posture jusqu'à la fin des litanies chantées par quatre évêques, alternati

vement avec le chœur. On trouve dans ces litanies le verset suivant:

Ut dominum Apostolicum et omnes gradus Ecclesiæ in sanctâ religione conservare digneris. (Que vous daigniez conserver dans votre sainte religion le souverain pontife et tous les ordres de l'Église.)

A la fin des litanies, l'archevêque de Reims se plaça sur son fauteuil, et le roi, s'étant allé mettre à genoux devant lui', reçut les onctions sur le sommet de la tête, sur la poitrine, entre les deux épaules, sur l'épaule droite, sur la gauche, à la jointure du bras droit, à celle du bras gauche. Dans le même temps ce prélat récitait quelques oraisons dont voici la substance : Qu'il réprime les orgueilleux; qu'il soit une leçon » pour les riches; qu'il soit charitable envers les pau» vres et le pacificateur des nations. » Un peu plus bas on remarque, parmi ces oraisons, les paroles suivantes : « Qu'il n'abandonne point ses droits sur les >> royaumes des Saxons, des Merciens, des peuples du >> Nord et des Cimbres. »

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Un auteur anonyme dit que par les Cimbres on entend le royaume d'Angleterre, sur lequel nos rois se réservent expressément leurs droits incontestables, depuis Louis VIII, auquel il fut conféré par la libre élection du peuple qui avait chassé Jean-sans-Terre.

Après les sept onctions l'archevêque de Reims, aidé des évêques de Laon et de Beauvais, referma avec des lacets d'or les cuvertures de la chemise et de la camisole du roi, qui, s'étant levé, fut revêtu par le grandchambellan de la tunique, de la dalmatique et du manteau royal fourré et bordé d'hermine ces vêtemens sont de velours violet, seniés de fleurs de lis et broderies d'or, et représentent les habits de sous-diacre, de

diacre et de prêtre : symbole par lequel le clergé cherche, sans doute, à prouver qu'il est uni à la puissance royale. Le roi se remit ensuite à genoux devant l'archevêque officiant qui lui fit la huitième onction sur la paume de la main droite, et la neuvième et dernière sur celle de la main gauche; puis it mit un anneau au quatrième doigt de la main droite, comme signe représentatif de la toute-puissance et de l'union intime qui règnera désormais entre le roi et son peuple. L'archevêque prit alors sur l'autel le sceptre royal, et le mit dans la main droite du roi, et ensuite la main de justice qu'il lui mit dans la main gauche. Le sceptre est d'or émaillé, garni de perles orientales; il peut avoir six pieds de haut. Charlemagne est représenté en relief, le globe en main, assis sur une chaire ornée de deux lions et de deux aigles. La main de justice est un bâton d'or massif, haut seulement d'un pied et demi, garni de rubis et de perles, et terminé par une main d'ivoire, ou plutôt de corne de licorne; il y a de distance en distance trois cercles à feuillage tout brillans de perles, de grenats et d'autres pierres précieuses.

Voici cependant un moment où le clergé cesse de s'arroger le droit de conférer au roi la toute-puissance. M. le garde-des-sceaux de France, faisant les fonctions de chancelier, monta à l'autel, et s'étant placé du côté de l'Évangile, le visage tourné vers le chœur, il appela les pairs, pour le couronnement, de la manière suivante : « Monsieur, qui représentez le duc de Bour>> gogne, présentez-vous à cet acte, etc., etc. » Les pairs s'étant approchés du roi, l'archevêque de Reims prit sur l'autel la couronne de Charlemagne, apportée de Saint-Denis, et la posa sur la tête du roi. Aussitôt les pairs ecclésiastiques et laïcs

y portèrent la main pour la soutenir allégorie vraiment noble et expressive, mais qui serait bien plus juste, si des délégués du peuple soutenaient aussi cette couronne par le même esprit allégorique; on emploie, dans l'une des oraisons récitées en cet instant, une expression orientale qui a beaucoup d'énergie : «Que le » roi, dit-on, ait la force du rhinocéros, et qu'il > chasse devant lui, comme un vent impétueux, les >> nations ennemies jusqu'aux extrémités de la terre. » La couronne de Charlemagne, qui se conserve dans lé trésor de l'abbaye de Saint-Denis, est d'or, et enrichic de rubis et de saphirs; elle est doublée d'un bonnet de satin cramoisi brodé en or, et surmontée d'une fleur de lis d'or, couverte de trente-six perles orientales.

Après toutes ces cérémonies, l'archevêque, duc de Reims, prit le roi par le bras droit, et suivi des pairs et de tous les grands-officiers de la couronne, il le conduisit au trône, élevé sur le jubé, où il le fit asseoir, en récitant les prières de l'intronisation, dans la première desquelles il est dit : « Comme vous » voyez le clergé plus près des saints autels que le >> reste des fidèles, aussi vous devez avoir attention à >> le maintenir dans la place la plus honorable. » En achevant les oraisons prescrites pour la circonstance, le prélat quitta sa mître, fit une profonde révérence au roi, le haisa, en disant: Vivat rex in æternum ! Les autres pairs ecclésiastiques et laïcs baisèrent aussi Sa Majesté, l'un après l'autre, et dès qu'ils furent remis à leurs places, on ouvrit les portes de l'église; le peuple y entra en foule, et, dans l'instant, fit retentir les voûtes des acclamations de vive le roi! que répéta en écho la multitude des assistans, dont toute l'enceinte du chœur était remplie en amphithéâtre; un mouve

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