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seconde princesse était la pieuse Élisabeth, victime de son respect et de son tendre attachement pour le roi son frère, et dont les hautes vertus méritent la couronne céleste (1). Elle était encore presqu'à la lisière,

l'indiscrétion de se servir, en sa présence même; du sobriquet qu'on lui donnait, reçut sur-le-champ une réprimande sévère de la comtesse de Marsan qui lui fit, entendre qu'elle ferait bien de ne pas reparaître aux yeux de la princesse. Madame Clotilde l'envoya chercher le lendemain : Ma gouvernante a fait son de voir, lui dit-elle, et je vais faire le mien; revenez nous faire votre cour, et ne vous rappelez plus une étourderie que j'ai moi-même oubliée.

Cette princesse, si épaisse de corps, avait un esprit agréable et fin. Son affabilité, ses grâces préveñantes la rendaient chère à tous ceux qui l'approchaient. Un poëte, uniquement occupé du prodigieux embonpoint de madame Clotilde, composa le quatrain suivant lorsqu'il fut décidé qu'elle épouserait le prince de Piémont.

Pour en saisir l'esprit ou pour mieux dire le sens, il ne faut point oublier que deux princesses de Savoie venaient d'épouser deux princes français.

Le bon Savoyard qui réclame
Le prix de son double présent,
En échange reçoit Madame ;

C'est le payer bien grassement.

(Note de l'édit.)

(1) Élisabeth-Philippine-Marie-Hélène de France,

à l'époque du mariage du dauphin. La dauphine lui donnait une préférence marquée. La gouvernante, qui cherchait à faire valoir celle des deux princesses que la nature avait traitée moins favorablement, sut mauvais gré à madame la dauphine de son affection particulière pour madame Élisabeth, et, par

était née à Versailles le 3 mai 1764. « Madame Élisa beth, dit M. de La Salle, auteur d'un article biographique sur cette intéressante et malheureuse princesse, n'avait pas reçu de la nature, comme madame Clotilde son auguste sœur, cette douceur et cette flexibilité de caractère qui rendent les vertus faciles; elle annonçait plus d'un trait de ressemblance morale avec le duc de Bourgogne, l'élève de Fénélon. L'éducation et la piété agirent sur elle comme sur ce prince : les leçons, les exemples dont on l'entoura l'ornèrent de toutes les qualités et de toutes les vertus, et ne fui laissèrent de ses premiers penchans qu'une aimable sensibilité, de vives impressions, une fermeté qui semblait faite pour les malheurs terribles auxquels le ciel la réservait. » Nous aurons plus d'une fois occasion, dans le cours de ces Mémoires, et dans l'ensemble de cette Collection, de remarquer sa constante amitié, sa touchante résignation, son dévouement sublime, ou son angélique douceur, jusqu'au moment où elle montra le courage héroïque et calme du martyr.

(Note de l'édit.)

des plaintes indiscrètes, elle refroidit l'amitié qui existait cependant entre madame Clotilde et Marie-Antoinette. Il s'éleva même quelque rivalité sur l'article de l'éducation, et on s'expliqua assez haut et trèsdéfavorablement sur celle que l'impératrice Marie-Thérèse avait fait donner à ses filles. L'abbé de Vermond se crut offensé, prit part dans cette querelle, et unit ses plaintes et ses plaisanteries à celles de madame la dauphine sur les critiques de la gouvernante, et s'en permit même à son tour quelques-unes sur l'instruction de madame Clotilde. Tout se sait dans une cour. Madame de Marsan fut à son tour instruite de ce qui s'était dit chez la dauphine, et lui en sut très-mauvais gré. A partir de ce moment,' il s'établit un foyer d'intrigues, ou plutôt de commérage, contre Marie-Antoinette, dans la société de madame de Marsan; ses moindres actions y étaient mal interprétées ; on lui faisait un crime de sa gaieté et des jeux innocens qu'elle se permettait quelquefois dans son intérieur avec les plus jeunes de ses dames, et même avec des femmes de

son service. Le prince Louis de Rohan, placé à l'ambassade de Vienne par cette société, y fut l'écho de ces injustes critiques, et se jeta dans une série de coupables délations qu'il colorait du nom de zèle. Il représentait la jeune dauphine comme s'aliénant tous les cœurs par des légèretés qui ne pouvaient convenir à la dignité de la cour de France. Cette princesse recevait souvent de Vienne des remontrances dont la source ne pouvait lui demeurer long-temps cachée, et c'est à cette époque qu'il faut rapporter l'éloignement qu'elle n'a jamais cessé de témoigner au prince de Rohan.

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Vers le même temps, la dauphine eut connaissance d'une lettre écrite par le prince Louis à M. le duc d'Aiguillon, dans laquelle cet ambassadeur s'exprimait en termes peu convenables sur l'attitude de Marie-Thérèse, relativement au partage de la Pologne. Cette lettre du prince Louis avait été lue chez la comtesse Du Barry (1); la légèreté de la

(1) Voyez les détails piquans relatifs à cette anecdote dans les Mémoires de Weber, tome Ier, pag. 304.

correspondance de l'ambassadeur blessait à Versailles la sensibilité et la dignité de la dauphine, tandis qu'à Vienne les rapports qu'il faisait à Marie-Thérèse contre la jeune princesse, finirent par lui rendre suspects les motifs de ces interminables plaintes.

Marie-Thérèse, partageant enfin les mêmes soupçons, prit le parti d'envoyer à Versailles son secrétaire du cabinet, le baron de Neni, qui devait examiner avec attention la conduite de madame la dauphine, et acquérir la mesure juste de l'opinion de la cour et de Paris sur le compte de cette princesse. Le baron de Neni, après y avoir mis le temps et la sagacité convenables, détrompa sa souveraine sur les exagérations de l'ambassadeur français; l'impératrice n'eut pas de peine à remarquer dans les calomnies qu'on avait osé lui faire parvenir, à titre d'intérêt pour son auguste fille, la preuve de l'inimitié d'un parti qui n'avait jamais approuvé l'alliance de la maison de Bourbon avec la sienne (1). A cette époque, madame

(1) L'impératrice Marie-Thérèse connaissait fort

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