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premier voyage de Marly que madame la duchesse de Chartres, depuis duchesse d'Orléans, introduisit, dans l'intérieur de la reine, mademoiselle Bertin, marchande de modes, devenue fameuse, à à cette époque, par le changement total qu'elle introduisit dans la parure des dames françaises.

que

On peut dire l'admission d'une marchande de modes chez la reine fut suivi de résultats fâcheux pour Sa Majesté. L'art de la marchande, reçue dans l'intérieur en dépit de l'usage qui en éloignait sans exception toutes les personnes de sa classe, lui facilitait les moyens de faire adopter chaque jour quelque mode nouvelle. La reine, jusqu'à ce moment, n'avait dévelop pé qu'un goût fort simple pour sa toilette; elle commença à en faire une occupation principale; elle fut naturellement imitée par toutes les femmes.

On voulait à l'instant avoir la même parure que la reine; porter ces plumes, ces guirlandes auxquelles sa beauté, qui était alors dans tout son éclat, prêtait un char

me infini. La dépense des jeunes dames fut extrêmement augmentée; les mères et les maris en murmurèrent : quelques étourdies contractèrent des dettes; il y eut de fàcheuses scènes de famille, plusieurs ménages refroidis ou brouillés; et le bruit général fut que la reine ruinerait toutes les dames françaises.

Le costume changea successivement, et les coiffures parvinrent à un tel degré de hauteur, par l'échafaudage des gazes, des fleurs et des plumes, que les femmes ne trouvaient plus de voitures assez élevées pour s'y placer, et qu'on leur voyait souvent pencher la tête ou la placer à la portière. D'autres prirent le parti de s'agenouiller pour ménager, d'une manière encore plus sûre, le ridicule édifice dont elles étaient surchargées (1). Des carica

(1) Si l'usage de ces plumes et de ces coiffures extravagantes se fût prolongé, disent très-sérieusement les Mémoires de cette époque, il aurait opéré une révolution dans l'architecture. On eût senti la nécessité de hausser les portes et le plafond des loges de spectacle, et surtout l'impériale des voitures. Le roi ne vit pas

tures sans nombre exposées partout, et dont quelques-unes rappelaient malicieusement les traits de la souveraine, attaquèrent inutilement l'exagération de la mode; elle ne changea, comme cela arrive toujours, que par la seule influence de l'inconstance et. du temps.

L'habillement de la princesse était un chef-d'œuvre d'étiquette; tout y était réglé. La dame d'honneur et la dame d'atours, toutes deux si elles s'y trouvaient ensemble, aidées de la première femme et de deux femmes ordinaires, faisaient le service principal; mais il y avait entre elles des distinctions(1).

sans chagrin la reine adopter cette espèce de coiffure : elle n'était jamais si belle à ses yeux que de ses seuls agrémens. Un jour que Carlin jouait à la cour, devant cette princesse, en habit d'arlequin, il avait mis à son chapeau, au lieu de la queue de lapin qui en est l'ornement obligé, une plume de paon d'une excessive longueur. Cette aigrette d'un nouveau genre, et qui s'embarrassait dans les décorations, lui donna lieu de hasarder cent lazzis. On voulait le punir: mais il passa pour certain qu'il n'avait point agi sans ordre.

(Note de l'édit.)

(1) La distinction entre le service d'honneur et le

La dame d'atours passait le jupon, présentait la robe. La dame d'honneur versait l'eau pour laver les mains et passait la chemise. Lorsqu'une princesse de la famille royale se trouvait à l'habillement, la dame d'honneur lui cédait cette dernière fonction, mais ne la cédait pas directement aux princesses du sang; dans ce cas, la dame d'honneur remettait la chemise à la première femme qui la présentait à la princesse du sang. Chacune de ces dames observait scrupuleusement ces usages, comme tenant à des droits. Un jour d'hiver, il arriva que la reine, déjà toute déshabillée, était au moment de passer sa che

service ordinaire peut s'établir aisément. J'ai le droit de faire, dit avec arrogance le service d'honneur. C'est à vous à faire, c'est à vous à suivre, répond avec humeur le service ordinaire. Entre ces prétentions ridicules et contradictoires de gens qui ont le droit d'agir et qui n'agissent point, et de gens qui devraient agir et qui ne veulent pas, il pourrait arriver que les princes fussent fort mal servis. Madame Campan s'est, au reste, donné la peine de recueillir des détails sur le service ordinaire de la reine de France. On les trouvera au nombre des éclaircissemens imprimés dans le même caractère que le texte [*]. (Note de l'édit.)

mise; je la tenais toute dépliée; la dame d'honneur entre, se hâte d'ôter ses gants et prend la chemise. On gratte à la porte, on ouvre : c'est madame la duchesse d'Orléans ; ses gants sont ôtés, elle s'avance pour prendre la chemise, mais la dame d'honneur ne doit pas la lui présenter; elle me la rend, je la donne à la princesse ; on gratte de nouveau c'est madame, comtesse de Provence; la duchesse d'Orléans lui présente la chemise. La reine tenait ses bras croisés sur sa poitrine et paraissait avoir froid. Madame voit son attitude pénible, se contente de jeter son mouchoir; garde ses gants, et en passant la chemise, décoiffe la reine qui se met à rire pour déguiser son impatience, mais après avoir dit plusieurs fois entre ses dents C'est odieux! quelle importunité!

Cette étiquette, gênante à la vérité, était calculée sur la dignité royale qui ne doit trouver que des serviteurs, à commencer même par les frères et les soeurs du mo

narque.

En parlant ici d'étiquette, je ne veux pas

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