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» les ministres croient devoir me taire dans les lettres » qu'ils m'écrivent. C'est là que j'ai connu et révélé

dans une lettre secrète, remise au roi par le prince » de Soubise, que le comte de Broglie avait, par l'au»torisation même de Sa Majesté, continué pendant >> son exil sa correspondance, secrète et particulière » avec M. Durand à Pétersbourg, et avec d'autres mi»nistres. A cette lettre étaient joints les chiffres dont >> on se servait..... Depuis ces connaissances, heu>> reusement acquises et communiquées avec empresse>>ment à notre ministère, je n'ai cessé d'insister sur la » nécessité d'un changement de chiffres; je suis tou» jours sans moyens sûrs pour les avis secrets que j'avais » à transmettre à Constantinople, Stockholm et Péters » bourg. Toutes les dépêches du prince de Kaunitz, >> toutes celles des princes étrangers interceptées, pas>> sent par ce qu'on appelle ici le cabinet des déchiffreurs. Le baron de Pichler en est le directeur. Il tra» vaille seul avec l'impératrice, et ne rend compte qu'à » elle. Ce directeur lui remet cinq copies, une pour » l'empereur, une pour le grand-duc de Toscane, suc»cesseur éventuel de la monarchie autrichienne; une à » Bruxelles, au prince de Stharemberg, désigné pour >> remplacer le prince de Kaunitz, et une au comte de » Rosemberg, homme de confiance. Chacun renvoie ces >> copies à l'impératrice, avec des observations à mi

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marge; et c'est de ces observations combinées ou dis» cutées, que se forment les projets et les résolutions. » L'impératrice fait quelquefois ajouter on retrancher, » dans les dépêches interceptées, lorsqu'elle veut faire » parvenir à l'empereur des conseils ou des avis dont » elle ne voudrait pas paraître l'auteur. » (Mém. hist. et polit, du règne de Louis XVI, par Soulavie, T. III. )

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Note (D), page 155.

CETTE notice de personnages de la cour décèle l'esprit de parti que l'impératrice alimentait en France. Elle avait chargé le comte de Mercy d'en avoir soin; elle indiquait, sans exception, tous les Lorrains nés dans une province qui avait été le berceau de son mari, François Ier, et dans laquelle la maison d'Autriche conservait soigneusement un parti qui n'oublia jamais ses anciens souverains. C'était, dans la politique de la maison d'Autriche, une pierre d'attente. L'attachement, sans trop d'impegno, est digne des formes délicates d'une femme habile, qui savait nuancer et couvrir ses sentimens. Le duc de Choiseul, avec raison, est à la tête de la liste ; il était le chef du parti lorrain et autrichien; il l'avait le premier organisé en France. Les Montazet étaient vendus totalement à ce parti, au point que depuis, l'abbé de Montazet fut archevêque de Lyon par la protection du duc de Choiseul, pour ses opinions jansénistes et pour l'esprit de persécution qu'il manifesta contre les sulpiciens, et en général contre le parti des jésuites.

Quant au comte de Broglie, l'impératrice aura été bien trompée par cet adroit politique. Il était chef de la fameuse correspondance secrète qui ne cessa de travailler contre les intérêts de Marie-Thérèse, en traversant, en secret, l'alliance autrichienne de 1756.

Le comte de Broglie n'était pas homme à rendre son secret et sa patrie. Il fut même persécuté par le prince de Kaunitz; la recommandation du comte de Broglie est donc le résultat de ces incompréhensibles conduites de plusieurs diplomates habiles dans l'art de contrefaire

leurs principes, lorsqu'ils en ont, ou d'en professer une grande variété, suivant les circonstances. Le profond secret qui fut sans cesse gardé par les agens de la correspondance secrète, sous le comte de Broglie, invite à croire qu'il était dû nombre des premiers. ( Mém. hist. et polit. du règne de Louis XVI, par Soulavie..)

Note (E), page 157.

L'ABBÉ Georgel, secrétaire d'ambassade à Vienne, homme habile, dont nous avons déjà parlé, page 128 de ce volume, raconte en ces mots, dans ses Mémoires, le rappel du cardinal. Son récit confirme, en quelques parties, celui de madame Campan. Rien n'éclaire plus l'histoire que cette concordance de témoignages diffé

rens.

Au départ du prince Louis de Rohan pour Compiègne où le nouveau roi tenait sa cour, je restai à Vienne, chargé des affaires de France près le ministère autrichien. Je reçus en conséquence des instructions pour continuer les négociations, comme chargé de la correspondance politique avec notre ministère et l'ambassadeur du roi à Constantinople. Le prince Louis de Rohan apprit, à son arrivée, les plaintes de MarieThérèse, et les démarches déjà faites en son nom par Marie-Antoinette pour son rappel. Il eut une audience du roi elle fut courte et ne dut pas le satisfaire. Louis XVI l'écouta quelques minutes, et lui dit ensuite brusquement: « Je vous ferai bientôt savoir mes vo

Jontés. »

» Jamais il ne put obtenir une audience de la reine, et, sans vouloir le recevoir, elle lui fit demander la lettre que lui avait remise pour elle sa mère, l'impéra

trice Marie-Thérèse. Ses parens ne lui dissimulèrent pas que les préventions du roi et de la reine contre lui étaient très-fortes. Ils lui conseillèrent de ne point faire de tentatives pour son retour à Vienne; qu'elles seraient à pure perte, et ne pourraient donner que plus de publicité à sa défaveur. Le nouveau ministre des affaires étrangères était encore à Stockholm, et celui qui avait l'interim n'avait pas assez de crédit pour appuyer avec succès la demande du retour à Vienne du prince Louis, qui se trouva dans cet état de perplexité et d'incertitude pendant plus de deux mois, et qui croyait son honneur intéressé à retourner à son ambassade. Il crut devoir écrire au roi une lettre où il lui retraçait sa situation avec des couleurs faites pour intéresser la justice et la sensibilité du monarque. Ceite lettre demeura sans réponse: seulement Louis XVI dit à madame la comtesse de Marsan, cousine de l'ambassadeur, que l'ambassade de Vienne était destinée à un homme désiré par l'impératrice et désigné par la reine, qu'il n'avait pu refuser. Pientôt on apprit que cet homme était le baron de Breteuil. A cette nouvelle, le prince Louis ne put plus douter de sa disgrâce complète et des désagrémens qu'il aurait à essuyer sous le nouveau règne.

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L'ARCHEVÊQUE de Paris, Christophe de Beaumont, ardent apôtre des fréquentes communions, était arrivé de Paris dans l'intention de solliciter, en public, l'administration du roi, et de la retarder autant qu'il le pourrait secrètement; cette cérémonie ne pouvait avoir lieu sans l'expulsion éclatante et antérieure de la concubine, suivant les canons de l'Église et le parti jésuí

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tique dont Christophe était le chef: ce parti, qui s'était servi de madame Du Barry pour anéantir les parlemens, pour soutenir le duc d'Aiguillon, et pour ruiner la faction des Choiseul, ne consentait pas volontiers à la déshonorer canoniquement, après des services aussi éclatans. L'archevêque de Paris avait toujours dit trèshaut, dans tous les temps, qu'elle avait rendu à la religion les plus signalés services (1). A ce parti moliniste, se joignaient les ducs de Richelieu, de Fronsac et d'Aiguillon, Bertin, Maupeou et Terray. Madame Du Barry étant leur appui auprès du roi faible et pusillanime, ils devaient la défendre, prévenir un affront et les vengeances qu'avaient méditées en pareil cas la duchesse de Châteauroux, en 1745.

Le parti opposé, celui des Choiseul, qui se montrait partout, brûlait, au contraire, d'accélérer une cérémonie religieuse qui devait faire rentrer dans le néant une favorite qui avait expulsé de la cour leur chef, le duc de Choiseul. Il était plaisant de voir le parti de celuici, qui fut en France le fléau de la religion, l'appeler à son secours, pendant la maladie du roi, pour se venger de madame Du Barry, tandis qu'on voyait le parti contraire, celui de l'archevêque et des dévots, se réunir pour empêcher la communion de Louis XV. Ils agitaient et trafiquaient de sang-froid, en ce moment, de la conscience et des remords du roi, me dit le cardinal de Luynes.

(1) Il est fort douteux que le sévère Christophe de Beaumont ait tenu de pareils discours; quant à nous, nous n'en croyons

rien.

(Noté de l'édit.)

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